Environnement - Une nouvelle législation communautaire sur les déchets entre en vigueur
Le 17 juin, le Parlement européen a approuvé en seconde lecture le compromis d'accord avec le Conseil sur la révision de la directive-cadre de 1975 réglementant la gestion des déchets. Sa mise en oeuvre avait été annoncée dès 2005. Tout en simplifiant le cadre juridique existant, elle s'harmonise avec deux autres directives, celle concernant l'élimination des huiles usagées et celle relative aux déchets dangereux. Avant tout, elle vient fixer des objectifs de réutilisation et de recyclage à atteindre d'ici 2020. Des objectifs que le Conseil des Communes et Régions d'Europe (CCRE) avait souhaité "ambitieux mais réalisables et faisant preuve d'une certaine flexibilité en prenant en considération les différents niveaux d'avancement sur la question des Etats-membres".
Un vote houleux
Le vote s'est donc appliqué au compromis déjà négocié entre les parlementaires et les représentants des Etats-membres du Conseil et de la Commission. Soit, plus précisément, un accord informel trouvé entre le Conseil et la rapporteure du texte au Parlement, l'eurodéputée conservatrice britannique Caroline Jackson. Laquelle a déclaré qu'"au cours des débats et de la seconde lecture, le chemin menant à cet accord a été long et tortueux". Dans les semaines précédant son adoption, le Parlement avait gagné des points en s'attirant le soutien des députés membres de sa commission de l'environnement. En effet, celle-ci a notamment acté deux principaux amendements défendus par Caroline Jackson : l'un fixant des objectifs de recyclage à l'horizon 2020 de l'ordre de 50 % pour les déchets ménagers et de 70% pour les déchets provenant des activités de démolition et de construction, et l'autre reconnaissant le fait que l'énergie produite par le biais de l'incinération puisse faire de celle-ci une voie de traitement qualifiée de "valorisation".
Le texte adopté reprend ces objectifs. Il respecte par ailleurs le principe déjà amplement débattu de hiérarchisation des modes de gestion des déchets. Une hiérarchie devant être considérée par les Etats-membres comme une "règle générale". Parmi les modes abordés, la prévention de production des déchets fait figure de priorité. Côté prévention, l a nouvelle directive oblige en effet les Etats-membres à établir un ou plusieurs plans de gestion des déchets comprenant des programmes de prévention, et ce cinq ans après l'entrée en vigueur de la directive.
Pour l'incinération, la controverse a porté sur la distinction faite entre la source d'"élimination" ou bien de "valorisation" apportée par ce biais technique. L'accord adopté prévoit finalement que l'incinération sera classée comme valorisation "à condition qu'elle réponde à certains critères de rendement énergétique (selon une formule d'efficacité énergétique annexée à la directive)". Par ailleurs, six ans après l'entrée en vigueur de la directive, seules les usines d'incinération ayant un rendement énergétique suffisant seront considérées comme des installations dites de "valorisation". Enfin, la directive fixe des exigences en termes de soutien aux filières de collecte et de traitement des biodéchets.
Premiers retours
Si le Bureau International du Recyclage, qui rassemble les professionnels de la filière, a fait part de sa satisfaction de voir par ce biais législatif "se moderniser ce secteur d'activité", le Bureau européen de l'environnement (BEE), qui réunit des ONG environnementales, a regretté que l'objectif des 50% ne s'applique qu'à certains types de matières issues des déchets ménagers, à savoir le papier, le métal, le plastique et le verre. "Par rapport à la législation actuelle, notamment celle de 1994 sur les emballages, la directive n'apporte de fait pas une grande plus-value", a ajouté le BEE.
Le BEE a également pointé le manque évident de leviers d'injonction et de répréhension envers les Etats qui seraient amenés à ne pas respecter tous les termes de l'accord. Toutefois, pour r épondre aux députés critiquant la faiblesse des objectifs fixés, le commissaire à l'Environnement Stavros Dimas a assuré que si ces objectifs ne sont pas atteints en 2020, "la Commission pourra poursuivre les Etats-membres en justice pour non-conformité avec les exigences de la directive". Aux côtés du BBE, France Nature Environnement (FNE) regrette que la directive ait abandonné l'objectif de stabilisation de la production de déchets d'ici 2012, en vue d'une réduction significative en 2020. Pour la fédération d'associations écologistes, "c'est aux Etats-membres de mettre la barre plus haut dans leur transposition nationale du texte, en fixant des objectifs chiffrés pour la réduction des déchets".
Morgan Boëdec / Victoires éditions