Prévention de la délinquance - Crédits FIPD : Bernard Cazeneuve dévoile ses orientations pour 2015

Le FIPD sera doté de 53 millions d'euros en 2015, a annoncé le ministre de l'Intérieur, lundi, lors d'un grand colloque sur la prévention. Des crédits qui seront orientés pour moitié vers les jeunes et la récidive.

Au regard "des bénéfices que peut en tirer la société", la prévention "justifie que l’on y consacre les moyens nécessaires". C’est ce qu’a déclaré le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve, lundi 13 octobre, à l’occasion d’un grand colloque organisé sur le sujet par le secrétariat général du Comité interministériel de prévention de la délinquance (SG-CIPD). A cet effet, les crédits du Fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD), seront "préservés" en 2015 "en dépit du contexte budgétaire", a assuré le ministre, c'est-à-dire autour de 53 millions d’euros. Soit, en réalité, une légère baisse par rapport à 2014 (54,6 millions d’euros).
Ces crédits, accordés sur appels à projets départementaux, permettent aux collectivités de financer des actions de prévention dans le cadre des priorités nationales. Celles-ci ont été définies en trois axes par la Stratégie nationale de prévention de la délinquance pour 2013-2017 : la délinquance des jeunes ; les violences intrafamiliales et l'aide aux victimes ; la tranquillité publique.

8 millions d'euros pour la récidive

Or l’emploi du FIPD devra "être recentré sur les nouvelles orientations prioritaires", a insisté le ministre, notamment les jeunes et la récidive qui "ont vocation à concentrer près de la moitié des crédits". D’après le ministre, la prochaine circulaire d’emploi du FIPD demandera aux préfets de "doubler les moyens alloués aux actions de prévention de la récidive afin de passer de 4 à 8 millions d’euros". Un domaine dans lequel les compétences des collectivités ont été accrues par la loi Taubira du 15 août 2014 (voir ci-contre notre article du 31 juillet 2014). Bernard Cazeneuve a d’ailleurs rappelé une disposition de cette loi qui élargit la liste des actions éligibles au FIPD (article 38). La loi du 5 mars 2007 permettait aux collectivités de financer des travaux d’intérêt général destinés aux personnes condamnées. Il en ira désormais de même "des actions d'insertion ou de réinsertion ou des actions de prévention de la récidive destinées aux personnes placées sous main de justice". "Je demanderai aux préfets de veiller au strict respect de cette disposition", a appuyé le ministre.
A côté de la récidive, le financement de l’aide aux victimes et de la lutte contre les violences intrafamiliales et faites aux femmes sera "stabilisé" à hauteur de 10 millions d’euros.
Souhaitant continuer à développer la vidéoprotection, "en lien étroit avec les élus", le ministre a également rappelé que, si celle-ci représentait jusqu’à 60% des crédits du FIPD jusqu’en 2012, elle avait été ramenée à un tiers, en application de la Stratégie nationale de prévention de la délinquance.
Lors de son intervention, Bernard Cazeneuve a aussi annoncé qu’il prévoyait de lancer, avec le ministre de la Ville, un appel à projets national "visant à soutenir par le FIPD des initiatives locales, des actions innovantes permettant de renforcer et restaurer" le dialogue entre les jeunes et la police.

"Lutter avec les maires contre le sentiment d'insécurité"

Selon le ministre, au-delà des 53 millions d’euros du FIPD, l’effort financier global de l'Etat en faveur de la prévention atteint près de 3 milliards d’euros chaque année (en tenant compte du coût de déploiement des forces de l’ordre sur la voie publique). Le ministre a insisté sur l’implication des collectivités, notamment les conseils généraux en charge de la prévention spécialisée et les communes ou intercommunalités avec les coordonnateurs des CLPSD. "Je veux donc saluer l’action des élus qui font le choix dans un contexte budgétaire difficile d’investir dans la prévention de la délinquance", s’est-il félicité. "Nous devons lutter collectivement avec les maires contre le sentiment d’insécurité", a-t-il aussi déclaré, évoquant le plan d’actions qu’il présentera en 2015 sur la base du rapport de la mission Bergougnoux qui vient de lui être remis et de la réflexion demandée aux directeurs généraux de la police et de la gendarmerie nationale (voir notre article du 7 octobre 2014). "Un renforcement de l’implication de l’Etat au niveau local me semble (…) parfois nécessaire afin de ne pas laisser certains maires isolés et démunis", a-t-il dit.
Bernard Cazeneuve a évoqué le "sujet majeur" de l'échange d'informations confidentielles au sein des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance. Alors que les travailleurs sociaux rechignent souvent à partager leurs données, cette "épineuse question a fait l'objet d'un cadrage national", a rappelé le ministre, avec l'élaboration par le CIPD d'une charte déontologique type présentée en juin dernier. Le ministre a également dit qu'il serait "très attentif" aux préconisations de la mission d'information présidée par le député Jean-Pierre Blazy dont le rapport est attendu le 22 octobre.
Actualité oblige, le ministre s'est enfin penché sur la question de la "radicalisation jihadiste" et du volet préventif du plan qu’il a présenté en Conseil des ministres le 23 avril dernier : "signalement des cas de radicalisation par les familles ou les proches, prise en charge centralisée au niveau des préfectures, mesures d’accompagnement individualisées des jeunes concernés, campagnes d’information".

Michel Tendil

Le prix de la Prévention de la délinquance 2014

Le prix Prévention de la délinquance 2014 a été décerné, lundi 13 octobre, à l’association ALC (Accompagnement, Lieux d’accueil, Carrefour éducatif et social).
Le prix, initié en 2008 par le Forum français pour la sécurité intérieure (FFSU), a été remis cette année conjointement avec le CIPD, à l’occasion de son colloque sur la prévention de la délinquance.
La septième édition du prix avait pour thème la traite des êtres humains. L’ action primée s’adresse aux victimes de traite qui se trouvent en grande vulnérabilité, en leur proposant un hébergement éloigné de leur lieu de résidence, avec un accompagnement personnalisé. Selon le CIPD, il s’agit d’un "exemple unique de coordination partenariale et de prise en charge des victimes quelle que soit la diversité des situations sociales traitées".
M.T.