Veolia condamné en appel pour une réduction du débit d'eau dans un logement
Veolia, via la Société avignonnaise des eaux (SAE), a une nouvelle fois été condamné pour avoir réduit le débit de la fourniture d'eau dans un logement, la justice ayant encore estimé que cette pratique était illégale. La société en charge de la distribution d'eau potable avait réduit en mars 2016 le débit d'eau dans le logement d'une cliente à la suite d'un impayé partiel de sa facture et la cour d'appel de Nîmes (Gard) a condamné la SAE à verser la somme de 2.000 euros à la cliente concernée, selon l'arrêt daté du 9 février mis en ligne par la fondation France Libertés, qui défend le droit à l'accès à l'eau pour tous.
La cour a confirmé l'argumentaire qui avait prévalu en première instance, selon lequel, depuis une loi de 2013, "les distributeurs d'eau ne peuvent interrompre la fourniture d'eau dans une résidence principale", et que la dérogation accordée pour les fournisseurs d'électricité qui peuvent réduire la puissance fournie "n'est aucunement prévu(e) pour la distribution d'eau dont la réduction n'est pas autorisée", est-il indiqué dans l'arrêt.
La réduction du débit s'opère en installant une "lentille" sur la canalisation d'eau, un dispositif qui limite le diamètre du branchement des abonnés concernés. Sollicité par l'AFP, Veolia a dit prendre acte de la décision mais n'a pas souhaité faire de commentaire.
La réduction de débit assimilée à une coupure d'eau
Il s'agit de la deuxième condamnation en un an pour ce même motif contre Veolia, tandis que son concurrent Saur a également été condamné en janvier 2016 dans une affaire similaire. La justice avait notamment estimé qu'une réduction de débit entraine les mêmes conséquences qu'une coupure, en privant les habitants d'un usage normal à l'eau, élément indispensable pour qu'un logement soit qualifié de décent.
Veolia avait également déposé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), estimant que l'interdiction de toute réduction de débit porte une atteinte excessive à la liberté contractuelle et à la liberté d'entreprendre. Mais la cour d'appel a rejeté cette QPC, estimant qu'elle ne respectait pas les conditions méritant une transmission à la Cour de cassation. En 2015, saisi par Saur d'une QPC, le Conseil constitutionnel avait déjà validé l'interdiction généralisée des coupures d'eau dans les résidences principales, même en cas de non-paiement du service.
Cette nouvelle condamnation montre que "Veolia n'a pas du tout la volonté de respecter la loi", a réagi Emmanuel Poilane, directeur de la fondation France Libertés, auprès de à l'AFP. "Ce que nous attendons maintenant c'est que le groupe se saisisse de ces questions et qu'ils s'intéressent un peu à leurs clients", a-t-il ajouté.
Hasard du calendrier, l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes survient alors que la commission de l'aménagement du territoire du Sénat va examiner ce 15 février la proposition de loi sur le droit d'accès à l'eau potable que l'Assemblée nationale a adopté en première lecture le 14 juin 2016. Ce texte instaure "le droit, pour chaque personne physique, dans des conditions compatibles avec ses ressources, de disposer chaque jour d'une quantité suffisante d'eau potable pour répondre à ses besoins élémentaires". Il oblige aussi les collectivités compétentes en la matière à prendre les mesures nécessaires pour satisfaire les besoins des personnes non raccordées au réseau d'eau potable et prévoit également l'instauration d'une allocation forfaitaire d'eau pour les personnes en situation de précarité raccordées au réseau.