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Environnement - Un nouveau plan de lutte contre les micropolluants pour la période 2016-2021

Présenté le 8 septembre, le plan de lutte contre les micropolluants pour les cinq années à venir se veut plus ambitieux que son prédécesseur en intégrant toutes les molécules susceptibles de polluer les ressources en eau et en privilégiant la réduction des émissions à la source.

Très attendu, le nouveau plan de lutte contre les micropolluants pour la période 2016-2021 a été officiellement lancé par Ségolène Royal le 8 septembre lors du premier congrès international sur les risques liés aux résidus de médicaments dans l'environnement. Selon la définition qu'en donne le ministère de l'Environnement, un micropolluant est "une substance indésirable détectable dans l'environnement à très faible concentration (microgramme par litre, voire nanogramme par litre)" dont la "présence est, au moins en partie, due à l'activité humaine (procédés industriels, pratiques agricoles ou activités quotidiennes) et peut à ces très faibles concentrations engendrer des effets négatifs sur les organismes vivants en raison de sa toxicité, de sa persistance et de sa bioaccumulation". De nombreuses molécules présentant des propriétés chimiques différentes sont ainsi concernées (plus de 110.000 molécules sont recensées par la réglementation européenne), qu'elles soient organiques ou minérales, biodégradables ou non tels les plastifiants, détergents, métaux, hydrocarbures, pesticides, cosmétiques ou encore les médicaments.

Réduction des pollutions à la source

Elaboré en collaboration avec le ministère de la Santé, l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (Onema), les agences de l'eau et des organismes de recherche et développement, le nouveau plan de lutte contre les micropolluants a vocation à intégrer toutes les molécules susceptibles de polluer les ressources en eau et entend privilégier la réduction des émissions à la source. Il remplace trois plans arrivés à leur terme – celui sur les PCB, le plan précédent sur les micropolluants et celui sur les résidus de médicaments. Il vise à répondre aux objectifs de bon état des eaux fixés par la directive-cadre sur l'eau et participe à ceux de la directive-cadre stratégie milieu marin.
Les 39 actions du plan s'articulent autour de trois objectifs principaux, souligne le ministère de l'Environnement : "réduire dès maintenant les émissions de micropolluants présents dans les eaux et les milieux aquatiques, dont le risque est connu ; consolider les connaissances pour adapter la lutte contre la pollution des eaux et préserver la biodiversité ; préparer les actions de demain, en travaillant notamment sur les risques de non atteinte du bon état des milieux et sur la faisabilité technique, économique et sociologique des changements de pratiques".

Démonstrateurs de bonnes pratiques

De nombreuses actions du plan concernent directement les collectivités. Il est ainsi prévu de "rédiger un guide opérationnel de gestion des raccordements non domestiques pour les collectivités pour faire évaluer les pratiques" et de "mettre en œuvre les recommandations du guide relatif à la bonne gestion des déchets issus de médicaments et des déchets liquides dans les établissements de santé et médico-sociaux". Autre exemple d'action pouvant impliquer les collectivités : "mettre en place dans quelques métiers de l'artisanat des démonstrateurs de bonnes pratiques de réduction d'émissions de micropolluants". Le projet Lumieau (lutte contre les micropolluants dans les eaux urbaines) lancé par l'eurométropole de Strasbourg est cité comme modèle. Mené sur 4 ans (2015-2018) par un consortium de huit partenaires, il propose une approche de gestion intégrée des micropolluants à l'échelle de l'agglomération - identification des sources de pollution, hiérarchisation de leurs impacts sur la ressource, mise en place des outils d'aide à la décision et de solutions répondant aux différentes situations, accompagnement de publics cibles par des actions de communication et la mise en place de démonstrateurs. Dans ce cadre, trois artisans peintres en bâtiment ont ainsi accepté de tester des équipements de prétraitement de leurs effluents ainsi que des peintures de substitution.

Protection de 1.000 captages prioritaires

Le plan prévoit en outre la protection de 1.000 captages prioritaires vis-à-vis des nitrates ou des pesticides, sur un total de 3.000 touchés par des pollutions diffuses. En complément des actions déjà financées par les agences de l'eau auprès des agriculteurs, les partenaires et collectivités propriétaires des captages seront aussi mobilisés pour installer "dans les meilleurs délais les comités de pilotage locaux pour les captages prioritaires nouvellement identifiés", "lancer les études nécessaires à la mise en place des plans d'actions" et "engager enfin la définition, la mise en oeuvre et le suivi du plan d'actions". "Les captages identifiés comme prioritaires dans les Sdage devront faire l'objet d'un plan d'action au plus tôt, et en tout état de cause avant 2021, indique le ministère. En ce qui concerne les nouveaux captages prioritaires, le cas échéant, les démarches de protection au titre du Code de la santé publique seront menées en parallèle en veillant à la complémentarité des démarches."

Actions de formation et de communication
 

Le plan prévoit également l'élaboration et la mise en œuvre d'une stratégie de formation destinée notamment à l'accompagnement des collectivités. Un volet communication est aussi prévu. Des guides capitalisant notamment les expériences des collectivités innovantes sélectionnées dans le cadre de l'appel à projets national "Innovation et changements de pratiques : micropolluants des eaux urbaines" lancé par les Agences de l'eau, l'Onema et le ministère de l'Environnement en 2014 vont être rédigés et diffusés. Trois recueils sont envisagés : un premier relatif au territoire urbain et aux infrastructures routières, abordant notamment les aménagements pluviaux et les activités économiques (industries et artisans raccordés au réseau des collectivités), un deuxième ciblé sur les modes d'actions possibles au niveau des particuliers et un troisième plus spécifiquement lié aux établissements de soins.

Recherche de substances dangereuses dans certains ouvrages

Des mesures sont également prévues pour poursuivre la recherche de substances dangereuses dans les eaux brutes et dans les eaux usées traitées de stations de traitement des eaux usées et chercher à diminuer les flux de molécules rejetées.
Le plan entend aussi construire une méthodologie pour la valorisation et le recyclage des déchets minéraux non dangereux en ouvrages maritimes ou immergés. "L'objectif est d'offrir aux gestionnaires les outils méthodologiques et pratiques pour intégrer dans leurs ouvrages hydrauliques des matériaux recyclés locaux compatibles avec les enjeux de pérennité de l'ouvrage et de préservation de l'environnement", est-il précisé.
Autre exemple d'action envisagée : évaluer l'incidence de l'utilisation de pneus usagés utilisés dans les ouvrages de stockage des eaux pluviales, certaines substances dangereuses (cadmium, nickel, plomb, benzène, hydrocarbures aromatiques polycycliques, etc.), pouvant être rejetées lors du contact prolongé entre ces pneus usagés et les eaux pluviales. Le plan prévoit encore d'établir une cartographie des eaux souterraines impactées par les ions perchlorate d'origine agricole et ceux issus de la destruction des munitions des grandes guerres et de définir d'éventuels cortèges de micropolluants associés.