Budget - Une loi de finances rectificative pour le grand emprunt
Grâce à une croissance plus soutenue, le gouvernement a pu afficher des prévisions de dette et de déficit en légère amélioration dans son projet de loi de finances rectificative présenté ce mercredi 20 janvier en Conseil des ministres : il table désormais sur une croissance de 1,4% (quasiment doublée par rapport à celle de 0,75% inscrite au départ dans le budget) et prévoit un déficit public à 8,2% du PIB en 2010 au lieu de 8,5%.
Le déficit de l'Etat est en revanche revu en hausse de près de 32 milliards d'euros en raison du grand emprunt et devrait atteindre cette année le montant record de 149,2 milliards d'euros. Si l'impact de cet emprunt sur le déficit public est limité à 0,1 point de PIB, selon Bercy, c'est parce qu'une part très importante des investissements prévus n'est pas prise en compte dans les critères de la Commission européenne (dans la mesure où le gouvernement a privilégié les "dotations non consomptibles", les prêts, participations, avances remboursables…). Reste que le déficit attendu en 2010 sera historique.
Dans cette nouvelle loi de finances, le gouvernement met en effet en musique le grand emprunt de 35 milliards d'euros censé doper la croissance de 0,3% par an en moyenne sur la décennie.
Pour compenser les intérêts dus au titre de ce grand emprunt, le gouvernement va annuler 500 millions d'euros de crédits ministériels en 2010 : la plupart des ministères devront "aller plus loin dans leurs propositions de diminution de frais de fonctionnement", a prévenu le ministre du Budget, Eric Woerth, reconnaissant que cela créait "beaucoup de remous".
Comme prévu, les 35 milliards d'euros de crédits supplémentaires ouverts sur le budget de l'Etat dans le cadre du grand emprunt sont ciblés sur quatre priorités stratégiques : l'enseignement supérieur, la formation et la recherche (19 milliards d'euros) ; l'industrie et les PME (6,5 milliards d'euros) ; le développement durable (5 milliards d'euros) ; le numérique (4,5 milliards d'euros). Ces crédits feront l'objet de quatorze programmes spécifiques qui seront créés au sein des missions existantes.
Côté enseignement supérieur, il est essentiellement question de la poursuite de l'opération Campus (1,3 milliard), de l'essor de "cinq à dix campus d'excellence de visibilité mondiale" (7,7 milliards), du développement du plateau de Saclay (1 milliard), de la formation en alternance (500 millions), des internats d'excellences et autres mesures "égalité des chances".
Sur le volet industrie et PME, on peut citer le financement des entreprises innovantes, le renforcement des pôles de compétitivité (500 millions), le financement des mesures qui seront prises dans le cadre des Etats généraux de l'industrie (1 milliard), un fond de financement de l'économie sociale et solidaire (100 millions), le soutien à la recherche sur les "véhicules du futur" (construction automobile, ferroviaire, navale).
S'agissant du développement durable, priorités aux énergies renouvelables (2,6 milliards), au nucléaire (1 milliard), aux "programmes urbains intégrés" (1 milliard, avec un fonds spécifique créé au sein de la Caisse des Dépôts) et à la rénovation thermique des logements (500 millions).
Enfin, l'économie numérique rimera aussi bien avec réseaux très haut débit (2 milliards) qu'avec le développement des "usages, services et contenus numériques innovants" (2,5 milliards).
Dès que la loi de finances rectificative aura été adoptée par le Parlement, l'Etat va "immédiatement" mettre ces 35 milliards "à disposition des opérateurs spécialisés" chargés de les gérer (Agence nationale de la recherche, Agence nationale de rénovation urbaine, Fonds stratégique d'investissement, etc.), a expliqué Eric Woerth. Ces organismes sélectionneront les projets, dont la réalisation sera étalée sur plusieurs années. Un commissaire général à l'investissement auprès du Premier ministre, René Ricol, "vérifiera que tout ça tourne bien".
On notera par ailleurs que le projet de loi de finances rectificative inclut la traduction de la censure par le Conseil constitutionnel de certaines dispositions de la loi de finances initiale, dont l'annulation du régime particulier initialement prévu pour les titulaires de bénéfices non commerciaux dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle (0,7 milliard d'euros).
C.M.