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Coopération transfrontalière 2021-2027: à vos projets !

Après la période délicate de la pandémie, la coopération transfrontalière connaît une série de signaux positifs. C'est l'occasion pour les collectivités de se préparer dès à présent à la programmation 2021-2027 des programmes Interreg VI.

Malmenée pendant la crise sanitaire, avec la fermeture brutale des frontières laissant des millions de navetteurs livrés à eux-mêmes, la coopération transfrontalière a connu aussi de belles avancées, avec la mise en œuvre du traité franco-allemand d’Aix-la-Chapelle du 22 janvier 2019 et son pendant vis-à-vis de l’Italie, le traité du Quirinal, signé le 26 novembre 2021. À présent, un traité similaire est envisagé avec l’Espagne. Au plan intérieur, il y a eu aussi la loi "3DS" du 21 février 2022, qui, pour la première fois s’agissant d’une loi, "comporte un chapitre transfrontalier", s’est félicité Jean Peyrony, directeur général de la Mission opérationnelle transfrontalière (MOT), vendredi 8 avril, lors d’un point organisé par la Banque des Territoires, à l’occasion de la présidence française du conseil de l’Union européenne. La MOT n’a pas démérité dans ces apports législatifs qui tirent notamment les leçons de la crise sanitaire. Il est par exemple question de veiller à assurer la continuité des soins, l’accès aux soins urgents et la coordination en temps de crise avec les voisins frontaliers, au sein des plans régionaux de santé des ARS. La loi permettra de constituer des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) intégrant des professionnels étrangers. Elle comporte aussi des mesures en matière d’aménagement et de développement territorial (association des collectivités étrangères frontalières aux réflexions des commissions départementales d’aménagement commercial, possibilité pour les pôles métropolitains de devenir autorités organisatrices de la mobilité) et en matière d’éducation et de formation (une ordonnance est attendue d’ici la fin de l’année)…
Enfin, un troisième élément est attendu avec impatience : la révision du code frontières Schengen, qui devrait elle-aussi tenir compte des enseignements de la pandémie, avec la reconnaissance des bassins de vie transfrontaliers.

40% du territoire européen

Les espaces transfrontaliers représentent 40% du territoire de l’Union européenne sur 20.000 km de frontières, a indiqué Jean Peyrony, y compris une quarantaine de grandes agglomérations. Un tiers des Européens vivent dans ces "périphéries" souvent loin des préoccupations des capitales. C’est aussi 2 millions de travailleurs qui chaque jour traversent la frontière, dont presque 500.000 navetteurs français qui se rendent essentiellement au Luxembourg et à Genève… Ce sont autant de difficultés du quotidien que la coopération cherche à faire tomber depuis une trentaine d’année, avec quelques exemples marquants comme l'hôpital de Cerdagne, le tramway Strasbourg - Kehl ou le RER transfrontalier entre Genève et Annemasse... Les échelles de coopération sont multiples, donnant parfois l'impression d'un enchevêtrement. Question financements, il faut essentiellement compter sur le programme de coopération territoriale européen Interreg, dont la nouvelle programmation 2021-2027 démarre avec une enveloppe de près de 10 milliards d’euros, dont un peu plus d'un milliard pour la France (voir notre article du 28 juillet 2021). "C’est le moment où ces programmes vont être lancés", a rappelé Jean Peyrony, invitant les élus à s’en saisir. La MOT apporte son expertise pour faciliter la compréhension des différents outils.

Besoin d'une stratégie

La métropole de Nice Côte d’Azur a su utiliser ces instruments à son avantage. "Ces programmes permettent d’expérimenter des choses en commun avec une 'incitativité' financière très importante : les taux de cofinancement sont généralement très élevés, jusqu’à 85%, même s’ils vont un peu baisser lors de cette programmation", a souligné Sébastien Viano, ancien responsable des financements européens à la métropole, aujourd’hui directeur général adjoint en charge de l’Europe à la région Sud. Après avoir lancé une multitude de projets entre 2014 et 2020, la métropole s’est dotée d’une véritable stratégie, comme l’y obligeait la loi Maptam de 2014 via les "schémas de coopération transfrontalière" (voir notre article du 13 octobre 2021), avec des financements du pacte État-métropole et l’aide de la MOT. Comme le rappelle Jean Peyrony "à Nice (avant 2014, ndlr), il n’y avait pas ou peu de projets, encore moins de stratégie, et pas non plus de gouvernance… C’est parti des personnes, des liens très forts entre Nice, l’Italie, et Monaco". Le directeur général de la MOT souligne aussi "le rôle déterminant des élus locaux". "Si vous voulez démarrer à toute échelle une coopération, il faut commencer par s’engager et franchir la frontière, commencer par des projets, mais cela ne suffit pas. À un moment donné, on a quand même besoin d’une stratégie." Ce qui suppose de construire une "gouvernance". Jean Peyrony relève en particulier "l’énorme dissymétrie de chaque côté de la frontière", l’Italie étant par exemple beaucoup plus régionalisée que la France. La bonne nouvelle est que les règlements de la nouvelle programmation "sont beaucoup plus intelligents qu’il y a dix ans".

  • Deuxième édition du Borders Forum les 21 et 22 juin 2022 à Paris

La Mission opérationnelle transfrontalière (MOT) accueille la deuxième édition du Borders Forum, les 21 et 22 juin 2022 à la Cité internationale universitaire de Paris, dans le cadre de la présidence française du Conseil de l’Union européenne. L'événement, co-organisée par la Commission européenne et le Comité européen des régions, se tiendra dans le contexte particulier de la guerre en Ukraine. Les débats seront retransmis en direct. Le programme en ligne et les inscriptions sur le site internet de l’événement : www.bordersforum.eu