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Patrimoine - Transmission des candidatures à maîtrise d'oeuvre : pas imposée, mais recommandée

Dans une question écrite, Jean-Claude Carle, sénateur de Haute-Savoie, s'interroge sur l'application de la procédure des marchés de maîtrise d'oeuvre au cas de figure des opérations de restauration des monuments historiques. Il se fonde sur la dernière des fiches "Médiations" - éditées par la Mission interministérielle pour la qualité des constructions publiques - consacrée à la maîtrise d'ouvrage sur les monuments historiques des collectivités (voir notre article ci-contre du 8 juin 2010). Selon l'intéressé, celle-ci "exige qu'une collectivité territoriale transmette à la direction régionale des affaires culturelles (Drac) le dossier de candidature du ou des candidats susceptibles d'être retenus dans le cas d'une procédure restreinte ayant pour objet de choisir un maître d'oeuvre pour restaurer un monument historique classé". Il souhaite donc savoir si cette disposition ne contrevient pas à la réglementation relative aux marchés publics et connaître la conduite à tenir en cas de divergence de point de vue entre la Drac et la collectivité concernée.

Des justifications à produire

Dans sa réponse, la ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie rappelle que la loi du 12 juillet 1985 modifiée relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée (loi MOP) n'est pas applicable aux opérations effectuées sur des immeubles classés. Celles-ci font en effet l'objet d'un contrôle spécifique de l'Etat, dont les modalités ont été précisées par quatre décrets du 22 juin 2009 (voir notre article ci-contre du 25 juin 2009). Ceux-ci précisent notamment que tout propriétaire d'immeuble classé - et donc pas seulement les collectivités territoriales - doit saisir le préfet de région (Drac) de son intention de mener un projet de travaux. En réponse à cette saisine, le préfet de région "met à sa disposition l'état des connaissances dont il dispose sur le bien en cause et lui indique les contraintes réglementaires, architecturales et techniques que le projet devra respecter" et précise "les compétences et expériences que devront présenter les architectes candidats à la maîtrise d'oeuvre de ces travaux". Dès lors, le propriétaire ou l'affectataire de l'immeuble classé est libre de désigner le maître d'oeuvre de son choix, dans le cadre d'un marché public (collectivités territoriales) ou de gré à gré (propriétaires privés). Mais il devra transmettre au préfet "les justifications de nature à établir que la formation et l'expérience professionnelle du maître d'oeuvre choisi attestent des connaissances historiques, architecturales et techniques nécessaires à la conception et la conduite des travaux sur l'immeuble faisant l'objet de l'opération de restauration". Cette information devra, en tout état de cause, être transmise avant le dépôt de l'autorisation de réalisation des travaux sur l'immeuble classé et avant la passation du contrat de maîtrise d'oeuvre.
Pour accomplir cette démarche, deux cas de figure sont possibles. Sur un plan juridique, la collectivité n'a pas l'obligation de transmettre les dossiers de tous les candidats à la maîtrise d'oeuvre, autrement dit avant le choix du prestataire. Elle peut attendre l'achèvement de cette phase de sélection et ne transmettre que le dossier du prestataire retenu. Mais la réponse ministérielle plaide fortement en faveur d'un envoi de l'ensemble des candidatures avant sélection. Elle fait en effet valoir qu'"une telle transmission permet de prévenir le risque de divergence entre les appréciations portées par le préfet et le maître de l'ouvrage sur les capacités des candidats et, par conséquent, le risque de devoir déclarer sans suite la procédure de passation du marché de maîtrise d'oeuvre".

Jean-Noël Escudié / PCA

Référence : Sénat, question écrite numéro 16879 de Jean-Claude Carle, sénateur de Haute-Savoie, et réponse du ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie (JO Sénat du 19 mai 2011).