Handicap - Après avoir visité des MDPH, 50 députés dénoncent un système "à bout de souffle"
En novembre dernier, le Premier ministre confiait à Adrien Taquet, député (LREM) des Hauts-de-Seine et très impliqué dans les questions de handicap, et à Jean-François Serres, conseiller au Conseil économique, social et environnemental (Cese) et ancien délégué général des Petits Frères des Pauvres, une mission sur la simplification du parcours administratif des personnes handicapées et de leurs proches. Les résultats en sont attendus pour la fin du mois. A l'occasion de cette mission, Aurélien Taquet et Jean-François Serres avaient eu une idée originale : inviter tous les députés à se rendre dans une maison départementale des personnes handicapées (MDPH), afin d'en découvrir le fonctionnement. Une cinquantaine de députés de tous bords (sauf le Front national et La France insoumise) ont répondu à l'appel.
Plus de quarante MDPH visitées
Les députés volontaires se sont donc rendus dans la MDPH de leur département entre le 3 et le 9 mars. Dans une interview au site spécialisé handicap.fr, Aurélien Taquet expliquait qu'"il nous semblait [...] intéressant, parce que nous n'avions pas la possibilité de faire un tour de France des MDPH, de mettre les députés à contribution pour avoir des retours concrets". Au passage, le député des Hauts-de-Seine ne cachait pas "que près de la moitié d'entre eux n'avaient jamais mis les pieds dans une MDPH...". L'objectif final de cette initiative originale, qui a permis de visiter 44 maisons départementales, était de "repérer les modes de fonctionnement et rassembler les observations, et surtout les bonnes pratiques, puis en faire une synthèse afin de nourrir la réflexion de notre mission qui sera rendue publique fin avril 2018".
Des situations "très hétérogènes"
Sans attendre cette échéance, Adrien Taquet a présenté, le 5 avril, le résultat de ces visites à Sophie Cluzel, la secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Selon les députés-visiteurs, le système des MDPH est aujourd'hui "à bout de souffle". Le dispositif doit donc être "revisité en profondeur pour redéfinir la mission première des MDPH, qui est l'accompagnement des personnes".
Les députés relèvent aussi des situations "très hétérogènes" d'un département à l'autre. Ces écarts se traduisent par des taux d'attribution différents d'un territoire à l'autre pour une même allocation, allant par exemple de 36% à 92% pour l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) ou de 20% à 78% pour la prestation de compensation du handicap (PCH).
Les députés estiment que, depuis la création de ces structures, leurs dotations globales "n'ont pas ou très peu évolué alors que le nombre de dossiers a augmenté". Conséquence : "elles font face à un manque de moyens humains et financiers", ce qui conduit les parlementaires à demander une "nouvelle organisation pour gagner en productivité". Enfin, les députés ont constaté que seule une MDPH sur deux respecte le délai de quatre mois prévu par la loi Handicap du 11 février 2005 pour l'instruction des demandes.
Pas d'évolutions, vraiment ?
Tous ces éléments sont déjà connus. Ils figurent en toutes lettres dans la synthèse des rapports d'activité des MDPH, publiée chaque année par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA, voir notre article ci-dessous du 3 avril 2018).
En revanche, les remarques sur l'absence d'évolution des moyens des MDPH paraissent plus surprenantes. Celles-ci ont en effet bénéficié, outre un renforcement des moyens et un soutien accru de la CNSA, d'un certain nombre d'avancées et de simplifications, à l'image de la réforme des cartes de stationnement et de transport ou de l'harmonisation - en cours - de leurs systèmes d'information. Mais il est vrai, comme le soulignent les députés, que ces dernières restent confrontées à des demandes qui continuent de croître chaque année, même si le rythme se ralentit (voir notre article ci-dessous du 30 novembre 2017).