Vieillissement et perte d’autonomie des personnes sans domicile : des pistes pour un accompagnement digne

Dans une étude rendue publique cette semaine, l’Uniopss appelle à "dépasser les frontières entre le secteur du grand âge et celui de l’hébergement/logement" pour permettre aux personnes en situation de grande précarité de vieillir et d’être accompagnées dans la dignité. 

 

Pour le secteur de l’hébergement social, le vieillissement des personnes accueillies est un phénomène nouveau qui pose des difficultés particulières. Avec le soutien de la Délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement (Dihal), l’Union nationale interfédérale des oeuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux (Uniopss) a consacré une étude à ces personnes vieillissantes qui vivent en centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) ou en logement accompagné.  

"Entre 15 et 20% des personnes qui sont en hébergement d'urgence ou CHRS ont plus de 60 ans", soit "entre 30.000 et 40.000 personnes qui restent confinées dans des structures dont ce n'est pas le but de les accueillir", a expliqué Gilles Desrumaux, président du groupe prévention-hébergement-logement de l’Uniopss, lors de la présentation de l’étude le 9 avril. Il s’agit de personnes qui ont commencé leur vie active "dans les années 1975-1980, c’est-à-dire au moment du développement d’un chômage de masse" et qui se retrouvent aujourd’hui à la retraite "en ayant cumulé dans leur parcours l’expérience de l’isolement et de la solitude, de la précarité des revenus, de l’exclusion du logement", selon l’étude. Du fait de ces parcours cabossés, le vieillissement et la perte d’autonomie sont souvent plus précoces. "En Ile-de-France, 9% des personnes accueillies dans les structures AHI (accueil, hébergement, insertion) sont en perte d’autonomie", repère ainsi l’Uniopss.  

Or, "les structures qui assurent la prise en charge de personnes en situation de précarité ne sont pas toujours adaptées pour accompagner la perte d’autonomie dignement", constate l’Union. Les difficultés ont trait au bâti, qui peut s’avérer inadapté, mais surtout à l’incapacité des équipes à "réaliser un accompagnement d’une autre nature" - portage de repas, soins, aide à la vie quotidienne. D’une part, ce n’est pas leur métier et ces équipes ne sont pas formées à cela, d’autre part elles manquent de temps pour répondre à ces besoins. 

Des freins financiers, administratifs et liés au critère de l’âge 

L’enjeu, pour l’Uniopss, consiste donc à "dépasser les frontières entre le secteur du grand âge et celui de l’hébergement/logement" pour permettre aux personnes précaires de vieillir dans un environnement plus favorable. L’étude s’attache ainsi à mettre en lumière de bonnes pratiques permettant de mieux accompagner ces personnes et notamment de les orienter vers des lieux de vie adaptés – Ehpad si le niveau de dépendance le justifie, résidence autonomie ou encore habitat inclusif. L’Uniopss recommande en particulier le développement des petites unités de vie, "une alternative intéressante à l’Ehpad pour les personnes issues de la rue" - du fait de leur taille plus réduite et d’un niveau (au moins apparent) de médicalisation qui serait moins dissuasif.  

Les principaux freins à lever sont financiers (quel département est redevable de l’aide sociale à l’hébergement quand il y a eu un parcours d’errance ?), administratifs (en particulier quand la personne est en situation irrégulière) ou encore liés au critère de l’âge (des dérogations au fait d’avoir 60 ans pour entrer en Ehpad, en résidence autonomie ou pour bénéficier de services de soins à domicile étant parfois obtenues, mais pas dans tous les départements). 

L’Uniopss formule plusieurs préconisations en faveur d’une approche plus "sociale" dans le secteur du grand âge (par exemple : en lien avec les départements, "mettre en place une permanence d’assistant social dans les Ehpad") et d’une approche plus médico-sociale dans le secteur AHI (via la formation). Le réseau appelle surtout les acteurs de ces secteurs à nouer des partenariats entre eux : centres communaux d’action sociale, CHRS, pensions de famille, porteurs de projet d’habitat inclusif, Ehpad, et plus largement entre le service public départemental de l’autonomie (SPDA) et les acteurs de l’hébergement et du logement accompagné. Puisqu’il s’agit principalement de coopération, l’Uniopss estime que "toutes ces préconisations sont réalisables, y compris dans le contexte budgétaire contraint que nous connaissons". 

 

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