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Institutions - Comment financer les associations ?

Dans les prochains mois, la question du financement des associations devrait connaître de nouveaux rebondissements. Deux rapports rendus cet été plantent le décor : le débat devrait être tendu.

Le président de la République l'affirmait, à l'occasion de la présentation du plan en faveur des banlieues : "Avec les associations, je veux également engager un nouveau partenariat pour les aider à se professionnaliser dans la durée plutôt que de vivre toujours dans la fragilité." Nicolas Sarkozy a assuré qu'une conférence nationale de la vie associative aura lieu en novembre prochain. Déjà, la question essentielle du financement des associations refait surface à l'occasion d'un rapport remis au début de l'été à la ministre de la Santé, de la Jeunesse, des Sports et de la Vie associative. Rédigé par un inspecteur général de l'administration honoraire, Jean-Louis Langlais, et rendu public début août, ce document propose ni plus ni moins de "passer d'une culture de la subvention à celle de la commande publique". 

 

Le "trou noir"

Les ressources des associations proviennent à 51% de financements publics, dont 14% en provenance des communes, 12% de l'Etat, 10% des départements, 4% des régions, 10% d'autres organismes publics, 1% de l'Europe. Les financements publics ont continué à augmenter à un rythme annuel moyen de 1,6%, soit proche de celui du PNB sur la période, mais la part de l'Etat a décru de 5% en volume cependant que s'accroît d'autant celle des collectivités locales.
Au-delà de ces données générales, le financement des associations, explique l'inspecteur général, représente un véritable "trou noir", une zone de non-connaissance. Au nombre des dysfonctionnements, le rapport liste les financements multiples et propose de réserver le financement des projets locaux aux collectivités territoriales (sauf lorsqu'ils s'intègrent dans une politique nationale). "La mise en concurrence doit être préférée chaque fois que les circonstances s'y prêtent, d'une part parce qu'elle oblige l'administration à mieux formuler ses besoins, d'autre part parce qu'elle engage l'association dans une démarche de résultat", est-il indiqué. La proposition tombe comme un véritable coup de tonnerre dans le paysage administratif. Mais sur la forme, le rapport se contente de préciser que ce changement sera possible "chaque fois que la prestation attendue en retour peut être définie avec un minimum de précision".

 

Subvention ou marché public ?

Le bureau de la conférence permanente des coordinations associatives (CPCA) se prononcera début septembre sur le rapport, mais on peut aisément penser que sa principale proposition ne plaira pas aux représentants du monde associatif, dont la stratégie consiste au contraire depuis plusieurs années à ancrer davantage encore le recours à la subvention dans les pratiques des administrations. Dans une étude consacrée au financement des associations publiée en juillet, le mouvement réaffirme qu'il faut "retenir - à chaque fois que la situation le permet - la subvention de préférence à la délégation de service public ou au marché public". La CPCA veut "éviter la mise en concurrence systématique du secteur associatif et rappeler le caractère d'intérêt général du financement public de ses projets". Selon elle, il en va de la capacité de l'association à définir ses projets. Elle demande donc l'adoption d'une loi dans laquelle sera définie la notion de subvention d'intérêt général.
Favorable à la généralisation de la contractualisation dans l'optique de la sécurisation du financement des associations, la CPCA verra-t-elle d'un bon oeil la proposition du rapport Langlais d'étendre l'obligation de passer une convention avec les pouvoirs publics aux associations bénéficiaires de subventions inférieures à un montant de 23.000 euros ? Pour la CPCA, cela pourrait bien être insuffisant. L'étude publiée en juillet révèle en effet que seules 41% des associations bénéficient de financements dans le cadre d'une convention pluriannuelle. La plate-forme associative demande donc une véritable volonté politique se traduisant par une circulaire du Premier ministre et une véritable animation interministérielle du dispositif.
Dans l'attente de la conférence nationale de la vie associative, le débat autour du financement des associations se poursuivra avec le rapport de la mission parlementaire sur la gouvernance et le financement des associations que son président, le député Pierre Morange, doit remettre le 3 octobre. Ce nouveau rapport jettera-t-il encore de l'huile sur le feu ? Pour l'heure, la CPCA se veut optimiste en se félicitant que des parlementaires se saisissent de la question des associations.

 

T.B. / Projets publics


 

D'inévitables contentieux ?

Depuis la loi du 12 avril 2000, lorsqu'une subvention dépasse un seuil de 23.000 euros, une convention doit être signée avec la personne publique définissant l'objet, le montant et les conditions d'utilisation de la subvention attribuée. "Cette obligation a été dictée au départ par un juste souci de transparence", estime Anne-Cécile Vivien, avocat au barreau de Lyon, qui regrette cependant qu'elle "engendre désormais des risques non-négligeables de requalification des conventions de subvention en marchés publics, voire en délégation de service public si l'objet de la subvention n'est pas clairement défini". Car les frontières entre les différents modes d'intervention de la puissance publique ne sont pas toujours nettes. Dans son rapport, Jean-François Langlais affirme que "la justice aura à arbitrer ces conflits et il n'est pas impossible que l'on assiste à une montée du contentieux" avant de conclure que "de nouveaux équilibres vont s'établir".
Début 2007, le ministère de l'Economie et des Finances et le ministère de l'Intérieur ont publié un guide destiné à clarifier les notions de subvention et de marchés publics. La CPCA juge l'initiative intéressante, mais estime qu'il faut rendre l'ouvrage plus accessible par un accompagnement des acteurs et par des formations.