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Fiscalité locale - Alléger les droits de mutation à titre onéreux : l'idée séduit des experts de la fiscalité

Dans un rapport sur la taxation du patrimoine des ménages, le Conseil des prélèvements obligatoires relance l'idée de réduire, voire supprimer sous certaines conditions, les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) dus lors des transactions immobilières. Le CPO se questionne par ailleurs sur la taxe foncière sur les propriétés bâties.

Pour lever les freins à la mobilité géographique, la "commission Attali" proposait en janvier 2008 de supprimer, jusqu'à un prix d'achat de 500.000 euros, les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) que les particuliers et les entreprises paient lors de l'acquisition d'un bien immobilier. L'idée avait ensuite resurgi en décembre 2016 dans une note de France stratégie, ou encore dans les premières versions du programme de François Fillon, lorsque celui-ci était candidat à l'élection présidentielle de 2017. On la trouve de nouveau dans un rapport que le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) a rendu public ce 26 janvier. Dans ce rapport relatif aux impositions sur le capital des ménages, l'objectif de l'organisme indépendant placé auprès de la Cour des comptes est identique à celui des précédents promoteurs de la proposition. Il s'agit d'"améliorer la fluidité du marché immobilier et la mobilité géographique des personnes."

Compensation pour les départements et les communes

Pour atteindre ce but, le CPO avance plusieurs options, "non exclusives l’une de l’autre" : l'introduction d'une réduction de la taxe pour l'achat de la résidence principale, ou la création de règles de progressivité fiscale en fonction du prix du bien. Une substitution progressive de la taxe foncière aux DMTO est aussi envisagée. Sans trancher entre ces trois scénarios, le CPO souligne que, quel que soit celui qui pourrait être retenu, il faudra garantir des ressources équivalentes aux départements et aux communes qui perçoivent le produit de la taxe. Or, cela exige de trouver plus de 13 milliards d'euros.
Selon le CPO, les DMTO "renchérissent le coût des transactions immobilières de près de 5,8% du prix de vente d’un bien immobilier". Soit une part substantielle des coûts de transaction totaux (DMTO, frais d'agence, rémunération des notaires, TVA, etc.) qui atteignent 14% du prix de vente. Ce taux est le plus élevé des pays de l'OCDE après la Belgique, souligne le CPO.
Première des taxes sur le patrimoine des ménages (avec plus de 20 milliards d'euros mis en 2015 à la charge des particuliers), la taxe foncière sur les propriétés bâties n'a pas connu d'adaptation de ses modalités lorsque les prix du marché de l'immobilier se sont envolés dans les années 2000, constate par ailleurs l'organisme. Dès lors, souligne-t-il, il existe un risque de "déconnexion" entre la valeur économique réelle des logements et leur valeur au sens fiscal, qui est calculée sur la base de valeurs locatives non revues depuis 40 ans et donc souvent obsolètes.

Réviser les valeurs locatives des logements

La solution passe, selon le conseil, par la mise en œuvre de la révision générale des valeurs locatives des locaux d'habitation, en l'accompagnant de mesures de lissage afin de faciliter sa mise en œuvre. "A plus long terme, écrit le CPO, une alternative à la révision des bases locatives, plus ambitieuse et plus durable, consisterait à recourir à la valeur vénale", c'est-à-dire le prix d'un bien au moment de sa vente. La piste n'est pas nouvelle. L'administration de Bercy l'avait étudiée en amont du lancement de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels : finalement elle l'avait abandonnée.
Les collectivités territoriales bénéficient de 37% des 80 milliards d'euros de recettes générées par les taxes calculées sur le capital des ménages (prélèvements sociaux, impôt sur le revenu, droits de mutation à titre gratuit et à titre onéreux, ainsi que sur les ventes d’immeubles et de certains biens meubles, taxes foncières sur le bâti et le non-bâti, impôt sur la fortune immobilière). Dans le détail, les deux impôts dont bénéficient les collectivités territoriales, à savoir les taxes foncières et les DMTO, représentent respectivement 24% et 13% de ce total.