Alimentation : Mouans-Sartoux veut ensemencer les municipales de 2026

En proposant depuis de nombreuses années 100% de repas bio dans ses cantines, tout en s'appuyant sur une ferme municipale, la commune de Mouans-Sartoux est très souvent citée en exemple. Forte de sa réussite, elle veut accompagner les futurs candidats aux municipales de 2026 dans une transition agricole et alimentaire. Au programme : webinaires et visites de terrain.

"Au moment où les prochaines équipes municipales préparent leur programme pour 2026, Mouans-Sartoux souhaite partager son expérience pour que le plus grand nombre de territoires se dotent d’une politique d’alimentation durable ambitieuse." Dans un communiqué, la commune des Alpes-Maritimes bien connue pour sa politique alimentaire propose ses services aux futurs candidats. Car cette ville de 10.000 habitants est considérée comme une pionnière en matière d’alimentation durable. Depuis 2012, elle propose des produits 100% bio dans ses cantines. Elle a été la première à cultiver ses propres légumes bio en régie municipale. Enfin presque. "On pensait être les premiers sans savoir qu’il y en avait eu une avant, dans la région de Toulouse : le domaine de Candie", explique Gilles Pérole, adjoint au maire délégué à l’alimentation de Mouans-Sartoux. Dans cette ferme toulousaine, on cultive des vignes, des légumineuses, des céréales, on y confectionne de la farine pour les boulangers locaux, qui fournissent ensuite du pain aux cantines… 

"Le centralisme d’État ne fera pas bouger la transition agricole et alimentaire"

Depuis, ces exemples ont essaimé. Et on compte une centaine de fermes municipales en France. D’ailleurs, Mouans-Sartoux vient d’être sélectionnée lors du dernier appel à projet des "projets alimentaires territoriaux" dévoilé lors du Salon de l'agriculture pour animer un réseau national de ces fermes municipales, à condition d'être en bio ou en conversion (voir notre article du 27 février). "Mouans-Sartoux ne peut plus être le seul vecteur. L’idée de ce réseau est de s’appuyer sur une cinquantaine de projets en France, d’éclairer et de documenter ce concept de fermes publiques qui reposent sur différents statuts : régies simples, régies autonomies, SPL, SEM, Scic. Le but est de partager avec le plus de territoires possible pour que la puissance publique joue son rôle, dans l’alimentation et la relance de l’agriculture", souligne cet élu passionné qui n’entend pas pour autant poser son bâton de pèlerin. "Le centralisme d’État ne fera pas bouger la transition agricole et alimentaire, c’est bien en s’appuyant sur les territoires et en reconnaissant une compétence agricole et alimentaire et qu’on nous dédie les moyens pour mettre en œuvre cette compétence qu’on fera bouger les choses", plaide Gilles Pérole.

En 2016, la commune a créé une maison d’éducation à l’alimentation durable (Mead). C’est elle qui, en partenariat avec l’Ademe et la fondation Daniel et Nina Carrasso, va conduire ce programme de sensibilisation aux enjeux de l’alimentation en vue du prochain mandat municipal. Ce programme d’essaimage, qui repose sur des webinaires gratuits, s’adresse aux élus, techniciens de collectivités ou futurs candidats. "Le contenu sera basé sur les actions de Mouans-Sartoux, les résultats de leurs impacts mais aussi les enseignements que nous tirons de collaborations avec d’autres territoires", précise la commune, dans son communiqué. Des visites de collectivités seront aussi proposées au prix de 35 euros, comprenant un repas "100% bio".

Contenir les prix en luttant contre le gaspillage

Les succès de Mouans-Sartoux ne se limitent pas au 100% bio. Car la commune parvient à contenir les prix, notamment en luttant contre le gaspillage. Contrairement à ce que l’on peut penser, "la difficulté de faire du 100% bio n’est pas du tout liée aux marchés publics, elle est liée au prix, le bio revenant entre de 20 à 40% plus cher", explique Gilles Pérole. "Mais c’est un frein qu’on peut lever très facilement en luttant contre le gaspillage. On a fait baisser de 80% le gaspillage, cela représente 20% d’économies sur le budget alimentaire." En outre, depuis 2022, les cantines proposent 50% de menus végétariens pour tous. "On mange moins de viande, mais de meilleure qualité et produite le plus près possible." Pour autant, Mouans-Sartoux milite auprès de l’Association des maires de France (AMF) pour faire modifier le code des marchés publics afin de promouvoir la production locale (car le bio peut venir de loin). "On a un vrai besoin de changer de changer les règles européennes, mais ce sera long", estime Gilles Pérole, faisant cependant remarquer que "l’Italie et le Danemark ont une traduction différente du règlement européen". "Pourquoi ce qui est possible chez eux ne le serait pas chez nous ?" 

Cette politique a aussi un effet notable sur les changements de pratiques de la population. Ce qui a pu être mesuré dans le cadre d’un partenariat avec l’université Nice Côte d’Azur. 71% des habitants disent ainsi avoir modifié leurs pratiques, 40% font principalement leurs courses dans les magasins bio ou en magasin de proximité. De plus, le taux de surpoids et d’obésité des enfants mangeant à la cantine de Mouans-Sartoux est inférieur de 45% à la moyenne nationale.

Pas une question de couleur politique

Pour Gilles Pérole, l’engagement des collectivités pour une alimentation durable n’est pas une question de couleur politique. Le réseau national des fermes publiques comporte "de nombreux élus de droite". Mais il y a parfois des contradictions entre l’action locale et les prises de positions nationales, comme lors du vote de la loi d’orientation agricole du 24 mars 2025, regrette-t-il. "Cette loi a été faite pour acheter la paix du Salon de l’agriculture", déplore l’élu (voir notre article du 20 février). Selon lui, "une loi visant réellement à assurer le renouvellement des générations futures aurait été obligée de prendre en compte les enjeux alimentaires, de santé publique (pesticides, maladies neurologiques…), les enjeux environnementaux ou climatiques, sachant que 25% des gaz à effet de serre proviennent de l’agriculture et de l’alimentation". "Penser que c’est l’écologie et l’agriculture biologique qui empêchent le juste revenu des agricultures c’est une méconnaissance du sujet. Le problème économique provient du partage de la richesse créée sur l’alimentation et l’agriculture et la juste rémunération des producteurs."

 

Téléchargements

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis