Convention entre l'OFB et les chambres d'agriculture : une "finalisation" encore incertaine

À trois jours de l'ouverture du Salon de l'agriculture, la convention censée huiler les rouages des relations entre agents de l'Office français de la biodiversité (OFB) et agriculteurs est loin d'être signée, contrairement aux déclarations du ministre de la Transition écologique, mercredi. La principale pomme de discorde tient à l'armement des agents.

Le ministre de la Transition écologique aurait-il parlé un peu vite ? Au milieu des annonces gouvernementales sur l'agriculture, mercredi (voir notre article du 21 février), Christophe Béchu a indiqué qu'une convention entre les chambres d'agriculture et l'Office français de la biodiversité (OFB) était en cours de "finalisation". L'enjeu : améliorer les relations entre les agriculteurs et les agents de l'Office français de la biodiversité, chargés entre autre de contrôler les exploitations. Une annonce un peu précipitée au goût de Chambres d'agriculture France, à quelques jours d'un Salon de l'agriculture qui s'annonce agité. Si l'OFB et la tête de réseau des chambres d'agricultures ont bien initié un projet de convention, "le dialogue entamé n'est pas abouti et ne saurait se limiter" à cette seule convention, souligne Chambre d'agriculture France qui, dans un communiqué du 21 février, se dit "surprise" de cette annonce. Car pour elle, plusieurs points restent en suspens, comme le désarmement des agents contrôleurs, le changement de qualification de certaines infractions en contravention (afin de ne pas enclencher la saisine systématique du procureur de la République), la mise en place de peines de substitution (sous forme de formation) et la conduite des auditions en mairie plutôt qu'en gendarmerie...

"Les agriculteurs ne sont pas des délinquants et ne doivent pas être traités comme tels alors qu’ils peinent à mettre en place des réglementations compliquées, floues et parfois même contradictoires", souligne Sébastien Windsor, président de Chambres d’agriculture France. 

Désarmement

Né de la fusion de l'Agence française de la biodiversité et de l’ONCFS (voir notre article du 26 juillet 2019), l'OFB compte quelque 3.000 agents, dont 1.700 inspecteurs de l'environnement qui disposent de pouvoirs de police administrative et judiciaire et sont à cet égard armés. Chargés de contrôler la bonne application des réglementations environnementales dans les exploitations (notamment sur l'eau, les pesticides, les haies…), ils sont la cible des attaques des syndicats agricoles depuis le début du mouvement, notamment de la FNSEA, majoritaire dans les chambres d'agriculture. Signe de cette défiance, plusieurs antennes de l'OFB ont été visées par des dégradations et des dépôts de fumier ces dernières semaines…

Pour répondre à ces critiques, le Premier ministre avait annoncé le 26 janvier que les agents interviendraient désormais sous la tutelle des préfets et qu'un travail serait mené pour redéfinir avant le Salon de l'agriculture leurs modalités d’intervention dans les exploitations. Le désarmement des agents figurait aussi dans le catalogue de revendications adressées par la FNSEA et Jeunes Agriculteurs au Premier ministre le 24 janvier.

Une "IGPN" interne à l'OFB

Or un communiqué du SNE (Syndicat national de l'environnement) invite aussi à la circonspection. "À aucun moment le désarmement n'est évoqué dans la convention. Donc, l’armement n'est pas remis en cause", peut-on lire dans ce communiqué publié le 21 février, deux jours après que l'intersyndicale OFB a été reçue par le ministre. Le syndicat concède qu'un "port discret de l'arme" pourrait être envisagé dans certaines situations, de même que l'usage de caméras piétons. Même son de cloche chez FO pour qui le désarmement des inspecteurs est "une ligne rouge", le ministre aurait d'ailleurs confirmé lors de cette réunion qu’"il n’a jamais été question de revenir sur l’armement". Il aurait en outre suggéré la création d'une sorte d'IGPN interne à l'OFB…

Les syndicats font valoir que l'OFB ne contrôle pas que les agriculteurs et que ses agents sont parfois confrontés à des situations dangereuses. Il estiment par ailleurs que la tutelle des préfets est un "effet d'annonce" puisque pour les missions de police administrative c'est déjà le cas et que s'agissant des missions de police judiciaire, ils dépendent du procureur en vertu de la séparation des pouvoirs, comme est venu le rappeler une circulaire du 2 janvier.

Chambres d'agriculture France se montre toutefois conciliante. Les chambres et les agents de l'OFB "partagent le même objectif de préservation et de valorisation des ressources naturelles, de réduction de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques et de lutte contre le changement climatique". Mais "cette crise a montré qu’il existait à la fois une certaine méconnaissance de ce qu’est l’OFB et de ses modes d’interventions mais aussi la nécessité pour les agents de l’OFB de mieux appréhender la complexité de la situation des agriculteurs qui doivent répondre à des injonctions parfois contradictoires".