Culture - Le gouvernement va revoir le statut des architectes en chef des monuments historiques
Dans un communiqué du 13 octobre, la ministre de la Culture annonce qu'elle "va proposer au Premier ministre un nouveau texte donnant aux architectes français, justifiant des qualifications et de l'expérience requises, la possibilité d'assurer la maîtrise d'oeuvre de la restauration des monuments classés dans les mêmes conditions qu'aux ressortissants de l'Union européenne". A l'origine de cette décision : un arrêt du Conseil d'Etat, qui annule partiellement l'article 9 du décret du 28 septembre 2007 portant statut particulier du corps des architectes en chef des monuments historiques et adaptation au droit communautaire des règles applicables à la restauration des immeubles classés (voir notre article ci-contre). La disposition annulée résultait d'une mise en conformité avec les prescriptions de l'Union européenne. Elle prévoyait en effet que "la maîtrise d'oeuvre des travaux de restauration des monuments classés autres que ceux mentionnés au premier alinéa du III de l'article 3 [NB : les immeubles classés au titre des monuments historiques appartenant à l'Etat] peut également être assurée, sur une opération donnée, par un ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen établi dans un autre Etat que la France", sous réserve qu'il présente les conditions requises pour postuler au concours sur titre d'architecte en chef des monuments historiques, ainsi que celles requises pour être inscrit à un tableau régional de l'Ordre des architectes.
Dans sa décision, le Conseil d'Etat constate que cette disposition "exclut les professionnels établis en France de son champ d'application" (qu'ils soient de nationalité française ou résidents originaires d'un pays de l'Union européenne). Ce distinguo établi avait pour objet, dans la rédaction initiale de l'article contesté, de respecter l'obligation d'ouverture européenne (aux conséquences pratiques limitées) tout en préservant l'essentiel du monopole des architectes en chef du patrimoine. Or le Conseil d'Etat estime "qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les inconvénients résultant à l'avenir, pour les architectes en chef des monuments historiques, de la réduction du champ de leur monopole seraient excessifs par rapport à l'objectif d'intérêt général poursuivi par les auteurs du décret".
La "Compagnie des architectes en chef des monuments historiques", auteur du recours devant le Conseil d'Etat, pourrait donc bien voir, au final, sa démarche se retourner contre les intérêts de ses membres. La rédaction de la décision du Conseil d'Etat ne laisse en effet au gouvernement guère d'autre latitude que d'ouvrir la maîtrise d'oeuvre aux architectes nationaux et aux architectes résidents issus d'un pays membre de l'Union européenne. C'est d'ailleurs ce que laisse clairement entendre le communiqué du ministère de la Culture.
Jean-Noël Escudié / PCA
Référence : Conseil d'Etat, section du contentieux, décisions 310146 et 311080 du 6 octobre 2008, Compagnie des architectes en chef des monuments historiques (présenté au Conseil des ministres du 26 septembre).