Archives

Social / Citoyens - Dans une ambiance tendue, l'Assemblée entame l'examen du projet de loi Asile et immigration

Après une trentaine d'heures de débat en commission des lois (voir notre article ci-dessous du 9 avril), l'Assemblée nationale a entamé le 17 avril en fin de journée l'examen, en séance publique, du projet de loi "pour une immigration maîtrisée et un droit d'asile effectif" présenté au conseil des ministres du 21 février (voir notre article du 26 février sur le contenu détaillé du projet de loi).
Comme attendu, le débat s'est ouvert dans un ambiance tendue, entre une opposition de droite qui trouve le texte insuffisant, une extrême-droite qui tente de se faire entendre sur son sujet de prédilection et une gauche et une extrême-gauche hostile ou très hostile au texte. Le tout avec certains députés de la majorité qui, malgré le recadrage de Richard Ferrand, le président du groupe LREM, menacent de s'abstenir, voire de voter contre le texte.

Plus de 1.000 amendements

"Petite loi de petits ajustements techniques" qui "ne permettra pas à la France de sortir du chaos migratoire" pour les uns (Guillaume Larrivé, LR), "océan de cruauté" pour les autres (Danièle Obono, LFI) et "atteinte à nos coutumes, nos traditions, nos valeurs" pour certains (Marine Le Pen, FN), le texte a suscité suffisamment de brouhaha dans l'hémicycle pour qu'Annie Genevard (LR), qui présidait la séance, soit obligée de préciser que "si les esprits s'échauffent dès maintenant, je ne sais pas comment nous terminerons". Le projet de loi a d'ailleurs eu droit à des rappels au règlement, à une motion de rejet préalable et à une motion de renvoi en commission, toutes deux rejetées.
Sur le fond - et après la discussion générale -, seulement une cinquantaine d'amendements - dont aucun n'a été retenu - avaient été examinés à la mi-journée, ce mercredi 18 avril, sur les 1.096 amendements déposés sur le texte. Et seuls les deux premiers articles du texte avaient été adoptés.
L'article Ier prévoit la délivrance, dès reconnaissance de la protection, d'un titre de séjour pluriannuel d'une durée de quatre ans - au lieu d'un an actuellement - aux bénéficiaires d'une protection internationale et aux apatrides. Dans le même esprit, l'article 2 sécurise l'accès à la carte de résident pour les personnes protégées et leur famille. Il prévoit notamment la délivrance de plein droit d'une carte de résident aux bénéficiaires de la protection subsidiaire et aux apatrides, ainsi qu'aux membres de leur famille, dès lors qu'ils justifient de quatre années de résidence régulière.

Des ouvertures du côté de la majorité

Les débats devraient s'achever dans la nuit de vendredi à samedi, même si le nombre d'amendements et les tensions dans l'hémicycle peuvent bousculer un peu ce calendrier. En attendant, Gérard Collomb est prêt à quelques concessions pour éviter que les tiraillements au sein de la majorité aillent jusqu'à des abstentions ou des votes contre. Le ministre de l'Intérieur l'avait déjà laissé entendre lors de l'examen du texte en commission des lois, en se disant favorable à ce que les demandeurs d'asile puissent, après six mois, "accéder au travail, à cette réserve près qu'il ne faut pas que le demandeur d'asile puisse bénéficier d'une procédure plus facile que les personnes qui viennent légalement en France pour travailler" (voir notre article ci-dessous du 9 avril 2018).

Vers une solution pour les mineurs en centres de rétention ?

Présentant son texte à l'ouverture de la discussion générale, le 16 avril, Gérard Collomb a fait un nouveau geste en se disant "sensible" à la question de la présence de mineurs (avec leur famille) dans les centres de rétention. Tout en s'opposant à la remise en cause de cette possibilité, il s'est déclaré prêt à soutenir "tous les travaux parlementaires" qui pourraient contribuer à régler cette question.
De même, le ministre de l'Intérieur n'a pas hésité à évoquer les conditions de vie "souvent indignes" au sein des centres de rétention. Un sujet d'autant plus sensible que le projet de loi prévoit de passer la durée maximale de la rétention administrative de 45 à 90 jours. Enfin, il n'est pas exclu que certaines mesures inspirées du récent rapport d'Aurélien Taché, député (LREM) du Val d'Oise ("Pour une politique ambitieuse d'intégration des étrangers arrivant en France" - voir notre article du 20 février 2018), soient reprises pour renforcer le volet "intégration" du projet de loi. Les députés LREM ont d'ailleurs fait passer le message en votant, en commission des lois, un amendement rebaptisant le texte en projet de loi "pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie", alors que l'intégration ne figurait pas dans l'intitulé initial (voir notre article ci-dessous du 9 avril 2018).
On notera qu'à peu près au moment où les députés engageaient l'examen du texte, Emmanuel Macron, qui intervenait mardi à Strasbourg devant le Parlement européen, a proposé la création d'un "programme européen qui soutienne directement, financièrement, les collectivités locales qui accueillent, qui intègrent des réfugiés".

Références : projet de loi pour une immigration maîtrisée et un droit d'asile effectif (examiné en première lecture à l'Assemblée nationale du 16 au 20 avril 2018).

 

 

Pour aller plus loin

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis