Environnement - Transition énergétique : Ségolène Royal devant la commission spéciale de l'Assemblée
Présidée par le député socialiste de l'Isère François Brottes et composée de 69 députés, la commission spéciale de l'Assemblée nationale - alliant Développement durable et Affaires économiques – chargée d'examiner le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte a commencé ses travaux le 9 septembre par une audition de Ségolène Royal.
La ministre chargée de l'Energie a détaillé le contenu du projet de loi qui ouvre selon elle "un nouveau chapitre de l'histoire énergétique" de la France. "Ce n'est pas une révolution mais une mutation irréversible et le moment est venu de s'engager dans cette mutation", a-t-elle affirmé. Ce texte lance "le grand chantier de la rénovation énergétique des bâtiments, source de création d'emplois dans un secteur fragilisé", a-t-elle fait valoir. Il marque "la consécration dans notre droit positif des notions de croissance verte, de territoires à énergie positive et d'économie circulaire". Il est "facteur de solidarité avec le remplacement des tarifs sociaux par un chèque énergie plus efficace".
Critiques sur la procédure accélérée
Plusieurs députés de l’opposition ont déploré le choix de la procédure accélérée pour l’examen du projet de loi. "La longueur de préparation de ce texte contraste avec les mauvaises conditions et les délais très raccourcis dans lesquels le Parlement examine ce texte, a souligné Julien Aubert, député UMP du Vaucluse. Nous n’avons pas d’obligation, et nous n’étions pas à la semaine. Il faut prendre le temps d’en discuter sereinement." Il n'est pas question de "limiter le temps de parole", a rappelé la ministre. "Il ne s’agit pas de bâcler le débat parlementaire mais de répondre à l’urgence et à l’attente des territoires qui sont déjà souvent en avance sur nous", a-t-elle assuré. Elle a insisté sur "le temps de travail en commission, où je serai présente constamment."
Bernard Accoyer, député UMP de Haute-Savoie, a regretté que "tous les rapporteurs soient membres de la majorité". "Trois objectifs dans un texte c’est ambitieux", a-t-il poursuivi à propos des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, de consommation d’énergie et de développement des énergies renouvelables. "Nous sommes très forts mais il faut parfois arrêter une priorité." Il regrette que ne soient pas prises en compte "les conséquences de l’échec allemand de la sortie du nucléaire, évaluées à 1.000 milliards d’euros". Interrogée à plusieurs reprises par les membres de la commission sur ce volet du nucléaire, la ministre a tenu à justifier le choix du gouvernement de plafonner au niveau actuel la capacité de production d'électricité issue des centrales nucléaires. "Je crois être arrivée à un point d'équilibre. (...) On fait le choix de la sécurité, mais en faisant le choix très volontariste de ce plafonnement on se donne les moyens de monter en puissance fortement sur les énergies renouvelables, et donc d'en baisser le coût", a défendu Ségolène Royal.
Un financement jugé trop flou par certains
La question du coût du projet de loi et du flou sur les mesures de financement a aussi été plusieurs fois rappelée par les députés. "Nous aurions pu nous contenter d’une approche politicienne et rejeter en bloc ce texte", a souligné Bertrand Pancher député UDI de la Meuse. "Nous sommes en colère depuis des mois face à la politique environnementale qui n’est pas menée par ce gouvernement, a-t-il déclaré. Tous les piliers de l’économie verte ont été minutieusement saccagés ces dernières années" alors que "les acteurs du Grenelle de l’environnement vous tendaient sur un plateau les méthodes du financement de la transition énergétique", a-t-il lancé à la ministre.
De son côté, Cécile Duflot, députée EELV de Paris, a affirmé que les députés écologistes seront "les premiers soutiens d’une loi innovante", dans des conditions "socialement et économiques acceptables". André Chassaigne, député PC du Puy-de-Dôme a jugé pour sa part que l’objectif de réduire de 50% la consommation d’énergie en 2050 était "contestable au regard de la dynamique démographique de la France", qui va sur "70 millions d’habitants" à cette échéance. "Comment envisager un redressement industriel avec une baisse massive de la consommation d’énergie ?", a-t-il interrogé.
Cinq rapporteurs désignés
Au cours de cette première réunion, les cinq rapporteurs du texte ont aussi été désignés : Marie-Noëlle Battistel (PS, Isère) pour les titres Ier (objectifs) et V (énergies renouvelables) ; Sabine Buis (PS, Ardèche) pour les titres II (bâtiments) et IV (économie circulaire) ; Philippe Plisson (PS, Gironde) pour les titres III (transports) et VI (sûreté nucléaire et information des citoyens) ; Ericka Bareigts (PS, La Réunion) pour le titre VII (simplification des procédures) et le chapitre IV du titre VIII (outre-mer) ; Denis Baupin (EELV, Paris) pour les chapitres Ier à III du titre VIII (gouvernance et programmation, pilotage de la production d’électricité, transition énergétique dans les territoires). Les rapporteurs ont assuré qu'ils comptaient "améliorer" le texte. Denis Baupin veut notamment "renforcer les compétences des territoires pour libérer les énergies locales" et "clarifier les chèques énergie" destinés aux ménages en situation de précarité énergétique. Sabine Buis a appelé à "approfondir la notion de guichets uniques de la rénovation et de tiers financement" et s'est dit favorable à des aides fiscales "sur bouquets de travaux". Philippe Plisson compte présenter des amendements concernant "le transport de marchandises fluvial et le covoiturage". Comme François Brottes, Marie-Noëlle Battistel a dit vouloir "enrichir" le texte sur le volet hydroélectricité. Quant à Ericka Bareigts, elle a souligné la nécessité d'"identifier les éléments bloquants et de faire sauter les verrous" pour favoriser les énergies renouvelables dans les outre-mer.
La commission devrait examiner le projet de loi à partir du 24 septembre. L'examen en séance publique commencera le 1er octobre.