Poltique de la ville et emploi - Accès à l'emploi : c'est le niveau d'étude qui joue, pas le lieu de résidence
Les résultats d'une étude de 2010 publiée par la revue Economie et Statistiques de l'Insee tendent à démontrer que c'est davantage le niveau d'éducation que l'adresse du postulant qui détermine son accès à un emploi. "L'effort des services publics devrait porter avant tout sur l'égalité des chances dans l'accès à l'éducation et aux débouchés professionnels", affirment les auteurs de "Lieu de résidence et discrimination salariale : le cas des jeunes habitant dans une zone urbaine sensible". Des propos qui vont à l'encontre de ceux de la Halde (la Haute Autorité de lutte contre les discriminations) qui réclame, afin de garantir, justement, l'égalité des chances des jeunes des quartiers sensibles face à l'emploi, des CV anonymes.
Si l'objectif de l'étude est avant tout d'apporter des explications (l'influence sociale des parents, la structure des emplois des habitants du quartier, le sexe du postulant…) aux écarts de rémunérations entre jeunes des ZUS et les autres, les auteurs affirment également que la difficulté de ces jeunes à trouver un emploi qualifié et bien payé est avant tout liée à leur niveau d'études bien plus qu'à leur lieu de résidence. En effet, 26,7% des jeunes issus des ZUS n'ont aucun diplôme, contre 11,5% des jeunes non issus de ZUS et ils sont 12% dans le premier cas à avoir un bac+4, contre 28,5% dans le second cas, nous apprend l'étude. Des disparités de diplômes qui rendent difficile l'accès à des emplois qualifiés. Ainsi, 7,8% des jeunes issus des quartiers exercent un emploi de cadre, pour 20% des jeunes non issus des quartiers, ce qui conduit à des écarts de salaires significatifs. "Les jeunes de ZUS ont à la fin de leurs études des rémunérations de 13% inférieures aux autres jeunes qui ne vivent pas dans des ZUS", relève l'étude.
En testant, "toutes choses égales par ailleurs, l'existence d'un effet propre lié au fait de résider dans un quartier sensible", l'étude ne néglige certes à aucun moment la "possibilité d'une discrimination spécifiquement territoriale". Mais celle-ci serait davantage liée à "l'éloignement physique entre localisation résidentielle et localisation des principaux centres d'emplois" préjudiciable aux populations les plus éloignées physiquement des emplois, qu'au fait même d'habiter dans une zone sensible. Et les auteurs de revenir sur les disparités en termes de capital humain dû à un manque de formation initiale malgré les politiques mises en place dans les zones d'éducation prioritaire. Les taux de réussite aux études inférieurs à la moyenne couplés à un manque d'information sur l'orientation et les formations dans l'enseignement supérieur sont tout aussi préjudiciables à la recherche d'emploi des jeunes issus des quartiers.
L'étude précise ainsi que "si la quasi-totalité de l'écart de salaire entre jeunes des ZUS et non ZUS tient à des différences de caractéristiques individuelles et socioéconomique de leur voisinage, elle ne peut exclure l'hypothèse d'un effet lié à la discrimination ; en tout cas pour les emplois les plus qualifiés où les écarts de salaires sont importants".
"Des résultats en complet décalage avec le discours traditionnel sur la situation des quartiers sensibles (...) qui bousculent bien des analyses sur la stigmatisation des quartiers sensibles", relève Louis Maurin de l'Observatoires des inégalités.