Comité interministériel de la mer : la nouvelle stratégie nationale portuaire enfin adoptée
Le Premier ministre a présidé le 22 janvier le Comité interministériel de la mer, au Havre, siège du futur établissement public Haropa dont la création est désormais actée. Au menu également, adoption de la nouvelle stratégie nationale portuaire, adaptation de la stratégie pour les grands fonds marins et développement de l'éolien en mer.
C'est au Havre que s'est tenu le désormais annuel (ou presque) Comité interministériel de la mer (Cimer), ce 22 janvier. Ville symbolique, puisqu'au-delà d'être celle de l'ancien Premier ministre Édouard Philippe, elle est aussi celle du siège d'une grande usine de construction de pales d'éoliennes qui "alimentera les principaux parcs français", a indiqué Jean Castex, et sera bientôt celle d'Haropa, établissement public fruit de la fusion des trois ports de l'axe Seine : Le Havre, Rouen et Paris. Décidée lors du Cimer de 2018, cette fusion est désormais actée : l'établissement prendra officiellement corps le 1er juin prochain. Il sera doté d'un conseil de surveillance – au sein duquel siégeront les régions Normandie et Île-de-France ainsi que les métropoles de Rouen, du Havre et de Paris –, que le gouvernement souhaiterait voir dirigé par Daniel Havis, président d'honneur de la Matmut. Un conseil d'orientation de l'axe Seine et un conseil de développement territorial dans chaque place portuaire seront également créés. L'établissement devrait par ailleurs être "doté d'une trajectoire d'investissement de 1,45 milliard d'euros sur 2020-2027", sans que l'on en connaisse le détail.
Enfin, la stratégie nationale portuaire
Autre point d'orgue de ce Cimer, l'adoption de la stratégie nationale portuaire "visant à rendre nos ports encore plus attractifs", qui se faisait désirer. Décidée lors du Cimer de 2017, annoncée "dans les six mois" lors du Cimer de 2018 – le Premier ministre Édouard Philippe déplorant alors qu'"il n’existe pas en France, alors même que nous sommes un des plus grands pays maritimes de l’Union européenne, de stratégie portuaire", passant par pertes et profits celle de 2013 pour les grands ports maritimes métropolitains –, cette stratégie avait seulement fait l'objet d'un "point d'étape" lors du Cimer de 2019. Le 25 novembre dernier, la commission de l'aménagement du territoire du Sénat appelait ainsi le gouvernement "à présenter sans plus attendre sa stratégie nationale portuaire, annoncée depuis 2017…", à l'occasion de l'examen d'une proposition de loi sénatoriale, adoptée depuis en première lecture, visant notamment à introduire une telle stratégie quinquennale dans le code des transports. Il faudra toutefois encore patienter pour en connaître le détail, le Premier ministre indiquant seulement qu'elle avait pour objectif "le renforcement des chaînes logistiques et des transitions écologique et numérique". Une chose est sûre : elle ne se traduira pas à court terme par la création de zones franches, réclamée par de nombreux élus, notamment pour faire face aux prochains ports francs britanniques (voir notre article du 13 janvier 2021), le gouvernement ayant seulement décidé à ce stade de lancer "une réflexion sur les mesures fiscales permettant de dynamiser l'attractivité des zones industrialo-portuaires".
Mieux "valoriser" les grands fonds marins et les énergies renouvelables
Une autre stratégie, adoptée lors du Cimer de 2015, a, elle, été adaptée : celle relative à l'exploration et à l'exploitation minières des grands fonds marins. Le gouvernement entend ici renforcer l'exploration, et donc la connaissance, de ces grands fonds, afin d'amplifier leur protection – "alors que la mer montre des signes d'essoufflement", a alerté Jean Castex –, tout en en valorisant les ressources "en lien avec le potentiel industriel français et européen". Une "approche globale et partenariale" avec les collectivités d'outre-mer est annoncée, sans que l'on en connaisse, là encore, les modalités.
Le gouvernement poursuit par ailleurs le développement de l'éolien en mer, récemment facilité par la controversée loi d'accélération et de simplification de l'action publique (Asap). Jean Castex a officiellement annoncé la prochaine saisine de la Commission nationale du débat public d'un nouveau projet de parc éolien au large d'Oléron, portant sur une zone de 300 km2.
Des simplifications administrative seront par ailleurs appliquées pour les piscicultures d'une capacité de production comprise entre 20 et 100 tonnes par an, via l'application du régime d'enregistrement (autorisation simplifiée ICPE).
À l'inverse, devrait être élaboré d'ici 2022 un régime juridique pour encadrer les structures artificielles flottantes en mer (qu'elles soient récréatives, résidentielles ou industrielles), avec dans l'intervalle la mise en place d'un moratoire pour les projets qui n'auraient pas encore fait l'objet de demande d'autorisation. Quatre projets d'installations devraient néanmoins être expérimentés afin de "nourrir la réflexion sur ce cadre juridique".
En matière environnementale, ont également été annoncées des mesures pour lutter contre les déchets plastiques (expérimentation de la dépollution d'une décharge prioritaire, mais aussi adoption d'un programme de dépollution de l'ensemble des décharges à risque et d'un modèle de financement de ces opérations dans l'année) ou la proposition à l'OMI de création d'une "zone maritime particulièrement vulnérable" en Méditerranée occidentale nord afin de protéger les grands cétacés.
Recul du trait de côte
Alors que, selon le Cerema, 50.000 logements seraient menacés d'ici à 2100 par le recul du littoral français, dont deux tiers par le risque de submersion, le trait de côte devrait lui aussi faire l'objet de nouvelles dispositions législatives (sans précision sur le texte devant les porter) : identification des communes les plus exposées, information des potentiels acquéreurs et locataires, création "d'outils urbanistiques" et mise en place d'une méthode d'évaluation des biens atteints par l'érosion pour indemniser les propriétaires. Des mesures dont certaines ont déjà été annoncées à la suite du quatrième Conseil de défense écologique du 12 février 2020, et détaillées peu après (voir notre article du 18 février 2020).
Des opérations de "recomposition territoriale avec les outils juridiques et financiers en cours d'élaboration" devraient en outre être expérimentées en ce domaine avec les communes de Saint-Jean-de-Luz, Gouville-sur-Mer et Lacanau. Des mesures que devait permettre le projet de loi 4D, à l'avenir toutefois bien incertain…