Aménagement numérique - Conférence du plan Très Haut débit : les réseaux publics amorcent leur décollage
Article initialement publié le 20 juillet 2015
La Mission Très Haut Débit présentait ce 16 juillet à Bercy son bilan annuel en présence d'Emmanuel Macron, ministre de l'Economie et des Finances, et d'Axelle Lemaire, secrétaire d'Etat au Numérique. Cette conférence annuelle du plan Très Haut Débit a donné l'occasion aux deux membres du gouvernement de confirmer le cap ambitieux et de tirer les premiers fruits de l'impulsion donnée au plus grand chantier national en termes d'investissement et de création d'emplois. On avait le sentiment de découvrir un secteur où les trains "à grande vitesse" arrivent à l'heure et parviennent même à prendre de l'avance… y compris sur la zone publique en pleine effervescence.
Un climat plus favorable grâce aux améliorations législatives
"L'heure n'est pas à la consolidation mais bien à l'investissement dans tout le pays", a lancé Emmanuel Macron. La mobilisation resterait donc de mise sur ce dossier malgré les bons résultats enregistrés. La France disposerait en effet d'un taux de couverture très haut débit représentant déjà 44,3% de son territoire. Des chiffres il est vrai gonflés par le VDSL 2 – une technologie cuivre dont les performances dépassent les 30 Mbps – alors que la fibre optique jusqu'à l'abonné ne dessert encore que 11,3% de la totalité des locaux. "Bien mais doit mieux faire", c'est du moins implicitement la vision du ministre qui n'a pas ménagé sa peine au cours de ces derniers mois. Les chantiers législatifs ont sans doute contribué à l'amélioration du climat actuel. La loi Macron, récemment adoptée, a étendu les obligations de préraccordement à l'ensemble des logements neufs, confirmé l'Arcep dans son rôle de régulateur des tarifs applicables aux réseaux d'intitiative publique (RIP) pour limiter la concurrence et éviter une spirale déflationniste et a institué un statut de zone fibrée déclencheur de nouvelles mesures de transition pour les territoires les plus avancés. Côté Mission, le cahier des charges 2015 du FSN confirme l'accélération du raccordement des entreprises et des sites publics prioritaires ainsi que les aides accordées aux sites publics et aux entreprises.
Orange annonce une enveloppe de 600 millions pour les RIP
Restaient les interrogations sur la réalité des engagements des opérateurs - notamment dans les zones privées intermédiaires, au vu des récents regroupements industriels - et sur leur présence en zone publique. Côté Orange, le ton et la posture semblent évoluer au rythme des annonces qui se veulent rassurantes voire même offensives. L'opérateur a récemment confirmé l'arrivée de Cyril Luneau, ancien patron de SFR collectivités, au poste de directeur des relations avec les collectivités, en remplacement de Bruno Janet. La semaine dernière, Stéphane Richard, PDG d'Orange, signait l'accélération du déploiement du RIP en Auvergne et annonçait le fibrage intégral des villes de Brest, Caen, Lille, Lyon, Metz, Montpellier, Rennes, Nice et Paris, d'ici 2016. Enfin, lors de son intervention à la tribune de cette conférence du 16 juillet, afin de donner de la crédibilité à sa volonté de se rapprocher des collectivités comme "partenaire disponible et loyal des réseaux d'initiative publique", il a annoncé la sanctuarisation d'une enveloppe de 600 millions d'euros d'investissement sur les réseaux publics, tout en reconnaissant "qu'il ne pourra pas être partout". Même tonalité de la part de Eric Denoyer, directeur général de Numéricable-SFR, qui confirme également la volonté du nouveau groupe de renforcer sa présence sur les RIP en annonçant dans la foulée son intention de tester et de déployer prochainement "des solutions de fibre rurale qui conviendraient aux zones les moins denses", sur plusieurs territoires pilotes.
Déploiement en vitesse de croisière dès la fin 2016
Pour compléter le panorama, lors d'un point presse organisé avant la conférence, Antoine Darodes, fraîchement nommé directeur de l'Agence du numérique, a confirmé le décollage de la zone publique. Après avoir longtemps stagné, le nombre de prises déployées par les RIP devrait passer la barre des 500.000 d'ici la fin de l'année. Et au rythme de croissance actuel, le déploiement pourrait atteindre sa vitesse de croisière dès la fin 2016 avec un million de prises annuelles. Mais il a aussi rappelé que 14 départements manquaient encore à l'appel. La nouvelle agence sera mobilisée pour les accompagner dans la procédure de dépôt de dossier au FSN. Il n'a pas caché "le défi à relever". Le ministre souhaite en effet un bouclage complet d'ici la fin de l'année.
L'Avicca appelle à une normalisation du volet financier
Le nouveau président de l'Avicca, Patrick Chaize, seul invité à s'exprimer au nom des collectivités territoriales, s'est montré le plus vigilant. Il a rappelé les dossiers encore ouverts, avec la DGCL, "pour permettre aux collectivités porteuses de RIP de pouvoir recruter au bon niveau", avec la DGFIP, pour amortir les réseaux dans des conditions normales et économiques, comptabiliser les IRU (location longue durée de fibres) pour récupérer la TVA sur la montée en débit ou, demain, sur les investissements en zone blanche mobile, sans oublier la "continuité territoriale" pour les territoires d'Outre-Mer et la couverture des communes dont les opérateurs n'assurent pas la complétude. Il a néanmoins conclu sur une note positive : "Je suis optimiste, comme vous, comme tous les élus qui se sont lancés dans ce chantier complexe et passionnant. Cela ne peut que 'marcher'. Aucune des difficultés mentionnées n'est insoluble, et les enjeux sont tels que nous y parviendrons, dans les meilleures conditions possibles, j'en suis convaincu."