Environnement - Assises de la qualité de l'air : Etat et collectivités prêts à redonner du souffle à l'action
La deuxième édition des Assises nationales de la qualité de l'air a été l'occasion, pour le ministère de l'Ecologie qui les organisait, de revenir sur le bilan de la qualité de l'air 2012 publié à la rentrée. Et de rappeler, en termes de pollution atmosphérique, que la valeur limite journalière en particules PM10 a été dépassée l'an dernier dans "au moins une station de mesure", et ce dans 16 agglomérations de plus de 100.000 habitants. Dans le cadre d'un plan d'urgence de la qualité de l'air lancé l'an dernier, une trentaine de mesures ont été actées sur un plan interministériel. Et le programme national de réduction des émissions polluantes mis en place il y a dix ans va être revu pour la fin 2014. Quant au dispositif de gestion des épisodes de pollution, il devrait aussi être renforcé, en laissant normalement la possibilité aux préfets de déclencher la procédure "sur prévision, afin d'anticiper l'épisode de pollution". En outre, dans le cadre des débats sur la loi de finances pour 2014, deux nouveautés sont en préparation. Le gouvernement espère en effet élargir l'application de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) à sept nouvelles substances dont le plomb, le cuivre et le cadmium. Mais aussi agir sur le levier des flottes automobiles d'entreprises, en prenant en compte dans le calcul de la taxe sur les véhicules de société d'autres polluants atmosphériques que le seul CO2.
Deuxième vague des PPA
Les premiers plans de protection de l'atmosphère (PPA) auront bientôt dix ans. Une deuxième vague de réalisation est donc en cours. Parmi la trentaine de plans en cours de révision, celui de Grenoble. "Il y a un besoin d'outils mais aussi de moyens car les actions de ce nouveau plan ne sont pas ou peu financées", prévient Jean-Philippe Deneuvy, directeur régional adjoint de la Dreal Rhône-Alpes. "Même si elle a échoué, nous avons tiré profit de notre tentative de mettre en place une zone d'actions prioritaires pour l'air (Zapa) et gardons l'idée d'accompagner les propriétaires de vieux véhicules diesel dans un basculement vers les transports collectifs ou l'achat d'un véhicule récent. La préparation de cette action se fait avec l'Ademe", raconte Hélène Poimboeuf, responsable du service Environnement et Climat de Grenoble-Alpes-Métropole. "Les études et les idées, on les a, il reste à les traduire en actions concrètes", poursuit Julien Assoun, à la Driee Ile-de-France. Sur la boucle formée autour de Paris par l'A86, l'objectif est de réduire de 10% les émissions d'ici 2020. Une action isolée, par exemple abaisser la vitesse sur le périphérique, ne suffirait pas à atteindre cet objectif. "Ce n'est qu'en la combinant à d'autres qu'on peut y parvenir", ajoute-il. L'autre manière de tirer profit de la dynamique enclenchée avec les Zapa consiste, pour l'Ademe, à lancer des appels à projets. Dotés d'une enveloppe dédiée d'environ 800.000 euros, ces appels à projets AACT-AIR visent les collectivités et les aident à passer à l'action. Ils sont aussi ouverts aux organismes de recherche qui veulent expérimentent des solutions avec les collectivités. Les lauréats viennent d'être révélés. Parmi eux, on trouve des régions comme la Haute-Normandie (pour son projet d'intégrer dans son plan climat énergie un volet "qualité de l'air"), une communauté d'agglomération comme Plaine Commune (Seine-Saint-Denis, pour son "plan marche") ou une communauté urbaine comme Toulouse Métropole (qui veut mieux étudier les rapports entre transports, qualité de l'air et aménagement urbain).
Air intérieur
L'an prochain, ces appels à projets AACT-AIR devraient intégrer la pollution de l'air intérieur. Une problématique qui était au cœur de ces Assises. L'air intérieur, on le sait, est pollué de façon spécifique et parfois plus fortement que l'air extérieur. Pas moins de trois ministères concernés (Ecologie, Santé, Logement) ont donc fait connaître lors des Assises quel plan d'actions mener en vue de l'améliorer. "Des actions à court, moyen et long termes sont prévues afin d'améliorer la qualité de l'air dans les espaces clos", ont-ils indiqué dans un communiqué. Exemples : une campagne d'information sera lancée et un outil web d'auto-diagnostic permettant au grand public d'évaluer la qualité de l'air dans son logement. L'étiquetage de certains produits, dont les meubles pour enfants, va être passé en revue. Le volet air intérieur sera aussi mieux mis en avant dans le cadre du plan de rénovation énergétique de l'habitat. Des formations destinées aux professionnels de santé vont être lancées. Et une méthodologie de surveillance va être bâtie pour surveiller des lieux aussi spécifiques que les métros souterrains.
Combustion de la biomasse
L'enjeu de la biomasse a fait l'objet d'un éclairage particulier à travers l'exemple savoyard de la Vallée de l'Arve. De Chamonix à La Roche-sur-Foron, en passant par Cluses ou Saint-Gervais, c'est l'un des onze sites français les plus pollués aux particules fines (PM10). Parmi les causes pointées, le chauffage au bois des particuliers. "Ce diagnostic fut un premier coup de massue. Apprendre que le chauffage pollue autant que les transports, c'était nouveau. C'est dire s'il a fallu du courage aux élus pour aller expliquer cela aux habitants, dans ce territoire où de génération en génération on se chauffe au bois", raconte Martial Saddier, député de la Haute Savoie. Bannir les feux d'artifice, nocifs également pour l'atmosphère, ne fut pas non plus évident. "Pour le brûlage des déchets verts à l'air libre, c'est moins compliqué, cela fait toujours quelques voisins heureux de ne plus avoir les odeurs ", ajoute-il. Pour le président du conseil national de l'air, la meilleure voie consiste à "expliquer, encore expliquer, toujours expliquer", en prenant soin de pas "pointer du doigt les gens et leur comportement". Pour passer à l'action, dans son PPA adopté en 2012, le syndicat mixte d'aménagement de l'Arve et ses abords (SM3A) a mis en place un fonds expérimental air-bois pour aider ceux qui possèdent un appareil ancien (d'avant 2002) ou à foyer ouvert à le remplacer pour un modèle plus performant. L'aide atteint 1.000 euros. Le fonds sera abondé pendant quatre ans par 400.000 euros par an de l'Ademe et autant des collectivités (cinq communautés de communes, le département et la région Rhône-Alpes). Environ 3.200 appareils pourraient être remplacés sur les quelque 19.000 recensés, réduisant ainsi les émissions d'un quart.