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Sécurité - Brice Hortefeux : "Il n'est pas envisagé de réformer le régime juridique de la vidéoprotection"

Le nombre de plaintes déposées à la Cnil concernant des installations de vidéosurveillance aurait progressé de 43% en 2008, avance le député du Nord, Patrick Roy (PS), dans une question posée au ministre de l'Intérieur, de l'Outre-mer et les Collectivités territoriales. "La Cnil a reçu 121 plaintes relatives à la vidéosurveillance en 2007 ; en 2008, ce chiffre s'établit à 173", précise ainsi le député qui s'inquiète de l'envolée du nombre de plaintes, au moment où le gouvernement souhaite tripler, d'ici à deux ans, le nombre de caméras de vidéosurveillance présentes dans les lieux publics. Mais selon le ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux, sur 10.853 autorisations délivrées par les préfets en 2008, il n'y a eu que 29 plaintes et deux recours contentieux... Ce débat sur les plaintes illustre la complexité du régime de contrôle de la vidéosurveillance : il relève soit de la Cnil, pour les dispositifs installés dans des lieux non-publics, où les images sont enregistrées ou conservées, soit d'une autorisation préfectorale, pour les dispositifs installés dans des lieux publics sans qu'aucune image ne soit enregistrée. Pour sortir de cette complexité, le député insiste sur la nécessité d'un "contrôle des surveillants" confié à "un organisme véritablement indépendant". Une question déjà évoquée dans un rapport de décembre 2008 ("La vidéosurveillance : pour un nouvel encadrement juridique"), dans lequel les sénateurs Charles Gautier (PS)  et Jean-Patrick Courtois (UMP) avaient demandé que soit mis fin à cette double compétence (Cnil et préfets) et plaidé  la cause de la Cnil. Mais ce n'est pas la voie prise par le gouvernement. Le ministre de l'Intérieur indique qu'il n'est "pas envisagé de réformer le régime juridique de la vidéoprotection" issu de la loi Pasqua du 21 janvier 1995 "ni de modifier les compétences dévolues à la Cnil". Selon lui, le faible nombre de recours illustre "le bon fonctionnement des commissions départementales de vidéoprotection". Brice Hortefeux ajoute que le projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (dit "Loppsi 2"), présenté en Conseil des ministres en mai dernier, contient de nouvelles garanties : les compétences de la Commission nationale de la vidéosurveillance créée par un décret du 15 mai 2007 pour conseiller le ministre sont élargies à "une mission générale de contrôle du développement de la vidéoprotection". "Sa composition est revue, ses possibilités élargies et son indépendance accrue", précise le ministre. 

Le nouveau secrétaire national du PS chargé de la sécurité, Jean-Jacques Urvoas (qui remplace Julien Dray) est lui aussi monté au créneau il y a quelques jours pour dénoncer le manque de contrôle et le manque de preuve sur l'efficacité de la vidéosurveillance, en l'absence d'étude approfondie. Pour autant, un rapport "confidentiel", daté de juillet 2009, révélé par Le Figaro le 21 août 2009, devrait donner du grain à moudre aux défenseurs de la vidéo. Ce rapport, qui a été réalisé par l'Inspection générale de l'administration (IGA), l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) et l'Inspection technique de la gendarmerie nationale (ITGN), porte sur les 63 brigades de gendarmerie couvrant un territoire équipé de plus de dix caméras et sur le tiers des 146 circonscriptions de police dotées de moyens de vidéoprotection. S'étendant sur les années 2000-2008, le rapport affirme ainsi que les agressions contre les personnes ont été moindres dans les villes équipées de vidéoprotection. Ainsi, depuis 2000, ces actes ont augmenté de plus de 40%, indique le quotidien, mais deux fois moins vite dans la cinquantaine de villes vidéoprotégées. Autre constat du rapport : "l'effet plumeau, c'est-à-dire un déplacement de la délinquance vers les zones non-couvertes, ne semble pas avéré". Jusqu'à présent, aucune étude ne permettait vraiment de trancher sur l'efficacité des caméras de surveillance.

E.Z. et M.T.