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Transports - Transport par autocar : une dernière ligne droite avant la libéralisation ?

Dans la perspective de la libéralisation du marché du transport de voyageurs par car, deux opérateurs, la SNCF, via une nouvelle filiale, et le réseau de PME Réunir, préparent le terrain en lançant des lignes d'autocars reliant entre elles de grandes villes. L'occasion de faire le point sur un secteur en plein chambardement.

Comment s'organisent les transports par car au niveau interrégional ? En France, la balle n'est pas dans le camp du privé, comme c'est le cas chez certains voisins (Grande-Bretagne, Suède), mais dans celui de l'autorité publique. Impossible, par exemple, pour une compagnie d'autocars de créer une ligne Bordeaux-Nantes… quand bien même la clientèle serait au rendez-vous. "Le marché n'est théoriquement pas ouvert et le secteur est très régulé", confirme Alain-Jean Berthelet, président du réseau d'autocaristes Réunir. Théoriquement, car des brèches s'ouvrent. D'une métropole régionale à l'autre, il est parfois déjà possible de voyager en car via du cabotage effectué par une société de transport assurant un trajet international. Concrètement, un passager parisien désirant se rendre à Valenciennes peut embarquer dans un autocar Eurolines reliant Paris et Liège et profiter de la halte faite sur le trajet. Ceci est permis suite à un décret de novembre 2010 autorisant le cabotage par les lignes internationales sur le réseau national. Plus précisément, il permet aux autocars "d'effectuer des transports de personnes entre deux points du territoire national dans le cadre de services réguliers internationaux".

Le cabotage gagne du terrain

Deux conditions, cependant. La première : les passagers qui descendent avant le passage de la frontière ne doivent pas représenter plus de la moitié des voyageurs. La seconde : les régions traversées doivent être consultées avant toute ouverture de ligne. "Or elles y sont traditionnellement opposées de peur que ces cars concurrencent les liaisons ferroviaires qu'elles subventionnent", commente un élu régional qui préfère rester anonyme. Il faut dire que le dossier reste sensible. Il y a deux ans, des inspecteurs du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) avaient sondé dans un rapport plusieurs conseils régionaux à ce sujet et fait état de "positions qui vont de l'opposition résolue au scepticisme", avec par ailleurs un manque de position commune de la part des grands acteurs du secteur. Mais les choses bougent et les collectivités tolèrent depuis des trajets interrégions en cabotage, qui sont en développement dans le grand Ouest (trajets entre Paris, Rennes, Angers et Nantes) et le nord de l'Hexagone (Paris-Valenciennes).

Rhône-Alpes prend le car en route

En Rhône-Alpes souffle aussi un vent nouveau. L'été dernier, la région a repris la main sur ses autocars TER (Transport Express Régional), auparavant gérés par la SNCF. Aux cinq lignes existantes, elle souhaitait en ajouter d'autres. Avant même de lancer un appel d'offres dédié, elle vient d'autoriser un opérateur privé à enrichir son réseau régional. Depuis le 6 juillet, le réseau Réunir propose ainsi une liaison quotidienne Lyon-Chambéry-Turin, exploitée par les Courriers rhodaniens sous la marque Starshipper. "La région n'y contribue pas financièrement : l'exploitant en supporte tous les frais. Pour lui, l'investissement de départ n'est pas moindre, de l'ordre d'un million d'euros", indique Alain-Jean Berthelet. Soumise à autorisation ministérielle, cette ligne n'en doit pas moins respecter les règles du cabotage et le subtil équilibre de non-concurrence avec les services routiers TER existants. "On ne doit pas faire de l'ombre aux autres cars régionaux, notamment en termes de services proposés à bord. Le niveau de confort est donc très bon sans tirer vers le haut de gamme. Car on intervient bien en complément et non en concurrence des réseaux de TER", insiste Franck Delol, chargé de mission chez Réunir.
Ce réseau ne veut pas en rester là. D'ici la fin d'année, il vise une seconde ouverture de ligne dans une autre région, puis une douzaine d'ici la fin 2013. "Le défi serait de pouvoir relier en autocar de grandes villes françaises. Le contexte réglementaire ne le permet pas. Mais il évolue et un décret sur cet enjeu semble en préparation", espère Franck Delol. L'homme ne voit pas d'un mauvais œil l'arrivée de la SNCF sur ce même créneau. "Elle crédibilise notre métier d'autocariste et nous donne des ailes pour aller plus loin." D'ici la fin du mois, l'opérateur historique aura en effet lancé, via sa nouvelle filiale IDBUS, de nouveaux services d'autocars longues distances entre Londres, Bruxelles, Amsterdam, à partir de Lille et Paris. "L'offre a été élaborée en seulement 18 mois, pour attirer des usagers qui utilisent habituellement leur voiture mais pourraient avoir recours au bus à condition qu'il y soit proposé un service de qualité", a déclaré Barbara Dalibar, directrice générale de la branche SNCF Voyages.