Congrès de l'USH - Cécile Duflot : "J'accepte votre proposition de pacte entre l'Etat et le mouvement HLM"
"Réfléchir ensemble", "définir des modalités ensemble", "avoir des réponses ensemble", "relever un défi ensemble"... sept fois Cécile Duflot a utilisé le mot durant son discours de clôture du 73e congrès de l'USH, soit une fois de plus que celui de "confiance". La conclusion n'a donc surpris personne : "J'accepte votre proposition de pacte entre l'Etat et le mouvement HLM", a-t-elle déclaré. "Ce qui nous rassemble, au-delà de notre métier, c'est notre mission d'intérêt général, une de celle qui font grandir celles et ceux qui y participent", a-t-elle poursuivi, avant d'achever par : "Permettez-moi alors de ne pas être seulement votre ministre, mais aussi d'être tout simplement l'une des vôtres". Applaudissements !
"Le rêve est à la portée de la France"
Auparavant, Marie-Noëlle Lienemann avait quant à elle terminé ses propos en se référant à Martin Luther King. "Je fais un rêve", avait lancé la présidente de l'USH, "celui que la cinquième puissance économique du monde, la terre de la Déclaration des droits de l'homme, soit capable de garantir à tous un vrai logement décent. Le rêve est à la portée de la France. Il dépend de nous, il dépend de vous. Nous l'avons chevillé au corps. Alors, ensemble, réussissons." Applaudissements !
"Un discours émouvant", a commenté la ministre du Logement qui n'est pourtant pas une rêveuse. "Je vous appelle à établir un partenariat durable et solide, où les discours se traduisent dans les actes, où le changement n'est pas seulement un mot mais un état d'esprit, une feuille de route et une ligne de conduite", a-t-elle prévenu avant d'ajouter : "ma confiance sera exigeante".
Cécile Duflot a dressé les trois composantes de la feuille de route commune (services aux locataires ; entretien et rénovation, notamment thermique ; développement "massif" de l'offre de logement), ponctuant son discours d'éléments de constats, d'orientations politiques et de quelques annonces.
Gestion des attributions : une question "essentielle" ?
Elle a tout particulièrement insisté sur la mission "sociale" du mouvement HLM en direction de ses locataires, invitant à anticiper ("ensemble", bien entendu) la prévention des expulsions ou encore le vieillissement des habitants. Mais sa "question essentielle" du moment porte sur l'amélioration de la gestion des attributions. La ministre a annoncé la réunion d'une table-ronde "dans les semaines qui viennent" sur le sujet. Marie-Noëlle Lienemann a répondu que le mouvement HLM serait présent et qu'il y défendra l'idée que, en fin de chaîne, "l'organisme qui va gérer dans la durée doit garder sa part de souveraineté". Mais la présidente de l'USH juge manifestement que cette question est loin d'être aussi "essentielle" : "Nous ne résoudrons pas la crise du logement avec le scoring, ou tout autre moyen de notation et de priorisation : l'accroissement de l'offre (d'une offre abordable) est indispensable", estime-t-elle.
Expérimentation de 10.000 "logements sociaux accompagnés"
Cécile Duflot a rappelé sa volonté de mettre en place un "super-PLAI", qui serait financé par le fonds national recueillant les pénalités acquittées par les communes ne respectant pas la loi SRU. Le dispositif pourrait concerner des "logements sociaux accompagnés" tournés vers les personnes en grande difficulté, que l'USH propose d'expérimenter. "Pour bon nombre de gens, il ne suffit pas de trouver un logement, il faut assurer un suivi social, un cadre de vie permettant une bonne insertion", est convaincue Marie-Noëlle Lienemann, citant "beaucoup de gens en situation lourde" : relevant du Dalo, en errance, alcooliques, sortant de CHRS (centre d'hébergement et de réinsertion sociale) ou d'hôpital psychiatrique, "et aussi, parfois, certains de nos locataires qui partent à la dérive". Le mouvement HLM propose de créer une "filière d'habitat accompagné et adapté" avec des personnels spécialisés au sein des organismes HLM, en partenariat avec des associations locales quand elles existent, qui proposent un suivi dans la longue durée. La phase d'expérimentation pourrait porter sur 10.000 logements de type maisons-relais, hôtels familiaux... à quoi s'ajouteraient des suivis en logements diffus (pour les locataires actuels du parc repérés pour leur grande difficulté sociale). Une idée "intéressante, a jugé Cécile Duflot.
Au chapitre de l'entretien et de la rénovation des parcs, la ministre a appelé à "aller encore plus loin" dans la rénovation énergétique et annoncé, à cette fin, l'amélioration du dispositif d'éco-prêt logement social. Sur la question des normes, "j'ai entendu, je sais les difficultés que vous rencontrez, en particulier pour traiter les bâtiments amiantés : les conditions des prêts seront revues pour tenir compte de cette réalité", s'est-elle engagée.
"Tout ne sera pas possible"
Concernant la participation de l'Etat au financement des 120.000 logements HLM supplémentaires par an, "tout ne sera pas possible", a admis Cécile Duflot, rappelant "l'effort budgétaire qui attend notre pays". Quant au milliard qui manquerait au monde HLM et aux pistes de l'USH pour les trouver (voir notre article de l'édition du 27 septembre), la ministre renvoie le calcul d'un revers de main. Selon elle, entre le travail de mutualisation que doivent engager les organismes HLM, le financement doublé d'Action Logement ("plus de 950 millions d'euros d'équivalents subventions (…) : le double par rapport à 2012 !"), "l'amélioration" des aides à la pierre nationale et l'appui renforcé des collectivités locales : "les marges pour atteindre l'objectif de 150.000 sont là", a-t-elle déclaré aux journalistes. Et d'insister sur "l'effort financier exceptionnel" à fournir du côté HLM, qui "ne pourra être possible qu'à la condition que soient mutualisés les moyens financiers dont disposent les organismes". Mais là où les équipes techniques de l'USH anticipent une valorisation à 100 millions d'euros par an, Cécile Duflot garde les yeux rivés sur le montant de 245 millions d'euros qu'auraient rapporté à l'Etat le prélèvement qu'elle a supprimé pour 2013...
Rendez-vous à Lille…
"Il n'y a pas d'amour sans preuves d'amour", avait dit Thierry Repentin, président de l'USH lors du congrès de Toulouse en 2009, au nouveau ministre du Logement Benoist Apparu. Un an après, à Strasbourg, le divorce entre l'Etat et le monde HLM était entamé et le ministre du Logement hué. Il est vrai que les affinités politiques des deux parties étaient moins fortes. Mais "je serais plus exigeant avec mes amis qu'à l'égard de ceux qui ont animé la politique du logement depuis dix ans", confiait, en salle de presse, Alain Cacheux. Aujourd'hui président de la Fédération des offices publics de l'habitat, cet élu du Nord pourrait bien être le prochain président de l'USH (élection le 28 novembre prochain) : celui qui interpellera la ministre en clôture du 74e congrès HLM, l'année prochaine, à Lille.