Un rapport plaide pour la généralisation de l'indemnité kilométrique vélo
Remis à la ministre des Transports ce 20 décembre, un rapport auquel a participé le Club des villes et territoires cyclables propose de rendre obligatoire l’indemnité kilométrique que les employeurs peuvent verser à leurs salariés lorsque ceux-ci utilisent leur propre vélo pour se rendre au travail.
Rendre obligatoire l'indemnité kilométrique vélo (IKV) serait une mesure gagnant-gagnant, pour l'usager, l'entreprise comme les pouvoirs publics, souligne un rapport qui a été remis ce 20 décembre à la ministre des Transports, Elisabeth Borne.
Instaurée par la loi de transition énergétique de 2015, cette indemnité versée aux salariés utilisant leur propre vélo relève aujourd’hui d'une décision de l'employeur. Jusqu’à présent, elle n'a pas vraiment décollé : en 2017, seuls 85 entreprises la proposaient (représentant 150.000 salariés, soit 0,5% des actifs, et in fine moins de 10.000 bénéficiaires). Parmi ces employeurs, Décathlon, RTE, Voies Navigables de France ou la communauté d'agglomération de La Rochelle. Par comparaison, en Belgique, 83% des actifs travaillent dans une structure proposant ce dispositif.
Changement d'échelle indispensable
Les auteurs du rapport, dont le député (LREM) Matthieu Orphelin, le Club des villes et territoires cyclables et la Fabrique écologique, suggèrent de la rendre obligatoire en moins de quatre ans. L’objectif serait d’atteindre 1,4 million de salariés cyclistes en 2022, contre 700.000 aujourd'hui. Ce "changement d'échelle (est) indispensable pour que cette mesure d'intérêt général prenne tout son sens", souligne le texte auquel ont aussi contribué la Fondation pour la nature et l'Homme (FNH) et la Fédération des usagers de la bicyclette(FUB).
La marge de progrès est grande : plus de 70% des déplacements domicile-travail de moins de 5 km sont faits en voiture, selon l'Insee. Or, l'IKV, là où elle a été mise en place, a permis de doubler la pratique vélo en moins d'un an, la faisant passer de 3% à 6% de part modale, souligne le rapport, qui met en avant des bénéfices "nombreux".
Bénéfices attendus
D'abord sur la santé des salariés. Selon deux études, dont une menée aux Pays-Bas où ce type d'indemnité existe depuis 1995, la réduction des arrêts maladie peut aller jusqu'à 15%. Les entreprises, qui profiteront d'une meilleure productivité de leurs employés, subiront des coûts "très limités", avec un "coût moyen de généralisation de l'IKV, à horizon 2022, de moins de 23 euros par salarié et par an dans l'hypothèse la plus ambitieuse" (IKV à 35 euros/mois et cumulée avec le remboursement d'un abonnement transport en commun), estime le rapport.
Pour les comptes publics, même si l'indemnité est exonérée de cotisations sociales et d'impôt sur le revenu, cette généralisation serait contrebalancée par l'amélioration des comptes de la Sécurité sociale (au moins 29 millions d’euros par an d'économies) et la hausse des recettes de TVA (surplus de consommation des employés permis par ce revenu supplémentaire). La mesure réduirait par ailleurs jusqu'à 37 millions d’euros par an les impacts négatifs de la voiture (bruit, accidents, pollution...), ont calculé les auteurs, sur la base d'un rapport de l'université technique de Dresde.
Selon le rapport, la diffusion de l'IKV est freinée par le fait que la mesure est peu connue, par un manque de mobilisation des employeurs, des modalités parfois complexes, ou encore l'impossibilité de combiner IKV et remboursement de l'abonnement transport en commun.
Cette généralisation pourrait trouver sa place dans la loi sur les mobilités attendue au 1er trimestre 2018, suggère Matthieu Orphelin, pour qui "ce serait un superbe signal". Selon Pierre Serne, président du Club des villes et territoires cyclables, pour que l’IKV "donne tout son potentiel", "il faut qu’elle soit obligatoire, généralisée au secteur public et plus incitative". "Il est temps de prendre enfin en compte les bénéfices de la pratique du vélo sur la santé et l’économie et d’accélérer le développement de sa pratique.", estime-t-il.