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Fonction publique - Absentéisme des agents : une circulaire attendue dans les derniers jours du quinquennat

Outre des instructions sur le temps de travail, la ministre de la Fonction publique projette de publier prochainement une circulaire sur les absences pour raison de santé, en insistant à la fois sur les dimensions du contrôle et de la prévention pour limiter le phénomène. Mécontents, les représentants de quatre syndicats ont quitté prématurément ce 23 mars une réunion de concertation organisée par le ministère sur les deux projets de circulaire.

Alors que le quinquennat touche à sa fin, la ministre de la Fonction publique s'apprête à transmettre aux services de l'Etat une circulaire sur les absences pour raison de santé dans le secteur public, un thème qui a suscité de vifs débats ces dernières années. Alors que la droite reproche à la majorité en place d'avoir abrogé la journée de carence qu'elle avait instaurée à partir de 2012, la ministre entend sans doute montrer que le gouvernement n'est pas inactif sur ce sujet que les médias ont porté sur le devant le scène.
Le projet de circulaire sur lequel les organisations syndicales se sont exprimées, ce 23 mars, lors d'une réunion avec la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP) fait reposer la lutte contre l'absentéisme des agents sur deux piliers : la prévention et le contrôle. On retrouve là les deux principales orientations du plan que le gouvernement avait introduit en novembre par voie d'amendement au projet de loi de finances pour 2017, mais que le Conseil constitutionnel a censuré au motif qu'il constituait un cavalier (voir ci-dessous notre article du 5 janvier 2017).

Des absences liées à l'organisation du travail

Les caractéristiques des agents (leur âge, leur sexe, leur catégorie, ou encore leur secteur d'activité) peuvent expliquer les absences au travail pour raison de santé, souligne ce projet de circulaire que Localtis s'est procuré. L'organisation et les conditions de travail, ainsi que les pratiques managériales sont aussi des déterminants possibles des absences, souligne la ministre qui dit s'appuyer sur les résultats de certaines études. "La politique de prévention des absences doit [donc] s’appuyer sur les démarches d’amélioration des conditions de travail et de qualité de vie au travail", conclut Annick Girardin. Quel que soit leur niveau hiérarchique, les personnes qui ont la responsabilité d'une équipe d'agents sont des acteurs clés de ces démarches, poursuit-elle. Ils doivent, à ce titre, "être accompagné[s] pour améliorer [leurs] pratiques managériales du point de vue de leur impact sur les conditions de travail de [leurs] collaborateurs", écrit la ministre à l'attention des employeurs publics.

Contre-visite médicale

Ces derniers "sont invités à définir une politique de contrôle du bien-fondé des arrêts de travail au plus près des réalités du service". Ils peuvent, à cet effet, "ordonner une contre-visite médicale assurée par un médecin agréé", rappelle la ministre. Les contrôles doivent notamment permettre de s'assurer que l'agent placé en congé maladie "se consacre exclusivement au rétablissement de sa santé". L'agent public titulaire d'une autorisation de cumul d'activités ne doit ainsi pas exercer cette activité autorisée s'il est placé en congé maladie.
Une meilleure connaissance statistique des absences au travail favorisera la mise en place d'une politique de prévention et de contrôle des absences au travail pour raison de santé, indique encore la ministre. Elle annonce que les indicateurs de suivi de cette question figurant dans les bilans sociaux "seront harmonisés au sein de chacun des versants de la fonction publique" et permettront "une meilleure comparaison au sein de la fonction publique et entre la fonction publique et le secteur privé". Sur la base de tels indicateurs, les employeurs publics pourront "définir, en concertation avec les représentants du personnel, les axes prioritaires d’une politique de prévention des absences ainsi que son suivi et son évaluation", conclut la ministre.

"Ne pas stigmatiser les agents"

Ce projet de circulaire "est équilibré, parle des bons sujets et effectue des rappels utiles", estime Pascal Kessler, secrétaire général de la FAFPT. Plus critique, Mylène Jacquot, secrétaire générale de l'Uffa-CFDT souligne l'importance d'un dialogue de qualité entre les employeurs publics et les organisations syndicales sur "l'organisation et la vie au travail". "Ce n'est pas souvent fait", déplore-t-elle.
"Mettre l'accent sur la place de l'organisation du travail parmi les déterminants des absences et préconiser d'améliorer les conditions de travail et les pratiques managériales est positif", déclare pour sa part Natacha Pommet, représentante de la fédération CGT des services publics. "Ces dernières années, l'apparition dans la fonction publique de méthodes de management inspirées du secteur privé et l'intensification des rythmes de travail liée au non remplacement de certains départs dans un contexte de développement de nouvelles missions" ont favorisé l'augmentation des absences pour raisons de santé, explique-t-elle.
De concert avec les autres responsables syndicales, Natacha Pommet défend les agents publics : "ils ne s'absentent pas pour de mauvaises raisons et ne le font pas sans fournir les justificatifs nécessaires". Attention à "ne pas stigmatiser les agents", préviennent les représentants des personnels.

 

Quatre syndicats claquent la porte des discussions
Les représentants de quatre organisations syndicales (CGT, FA-FP, Force ouvrière, Solidaires) ont quitté la réunion bien avant son terme, afin de manifester leur mécontentement, a-t-on appris de sources syndicales concordantes. La réunion organisée ce 23 mars par la DGFAP avait pour ordre du jour le projet de circulaire relative au "renforcement de la politique de prévention des absences pour raison de santé" et un autre projet de circulaire sur "l'application des règles en matière de temps de travail" dans la fonction publique (voir ci-dessous notre article du 22 mars).
Avec ces deux initiatives "qui interviennent dans un contexte d'élections, le gouvernement envoie un mauvais message", a déclaré à Localtis Natacha Pommet (CGT). Qui a poursuivi : L'exécutif "présuppose que les fonctionnaires sont des feignants et participe ainsi au fonctionnaire bashing". On est très loin de la réalité, dit-elle : "La durée légale de 1607 heures de travail annuel est effective dans la fonction publique", insiste-t-elle. "Le projet de circulaire sur la prévention des absences pour raison de santé ne nous pose pas trop de problèmes. Ce n'est pas le cas de l'autre sur le temps de travail, déclare de son côté Pascal Kessler, pour la FA-FP. Qui précise : "Nous ne pouvons pas dissocier les deux sujets." Beaucoup de points seraient à amender, indique M. Kesser. Il regrette que les représentants de la ministre n'aient "pas accordé une vraie écoute" et n'aient "pas apporté de vraies réponses".