Fonction publique territoriale - Cadres supérieurs : des carrières améliorées grâce au protocole PPCR ?
Six décrets parus les 15 et 16 avril permettent l'application à plusieurs cadres d'emplois de catégorie A du protocole d'accord sur les parcours professionnels, les carrières et les rémunérations (PPCR) mis en œuvre pour les 5,4 millions d'agents publics. Deux décrets concernent spécifiquement les administrateurs et les ingénieurs en chef territoriaux. Les premiers parlent d'"avancées", tandis que les seconds considèrent que la réforme "n'est pas à la hauteur" des enjeux actuels.
L'Association des administrateurs territoriaux de France (AATF) a accueilli avec satisfaction les décrets concernant leur cadre d'emplois parus au Journal officiel le jour de Pâques et qui viennent compléter une profonde réforme entrée en vigueur le 1er septembre 2013 (voir ci-dessous notre article du 28 août 2013). Les dispositions "reprennent un grand nombre des propositions portées par l'AATF depuis douze mois, permettant des avancées importantes pour les administrateurs territoriaux, dans une logique de parité statutaire avec le corps des administrateurs civils", s'est réjouie l'association, jointe par Localtis.
Un texte de nature statutaire met en place, au profit des quelque 2.500 administrateurs territoriaux, un cadencement unique d'avancement d'échelon aligné sur celui des administrateurs civils. Par ailleurs, il permet "des avancées" spécifiques à divers stades de la carrière. Ainsi, les lauréats de l'examen professionnel et des concours externe et interne d'administrateur territorial bénéficieront de la récupération de leur ancienneté et de leur rémunération pour le reclassement dans le cadre d'emplois. En outre, les administrateurs territoriaux situés au premier grade voient s'élargir le champ des mobilités statutaires permettant le passage au grade supérieur (hors classe).
Des assouplissements
Quant aux administrateurs hors classe, ils pourront accéder plus facilement à l'échelon spécial. En effet, jusque-là contingenté, celui-ci est transformé en un échelon accessible sur le seul fondement du critère de l'ancienneté. A noter aussi, pour l'accès au troisième grade d'administrateur (général), une voie nouvelle est créée: elle est fonction de la valeur professionnelle de l'agent, par inscription au tableau d'avancement des administrateurs au dernier échelon du grade hors classe. Par ailleurs, l'accès fonctionnel au grade d'administrateur général est rendu plus facile : l'exigence d'une période de référence de 15 ans est supprimée et le nombre d'année requis en emploi fonctionnel est réduit de deux ans (pour plus de précisions sur ces changements, voir ci-dessous l'analyse de l'AATF).
Un deuxième décret relatif à la carrière des administrateurs territoriaux, de nature indiciaire, prévoit la création au 1er janvier 2020 d'un dixième échelon au sommet du grade d'administrateur territorial.
Ces deux décrets comportent aussi des dispositions s'appliquant aux ingénieurs en chef territoriaux. Le décret statutaire pose le principe d’un avancement sur la base des anciennes durées minimum. De plus, il assouplit les conditions d'accès au grade d'ingénieur général et prévoit une nouvelle voie d'accès à ce grade en fonction de la valeur professionnelle. Quant au décret indiciaire, il instaure au 1er janvier 2020 un onzième échelon au sommet du grade d’ingénieur en chef territorial.
"Une dégradation notable de la carrière des ingénieurs"
Dans un communiqué du 24 février dernier, le président de l'association des ingénieurs territoriaux de France (AITF), Patrick Berger, a reconnu l'existence d'"avancées". Mais il a considéré qu'elles sont "relativement modestes". Portant un regard d'ensemble sur la réforme de la carrière des ingénieurs et des ingénieurs en chef (lesquels relèvent de cadres d'emplois distincts depuis le 1er mars 2016), le président de l'AITF a conclu à une "dégradation notable des grades d'ingénieur et ingénieur principal", qui rendra "encore plus difficile le recrutement de jeunes ingénieurs".
Outre les dispositions ayant un impact sur les cadres d'emplois des administrateurs et des ingénieurs en chef, le décret d'ordre statutaire prévoit un dispositif transitoire de nomination des emplois fonctionnels dans les établissements publics de coopération intercommunale issus de fusions dans le cadre des schémas départementaux de coopération intercommunale.
Deux décrets appliquant la réforme sur les parcours professionnels, les carrières et les rémunérations à plusieurs autres cadres d'emplois de catégorie A de la fonction publique territoriale sont également parus le 15 avril. Ils concernent les cadres d'emplois des conservateurs du patrimoine, des conservateurs des bibliothèques, des médecins, des biologistes, des vétérinaires et des pharmaciens.
Le décret de nature statutaire instaure, à compter du 1er janvier 2017, une durée unique d'échelon pour ces agents territoriaux. L'autre décret fixe les échelonnements indiciaires des cadres d'emplois pour tenir compte de la transformation de primes en points au 1er janvier 2017 et au 1er janvier 2018.
Le 15 avril étaient parus deux décrets poursuivant les mêmes objectifs pour le cadre d'emplois des psychologues territoriaux.
Médecins territoriaux: "Encore un effort !"
Pour les médecins territoriaux, l'application du protocole PPCR se limite à la mise en œuvre d'une durée unique d'échelon et l'attribution de quelques points d'indice supplémentaires à chaque échelon. "Si la revalorisation va dans le bons sens, elle n'est pas une révolution", commente Faouzia Perrin, présidente de Méditoriales, association nationale des médecins territoriaux. Elle aurait souhaité que les décrets alignent les grilles indiciaires des médecins de la fonction publique territoriale sur celles des médecins inspecteurs de la santé publique, c'est-à-dire leurs homologues de l'Etat. "Un premier pas" dans cette direction avait été effectué avec des décrets du 18 août 2014 (voir ci-dessous notre article du 2 septembre 2014), constate Faouzia Perrin, qui appelle donc à ne pas s'arrêter là. En plus de continuer à améliorer les grilles indiciaires des médecins territoriaux, il faudrait, dit-elle, préciser dans les textes leurs missions et renforcer leur formation. Enfin, elle considère que la loi Santé du 26 janvier 2016 et la réforme territoriale ont constitué deux occasions manquées pour renforcer la médecine territoriale.
Références :
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décret n° 2017-556 du 14 avril 2017 portant modification des dispositions statutaires applicables aux administrateurs territoriaux, aux ingénieurs en chef territoriaux et aux emplois administratifs et techniques de direction des collectivités territoriales
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décret n° 2017-558 du 14 avril 2017 modifiant les dispositions indiciaires applicables aux administrateurs territoriaux, aux ingénieurs en chef territoriaux et aux emplois administratifs et techniques de direction des collectivités territoriales.
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décret n° 2017-555 du 14 avril 2017 modifiant les décrets portant statut particulier des cadres d'emplois des conservateurs du patrimoine, des conservateurs des bibliothèques, des médecins et des biologistes, vétérinaires et pharmaciens de la fonction publique territoriale.
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décret n° 2017-557 du 14 avril 2017 modifiant les décrets portant échelonnement indiciaire applicable aux conservateurs du patrimoine, aux conservateurs des bibliothèques, aux médecins et aux biologistes, aux vétérinaires et aux pharmaciens de la fonction publique territoriale.
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décret n° 2017-545 du 13 avril 2017 modifiant le décret n° 92-853 du 28 août 1992 portant statut particulier du cadre d'emplois des psychologues territoriaux.
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décret n° 2017-546 du 13 avril 2017 modifiant le décret n° 92-854 du 28 août 1992 portant échelonnement indiciaire applicable aux psychologues territoriaux.