PLF 2014 - Ecologie : un budget vert pâle
"C'est un budget qui permet de maintenir un haut niveau d'intervention. L'amélioration des infrastructures du quotidien des Français, la préservation des milieux et la biodiversité, la transition énergétique, la protection des personnes et des biens dans les transports, en mer ou à l'égard des risques naturels et technologiques, figureront parmi nos priorités pour 2014", a commenté le ministre de l'Ecologie, Philippe Martin, dans un communiqué. Les moyens consolidés du ministère et des établissements publics qui lui sont rattachés s'élèvent à 17 milliards d'euros dont 7,2 milliards d'euros au titre de la mission "Ecologie, développement et mobilité durables" (contre 7,7 milliards d'euros en 2013 à périmètre comparable), soit -6,5%. Mais "2,3 milliards d'euros de crédits d'investissements d'avenir seront directement consacrés à la transition écologique", a souligné le ministère de l'Economie lors de la présentation du projet de loi de finances (PLF) pour 2014 le 25 septembre.
Les moyens financiers consacrés à la biodiversité sont "maintenus", a assuré Bercy. Ceux en faveur de la sûreté nucléaire et de la prévention des risques naturels et technologiques vont être "stabilisés ou renforcés" : "le budget 2014 garantit un haut niveau de prévention des risques technologiques et naturels en assurant la montée en charge des plans de prévention des risques technologiques et en étendant le périmètre des interventions du Fonds de prévention des risques naturels majeurs" (FPRNM), a commenté le ministère. Ainsi, selon le PLF, le délai prévu pour la prise en charge par ce fonds des travaux, ouvrages ou équipements de protection contre les risques littoraux pourra être prolongé jusqu'au 31 décembre 2015. Pour faciliter l'élaboration des plans de prévention des risques naturels prévisibles et accroître leur qualité, la part financée par le FPRNM sera majorée de 10%, portant ainsi sa participation à 100% de la dépense. Enfin le fonds pourra financer des études et travaux de prévention contre les risques naturels majeurs et de protection des lieux habités exposés à des risques naturels qui ont été engagés par l'État avant le 1er janvier 2014.
La capacité d'engagement de l'Ademe, qualifiée d'"opérateur privilégié de la transition écologique" sera "préservée", selon le ministère de l'Economie. Elle s'élèvera comme en 2013 à 590 millions d'euros mais elle bénéficiera du programme d'investissements d'avenir (PIA) à hauteur de 1,1 milliard d'euros pour soutenir, par exemple, les projets des entreprises du génie écologique, de la sobriété énergétique ou encore du recyclage. Au titre de la "participation à l'effort partagé de maîtrise des dépenses publiques", Bercy indique que le plafond des taxes affectées aux opérateurs du ministère de l'Ecologie diminue de 72 millions d'euros (Voies navigables de France-VNF, Ademe, Autorité de régulation des activités ferroviaires-Araf, Office national de la chasse et de la faune sauvage-ONCFS, Établissement public de sécurité ferroviaire). Et le ministère confirme un prélèvement de 210 millions d'euros sur le "fonds de roulement" des agences de l'eau. "L'impact de cette mesure sur le niveau global des interventions des agences sera limité, compte tenu de la phase actuelle de montée en charge du dixième programme d'investissements (2013-2018)", assure-t-il.
Diminution de la subvention de l'Etat à l'Afitf
Dans le domaine des transports, le système de bonus-malus automobile va, lui, être réformé, ce qui devrait générer 230 millions d'euros d'économie. La subvention de l'Etat à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf) sera réduite et devrait être en partie compensée par le lancement de l'éco-taxe poids lourds au 1er janvier 2014 et la hausse de la redevance domaniale versée par les sociétés d'autoroute. "Comme en 2013 et conformément à la priorité donnée à l'entretien des infrastructures existantes, les crédits d'entretien routier et les concours à Réseau ferré de France pour l'entretien du réseau ferré seront préservés", promet Bercy. Mais les professionnels s'inquiètent déjà de la baisse de la subvention à l'Afitf. "Ce désengagement de l'Etat apparaît comme un renoncement pour les entreprises de Travaux Publics après la remise du 'rapport Mobilité 21' et les arbitrages rendus en juillet dernier par le premier ministre, Jean-Marc Ayrault, où seule la construction de la LGV Bordeaux-Toulouse devrait être maintenue avant 2030, a réagi la Fédération nationale des travaux publics (FNTP) dans un communiqué. Rappelons qu'il avait alors été dit que ce scénario dit 'favorable' serait financé par un budget constant de l'Afitf."
Au titre de "la participation à la stabilisation des emplois publics", le ministère de l'Ecologie va perdre 522 emplois (équivalent temps plein). En 2013, 614 emplois avaient déjà été supprimés. En outre, les opérateurs de l'Etat (VNF, Météo-France, Ademe, - ONCFS, Autorité de régulation des activités ferroviaires-Araf, etc.) dépendant de ce ministère verront leurs effectifs baisser globalement de 390 équivalents temps plein.
Les ménages touchés par une nouvelle taxe sur le gaz
Au chapitre de la fiscalité, le "verdissement" attendu est encore timide. La principale disposition en la matière est l'instauration dès l'an prochain d'une contribution climat énergie (CCE), une taxe carbone revue et corrigée qui consiste à augmenter progressivement les taxes intérieures sur la consommation (TIC) des produits énergétiques polluants (carburants, gaz, fioul, charbon) en fonction de leurs émissions de CO2. Cette "assiette carbone" intégrée aux TIC sera fixée à 7 euros la tonne, puis atteindra 14,5 euros en 2015 et 22 en 2016. En tout, la mesure doit rapporter 340 millions d'euros l'an prochain, avant une montée en puissance à 2,5 milliards en 2015 et 4 milliards en 2016.
Mais, comme le gouvernement s'y était engagé, la TIC sur les carburants et sur le fioul domestique sera globalement maintenue au même niveau l'an prochain, et elle n'augmentera que sur le fioul lourd, le gaz naturel et le charbon. Les ménages abonnés au gaz, jusqu'ici exemptés de la TIC sur le gaz naturel (TICGN) vont devoir s'en acquitter en 2014. Cela devrait représenter un surcoût de 14 à 28 euros l'an prochain pour un foyer chauffé au gaz et de 44 à 89 euros en 2016. Pour les carburants, la CCE devrait représenter, selon des calculs de l'AFP, une augmentation d'environ 2 centimes par litre pour le gazole et 1,7 centime pour l'essence en 2015 puis en 2016. Parallèlement, la défiscalisation des biocarburants, dont le bilan environnemental est critiqué, sera progressivement supprimée d'ici au 1er janvier 2016. Outre le durcissement du bonus-malus automobile déjà mentionné, le PLF prévoit encore d'étendre à sept nouvelles substances (plomb, zinc, chrome, cuivre, nickel, cadmium et vanadium), la TGAP dite "air", qui frappe les entreprises rejetant dans l'atmosphère certaines substances nocives. Les taux retenus iront de 5 à 500 euros par kilogramme rejeté. Mais la mesure ne rapportera que 4 millions d'euros l'an prochain.
Enfin, le gouvernement a confirmé le prolongement jusqu'en 2015 et le "recentrage" du crédit d'impôt développement durable (CIDD), qui aide les ménages à réaliser certains travaux de rénovation thermique. Pour simplifier le dispositif, les taux d'aides passeront de dix à deux : 15% s'il s'agit d'actions isolées ou 25% si elles s'inscrivent dans un bouquet de travaux. Mais certaines dépenses seront désormais exclues du dispositif (panneaux photovoltaïques, appareils de régulation du chauffage et équipements de récupération et traitement des eaux de pluie), ainsi que celles réalisées par les propriétaires bailleurs. L'éco-prêt à taux zéro sera lui aussi prolongé jusqu'à fin 2015, avec un périmètre légèrement modifié : les travaux éligibles devront être réalisés par une entreprise qualifiée et, pour les copropriétés, leur durée sera portée de deux à trois ans.
Anne Lenormand
L'Atesat bientôt supprimée
Le PLF pour 2014 prévoit la suppression au 1er janvier prochain de l'obligation d'assistance technique pour des raisons de solidarité et d'aménagement du territoire (Atesat) assurée au bénéfice des communes et des groupements de communes éligibles par les services de l'État, moyennant une rémunération fixée selon un barème national. Pour rappel, l'Atesat est, depuis 2001, due aux communes ou groupements de communes qui le demandent, dès lors qu'ils satisfont à une double condition de population et de potentiel fiscal. Des conventions conclues entre l'État et les collectivités bénéficiaires déterminent les modalités d'intervention de l'Atesat (voirie, ouvrages d'art, aménagement, urbanisme et habitat). Le dispositif de l'Atesat qui ne représente plus que 5 millions d'euros facturés en moyenne chaque année par l'État a "toutefois cessé progressivement d'être en adéquation avec la réalité de l'organisation locale, notamment au regard de l'achèvement de la constitution des intercommunalités et de la montée en puissance des départements dans ce domaine, qui sera facilitée par le projet de loi de mobilisation des régions pour la croissance et l'emploi et de promotion de l'égalité des territoires", souligne l'exposé des motifs. "Il est prévu d'engager à partir de 2014 un repositionnement stratégique des agents de l'État dans les territoires et, par voie de conséquence, de mettre un terme d'ici fin 2015 à des missions dont l'exercice par les services de l'État n'apparaît plus justifiée, poursuit-il. Cette évolution permettra de favoriser l'émergence de réels projets de territoire grâce à l'apport d'expertise des services territoriaux du ministère de l'Egalité des territoires et du Logement, qui pourront également faire appel au Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema)." Le dispositif envisagé a donc pour objectif de mettre un terme aux missions actuelles d'Atesat et d'amener les collectivités bénéficiaires à développer des "solutions alternatives pour la réalisation des prestations dont elles bénéficiaient, après une période transitoire pouvant aller jusqu'au 31 décembre 2015.
A.L.