Aménagement numérique - Très haut débit : poursuite des consultations pour une nouvelle feuille de route à l'automne

La relance du programme national Très Haut Débit était à l'ordre du jour de la réunion de concertation organisée le 27 juillet par Fleur Pellerin, ministre déléguée en charge de l'économie numérique, en association avec Cécile Duflot, ministre chargée de l'égalité des territoires. Cette rencontre réunissait une quarantaine de participants - opérateurs télécoms, représentants d'associations d'élus (Avicca, AMF, ADF notamment) et parlementaires.
La réunion visait, d'une part, à identifier "collectivement" les questions sensibles à traiter pour relancer le processus de déploiement du très haut débit et, d'autre part, à présenter la méthode de travail du gouvernement sur ce chantier très stratégique. Sur ce point, lors de son intervention introductive, Fleur Pellerin a indiqué qu'elle comptait poursuivre une consultation cet été en vue préparer une nouvelle feuille de route à la rentrée.

Priorité aux zones mal desservies et engagement des opérateurs

L'année 2022 étant réaffirmée comme l'année de bouclage du plan, la ministre s'est d'abord interrogée sur d'éventuels objectifs intermédiaires qui pourraient être fixés pour 2017. Elle a fourni quelques pistes de travail comme la priorité au raccordement des services publics, aux entreprises et à la couverture des zones les plus mal desservies en donnant une préférence à la fibre optique plutôt qu'à la montée en débit.
Le financement public du très haut débit demeure aussi en tête d'affiche des préoccupations. L'institution d'une taxe sur les fournisseurs de contenus, souvent évoquée, semble plutôt écartée en raison de ses difficultés de mise en oeuvre. D'autres solutions sont à l'étude et Fleur Pellerin devrait logiquement attendre les conclusions, à l'automne, de la mission confiée à Pierre Collin, conseiller d'Etat, et Nicolas Colin, inspecteur des finances, sur la fiscalité de l'économie numérique. En matière de gouvernance, elle réaffirme sa volonté de "rupture" en instituant un véritable pilotage national. Avec, toutefois, des questions sur la manière de l'aborder et sur les structures susceptibles de l'accompagner (voir notre article du 24 juillet). Quant au partage du territoire entre secteur public et privé, s'il continue à faire l'objet de nombreuses critiques, c'est moins sur le plan de la répartition géographique que sur l'engagement des opérateurs. La ministre souhaite un dispositif plus précis et plus formalisé. Certains participants ont souhaité que ce dispositif puisse s'appliquer aussi aux zones très denses sur lesquelles le déploiement des opérateurs n'apparaît pas toujours homogène. Elle souhaite inciter plus fortement les opérateurs à utiliser les RIP existants et recherche des solutions adaptées techniquement et financièrement.
Le plan numérique actuel devrait donc faire l'objet d'aménagements et non d'une remise à plat générale. "Il y aura sans doute quelques ajustements législatifs à faire sur les questions essentielles posées lors de cette table ronde, mais cela ne devrait pas conduire à faire table rase du plan national", commente l'un des participants.

Avicca : une contribution d'un euro par abonné à la téléphonie mobile

Au cours de la table ronde, les participants ont donc eu l'occasion de rappeler leurs positions respectives. Du côté des élus, le sénateur Yves Rome, président de l'Avicca, propose d'instituer une contribution d'un euro par mois et par abonné mobile pour financer le plan national, sur le modèle de la contribution prélevée sur chaque facture d'électricité pour financer notamment le surcoût du photovoltaïque. "La concurrence entre opérateurs mobiles a fait baisser la facture de 5 à 7 euros par mois. N'y a-t-il pas de quoi reprendre un euro pour réaliser un chantier qui ne pourra être mené par la concurrence ?". Le scénario permettrait de déployer des réseaux neutres et mutualisés et dégagerait en moyenne entre 840 millions et 1 milliard d'euros par an auxquels s'ajouteraient les financements des collectivités et des opérateurs utilisateurs du réseau.
Les grands opérateurs présents ont confirmé leurs engagements d'investissement, toutefois, pour certains, sans évoquer de calendrier pour le futur.
En fin de matinée, plusieurs intervenants sont revenus sur le débat de la concurrence entre les infrastructures fibre optique et les infrastructures fil de cuivre en soulignant l'importance d'y mettre fin rapidement par l'institution d'un arrêt progressif de la boucle locale de cuivre. On notera que France Télécom, principal opérateur concerné, a lui même prudemment évoqué la question en annonçant le lancement à l'automne d'une expérimentation avec l'Etat pour mieux appréhender les conséquences d'une telle suppression. "Sans se prononcer sur le fonds, cela envoie un signal à tous ceux qui disent que ce n'est pas possible", commente un participant.
Ainsi, le nouveau schéma esquissé n'est pas destiné à tout bouleverser. L'hypothèse d'une réforme profonde semble définitivement écartée. Les principaux acteurs pourront revenir sur les points litigieux et prendre connaissance des autres prises de position en toute transparence d'ici à l'automne. Le dialogue semble plus ouvert et plus propice à l'écoute. Reste à savoir quelles seront les réponses données, sachant que les marges de manœuvre du gouvernement, y compris sur ce chantier déclaré "prioritaire", demeurent étroites.