Fonction publique territoriale - Une méthode et des solutions opérationnelles pour mieux gérer les fins de carrière
Le décret sur la retraite à 60 ans qui paraîtra fin juin ou début juillet ne changera pas fondamentalement les choses pour la plupart des agents de la fonction publique territoriale. Devenue plus aiguë du fait de la mise en oeuvre de la loi de réforme des retraites du 9 novembre 2010, l'instauration d'une véritable gestion des fins de carrière nécessite encore beaucoup d'efforts de la part des collectivités, même s'il est vrai qu'elles ont accompli des progrès non négligeables ces dernières années. Le secteur public local est concerné au premier chef par la question : les agents de 50 ans et plus représentent un tiers des effectifs, contre 20% dans le secteur privé. Les difficultés auxquelles les employeurs territoriaux sont confrontées sont multiples et, parfois, se cumulent : l'usure physique et psychologique des seniors, une éventuelle perte de leur motivation, l'appréhension face aux changements et aux innovations, un absentéisme accru, de possibles difficultés relationnelles avec les jeunes générations, ou encore les craintes suscitées par la perspective de la retraite, que ce soit en termes de revenus ou de vie sociale. L'enjeu réside également dans la perte de connaissances et de compétences professionnelles lorsque ces seniors partent en retraite sans qu'ait été organisée une transmission de leur savoir-faire. Les conséquences de toutes ces difficultés sont sensibles tant pour les agents que pour les collectivités elles-mêmes.
Un peu plus de trois mois après le rapport du député Pascal Brindeau - qui, à la demande du ministre de la Fonction publique François Sauvadet dressait, pour la première fois, un état des lieux de cette question en l'accompagnant de recommandations (lire notre article du 29 février 2012) -, une étude se penche à nouveau sur le sujet. Réalisée par neuf élèves-administrateurs de la promotion Salvador Allende pour l'observatoire social territorial de la Mutuelle nationale territoriale (MNT), elle a pour ambition de fournir un véritable "guide pratique". Elle répond bien à cet objectif, puisqu'au-delà d'un diagnostic précis, les collectivités trouveront de nombreux éléments de méthode et pas moins de 30 solutions opérationnelles tirées de l'expérience de 25 collectivités.
Faciliter les reconversions
Ces solutions vont bien plus loin que les réponses qui sont aujourd'hui couramment mises en place, telles que les aménagements de poste ou le reclassement. Si ces dispositifs classiques ont le mérite d'exister, ils interviennent au coup par coup - et souvent trop tard, lorsque les problèmes, par exemple les problèmes de santé de l'agent, sont déjà apparus. Les collectivités doivent plutôt tendre vers "une stratégie globale" mobilisant l'ensemble des acteurs, avec le soutien des élus et des cadres, et reposant sur l'anticipation des problèmes dès le recrutement de l'agent, souligne l'étude.
Une telle démarche nécessite d'ajuster ou de renforcer les outils des ressources humaines. Il s'agit notamment de développer la formation dans le but d'assurer aux agents une certaine polyvalence et, donc, de faciliter les reconversions. En matière de rémunération, l'instauration récente de la prime de fonction et de résultats (PFR) au bénéfice de certains cadres territoriaux peut être l'opportunité, selon l'étude, de "mieux valoriser les fonctions d'expertise ou de tutorat, en particulier en fin de carrière". Quant à l'évaluation professionnelle, elle peut être adaptée aux spécificités des seniors pour intégrer des objectifs plus adéquats (comme la capacité à s'organiser et à analyser les problèmes, ou la transmission des compétences).
Un entretien à mi-carrière
Les collectivités ont aussi tout intérêt à favoriser la mobilité interne pour prévenir l'usure. Dans le cadre d'une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, elles sont incitées à réaliser "une cartographie des métiers pénibles" et à réfléchir très tôt aux évolutions de carrière de leurs agents, en lien avec leurs besoins. C'est dans cette optique que, selon les auteurs, l'entretien de seconde partie de carrière préconisé par le rapport Brindeau s'avérerait utile. Rappelons qu'il s'agirait pour l'agent âgé de 45 ans, de faire le point sur ses perspectives professionnelles avec le référent mobilité-carrière. A l'instar, toujours, du rapport Brindeau, l'étude recommande la mise en place d'un "temps partiel senior" au bénéfice des agents ayant atteint l'âge légal de départ à la retraite. Tout comme elle invite les employeurs territoriaux à avoir davantage recours au télétravail. Dans les deux cas, l'objectif est de faciliter la transition entre vie professionnelle et retraite.
Tous ces dispositifs "ne peuvent réussir à anticiper les problématiques potentielles de fin de carrière que si les agents sont les premiers acteurs de la démarche", conclut l'étude.