Communication - Une tribune libre n'est pas un don, mais elle a un coût
Saisi de plusieurs recours concernant les élections législatives partielles des 7 et 14 décembre 2008 dans la première circonscription de la Marne, le Conseil constitutionnel a rendu quatre décisions, dont l'une concerne - comme souvent - le domaine de la communication en période électorale. En l'espèce, le recours portait sur la publication dans le quotidien local "L'Union", le lundi précédant le premier tour, de quatre tribunes libres concernant chacune un candidat à l'élection et rédigées par leur parti politique respectif. Les requérants faisaient valoir qu'il s'agissait là d'un don en nature d'une personne morale (en l'occurrence le journal), tombant sous le coup de l'article L.52-8 du Code électoral. Celui-ci prévoit en effet que "les personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d'un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués".
Dans sa décision du 14 mai 2009, le Conseil constitutionnel écarte cet argument, tout en apportant des précisions sur le statut de ces tribunes libres dans la presse. Le Conseil constate en effet "qu'il résulte de l'instruction que le journal à grand tirage L'Union ouvre ses colonnes, chaque lundi et depuis sa création au lendemain de la Libération, aux formations politiques qui existaient à cette date ou aux formations que le journal regarde comme leurs héritières". Dans ces conditions, les publications incriminées de tribunes libres "ne constituent pas un don de personne morale prohibé par les dispositions de l'article L.52-8 du Code électoral et de l'article 11-4 de la loi du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique". Elles n'ont donc pas entraîné une rupture d'égalité entre candidats ayant altéré la sincérité du scrutin. En revanche, le Conseil constitutionnel regarde ces tribunes libres comme "le concours en nature de partis politiques à la campagne électorale de ces candidats". Le candidat visé par le recours aurait donc dû valoriser ce concours dans son compte de campagne. Le Conseil juge cependant qu'au regard du montant concerné, cet oubli n'est pas de nature à justifier le rejet du compte de campagne de l'intéressé. Il reste à déterminer selon quel barème valoriser le concours représenté par la tribune libre d'un parti politique publié à titre gracieux dans la presse d'information...
Jean-Noël Escudié / PCA
Référence : Conseil constitutionnel, décision 2008-4527 du 14 mai 2009 (Journal officiel du 17 mai 2009).