Zones Amii : Orange n'échappe pas à la sanction du régulateur
On aurait pu croire qu'Orange échapperait aux sanctions suite à l'accord sur la complétude FTTH annoncé mardi 7 novembre 2023. En fait la procédure en cours n'a pas été stoppée et le régulateur inflige à Orange une amende de 26 millions d'euros pour non-respect du premier volet de ses engagements Amii.
L'Arcep a annoncé le 8 novembre 2023 infliger une amende de 26 millions d’euros à Orange pour ne pas avoir respecté ses engagements Amii de 2018. L'annonce peut paraître paradoxale dans la mesure où le ministre délégué aux télécommunications, Jean-Noël Barrot, avait déclaré la veille (voir notre article du 7 novembre) avoir préféré un accord avec Orange plutôt qu'une sanction… Cette contradiction n'est qu'apparente car la sanction ne concerne que la première échéance Amii, comme l'a expliqué la présidente de l'Arcep, Laure de La Raudière, à la seconde journée du Trip de l'Avicca, à l'occasion d’un exercice de "pédagogie".
Une première échéance non respectée
La sanction vient en effet à la suite d'une procédure initiée en mars 2023 par l'autorité à la demande du gouvernement. Et elle ne porte que sur le premier volet des engagements Amii 2018 de l'opérateur. Orange avait en effet jusqu'au 31 décembre 2020 pour rendre raccordables 100% des logements et locaux professionnels tout en gardant une marge de 8% d'adresses "raccordables sur demande". Or fin 2020, le taux de raccordement dans les zones Amii d'Orange n'était que de 76% sur les quelque 3.000 communes concernées. À partir de ce constat et après une première mise en demeure en mars 2023, contestée en vain en mai par Orange, la formation restreinte de l’Arcep a décidé cet automne de prononcer à son encontre une amende de 26 millions d’euros. L'autorité note dans sa décision la "particulière gravité" du manquement qui "porte atteinte à l’intérêt et à l’aménagement numérique des territoires, et l’intérêt des utilisateurs finals dans leur accès aux réseaux".
Avis de l'Arcep sur l'accord
La seconde échéance concernait l'obligation de rendre effectivement raccordables la totalité des locaux au 31 décembre 2022. C'est ce second volet qui a été l'objet d'une négociation dont les tenants et les aboutissants ont été détaillés le 7 novembre. Elle évite à Orange une sanction qui, a priori, aurait été plus élevée. La présidente de l'autorité a cependant rappelé qu'il s'agissait d'une "proposition de nouveaux engagements d'Orange", devant être examinés par l'Arcep avant leur mis en œuvre. L'aval de l'autorité fait cependant peu de doutes, la présidente affirmant préférer "une reprise réelle des déploiements en zone Amii, notamment dans la perspective de fermeture du réseau cuivre". Cette reprise accélérée est également cohérente avec le critère "central" de complétude des déploiement FTTH comme préalable à l'arrêt du cuivre auquel elle a réaffirmé son attachement.
Calendrier hasardeux
Du côté de l'Avicca, son président, Patrick Chaize, estime que "si le calendrier peut paraître hasardeux, cette sanction démontre que l'autorité peut avoir de l'autorité", tout en se refusant à commenter le montant de l'amende. Le sénateur estime aussi qu'il s'agit d'un "signal" dans la perspective des nouveaux engagements opposables pris par Orange. Quant à ce dernier, il a annoncé contester la sanction devant le Conseil d'État et "regretter que l’Arcep fasse le choix d’une sanction financière totalement disproportionnée à l’encontre de l'opérateur qui investit le plus dans le déploiement de la fibre en France".
Alors que l’État et Orange ont signé le 7 novembre 2023 un accord pour accélérer la généralisation de la fibre d’ici à 2025, Intercommunalités de France, France urbaine et Les Interconnectés saluent dans un communiqué commun du 8 novembre 2023 "cette première série d'engagements très attendus par les collectivités" mais souhaitent aussi "attirer l’attention sur les nombreux retards accumulés dans le déploiement de la fibre sur l’ensemble du territoire, notamment en raison du manque de volontarisme de l’opérateur Orange, alors même qu’il s'agit d'un engagement présidentiel". Les élus du bloc local appellent entre autres à étendre à l'ensemble du territoire le dispositif "Cohésion numérique des territoires", qui permet de subventionner l'équipement et l'installation d'internet haut débit jusqu’à 600 euros par foyer, pour le moment seulement éligible aux zones d’initiatives publiques. Intercommunalités de France, France urbaine et Les Interconnectés font aussi part de leur inquiétude concernant la "problématique de la généralisation de la sous-traitance en cascade dans le déploiement de la fibre, à laquelle ont largement recours les opérateurs dont Orange". Les élus locaux appellent donc au respect du nouveau plan qualité du raccordement de la fibre pour améliorer le service rendu aux usagers. Ils expriment enfin "le besoin urgent de disposer d'un calendrier et d'un plan clairs pour s'assurer de la finalisation du raccordement des foyers et locaux professionnels, notamment en zone moyennement et très denses". V.F. / Localtis |