Vents favorables pour Haropa Port

Pour l’année de sa naissance, Haropa Port – issu de la fusion le 1er juin dernier des ports du Havre, de Rouen et de Paris – obtient des "résultats prometteurs", tant en matière de trafic que d’implantations industrielles et logistiques, où la dynamique est jugée "forte". Les défis restent entiers, parmi lesquels ceux de la transition énergétique… et du foncier.

"Pour la première fois de leur histoire, les ports de l’axe Seine dépassent le cap symbolique des 3 millions d’EVP (équivalent vingt pieds, mesure d’un petit conteneur standard)". À l’heure de la présentation à la presse des premiers résultats d’Haropa Port, le "grand port fluvio-maritime de l’axe Seine" né le 1er juin dernier (voir notre article du 21 mai 2021), la satisfaction était de mise le 28 janvier dernier. L’ensemble des trafics ou presque sont à la hausse par rapport à l’an passé – sans retrouver encore tout à fait le niveau d’avant-crise. Le trafic maritime croît de 12%, "le plus fort taux du rang nord", et le trafic fluvial progresse de 4% en Île-de-France. "Haropa Port confirme ainsi sa position de premier port de France et consolide sa place parmi les ports nord-européens", se réjouit Daniel Havis, président du conseil de surveillance.

À l’affût de toute opportunité foncière

Stéphane Raison, directeur général, président du directoire d’Haropa Port, s’enorgueillit également de la confiance des investisseurs, "privés, industriels et logistiques, des armements et des manutentionnaires" : "un signe qui ne trompe pas". En 2021, ces investissements privés "ont progressé de plus de 50 millions d’euros", pour atteindre 350 millions d’euros, "et seront portés à 550 millions d’euros en 2022". Haropa Port va lancer de nouveaux appels à projets cette année – au Havre, à Rouen, Gennevilliers, Bonneuil-sur-Marne… – pour des terrains qui font déjà l’objet "de nombreuses demandes". L’activité domaniale étant "un pilier d’importance croissante de son modèle économique", Haropa Port entend singulièrement développer des "clusters économiques capables de fournir des emplois, une activité portuaire et maritime et, par là même, une attractivité économique [aux] territoires". Et ce en privilégiant notamment les secteurs liés à la capture de carbone, à la filière hydrogène (un projet est en cours à Port Jérôme) et l’éolien (avec la construction de l’usine d’éoliennes en mer Siemens Gamesa Renewable Energy au Havre). Stéphane Raison relève ici l’importance des sites industriels "clés en mains", qui facilite l’accès au foncier et allège les procédures (voir notre article du 23 septembre 2019). À ce jour, Haropa compte deux sites de ce type : l’un au Havre, l’autre à Saint-Romain-de-Colbosc.

"Nous sommes à l’affût de toutes les opportunités foncières", avoue Stéphane Raison. Il déplore toutefois que "les disponibilités soient très faibles, notamment à Paris et à Rouen". Haropa Port lorgne – entre autres – sur la centrale thermique du Havre, arrêtée en mars dernier : "Mais le délai de déconstruction annoncé est de dix ans". Nul doute que ce défi foncier ne manquera pas d’aller croissant avec la mise en œuvre du "zéro artificialisation nette", à moins que l’industrie ne voie sa demande d’un régime dérogatoire satisfaite (voir notre article du 14 janvier dernier).

Transformation inéluctable du modèle économique

Haropa Port multiplie lui aussi les investissements. Après une année 2021 "exceptionnelle avec un montant de 197 millions d’euros", le budget pour 2022 prévoit 256 millions d’euros. Le port doit, il est vrai, relever "plusieurs défis majeurs : pérenniser son fort niveau d’activité, continuer à évoluer vers un nouveau modèle économique durable, accompagner la transition énergétique". Stéphane Raison mesure ici "l’ampleur de la tâche", alors que "le modèle économique des ports est historiquement basé sur les recettes liées aux énergies fossiles". En 2022, 16% des investissements devraient être alloués à l’accompagnement de la transition énergétique, contre 11,8% l’an passé. Au programme, électrification des quais, déploiement du réseau de bornes électriques sur l’axe Seine (Haropa, VNF, GrDF et la Banque des Territoires se sont notamment alliés l’an passé pour développer les carburants alternatifs dans la vallée de la Seine), sans compter le projet de création du premier hub d’export de CO2, conduit par le consortium composé de TotalEnergies, Yara, Exxon, Borealis et Air Liquide France Industrie. Plusieurs projets visent par ailleurs à développer capacité et multimodalité des installations, dont la plateforme multimodale sur la plaine d’Achères, le terminal Radicatel de Rouen ou l’extension de Port 2000 au Havre. Pour ce dernier, Stéphane Raison précise que le projet de chatière (création d’un accès fluvial direct) est "en attente de l’autorisation environnementale". Interrogé sur la lenteur de l’opération, il revendique "une nécessaire prudence avant de partir à l’enquête publique".

Gouvernance opérationnelle

Autre motif de satisfaction, six mois après la naissance d’Haropa Port, "sa gouvernance est finalisée". Les conseils de développement territoriaux du Havre, de Rouen (le 13 octobre) et de Paris (le 19 octobre) ont élu leurs présidents et le conseil d’orientation de l’axe Seine a été installé le 6 janvier dernier. Si Daniel Havis estime qu’il n’était pas possible "de représenter tout le monde dans les instances de gouvernance, qui doivent rester dans des tailles permettant de travailler", il relève qu’il "n’est pas interdit de travailler ensemble au-delà de l’institutionnel". Il met par ailleurs en avant le "travail très étroit" conduit "avec les régions, notamment normande", qui sont au conseil de surveillance, mais aussi avec le "Grand Paris, très focalisé".

Les trois ports ont en outre arrêté leur première stratégie tarifaire harmonisée des redevances domaniales et des droits de port, effective depuis le 1er janvier dernier. Enfin, Haropa Port a élaboré son premier projet de plan stratégique commun pour 2020-2025, dont une partie est actuellement soumise à consultation publique jusqu’au 11 février inclus.

 

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