Tertiarisation, rotation, démassification… Les élus face aux mutations du commerce de centre-ville

Le commerce de centre-ville vit des mutations importantes entre tertiarisation, rotation qui s'accélère et "démassification" de la consommation. Des enjeux qui ont été décryptés le 27 mars lors d'un séminaire intitulé "Comment agir sur le commerce pour redynamiser son centre-ville ?", organisé au Hub des territoires. 

Tertiarisation des commerces, baisse de la consommation en valeur mais aussi en volume, démassification de la consommation… Dans le cadre d'une conférence organisée par le Hub des territoires le 27 mars 2025, intitulée "Comment agir sur le commerce pour redynamiser son centre-ville ?", à partir d'une étude menée auprès de 20.000 sites et 3,8 millions d'établissements, le cabinet AID a dressé un état des lieux peu encourageant pour le commerce en centre-ville. "On fait le constat d'une tertiarisation des rez-de-chaussée commerciaux, le commerce ne représentant que 16% des occupations analysées", a indiqué David Sarrazin, directeur associé chez AID, sachant qu'un tiers du secteur du commerce concerne de l'alimentaire. 32% des occupations étudiées correspondent à des services marchands (service à la personne, beauté, hygiène, santé) et non marchands (services banque et assurance).

Le poids du commerce est en forte baisse depuis cinq ans, détaille AID, avec un transfert entre activités commerciales et activités de services : -5% entre 2018 et 2024 pour le commerce, contre +4% pour les services marchands et non marchands et +1% pour les cafés-hôtels-restaurants. Le secteur du textile est particulièrement atteint, comme le constatent d'autres observateurs (voir notre article du 13 février 2025). "En 2020, l'équipement de la personne représentait un tiers des établissements en centre-ville, en 2024, ce n'est plus qu'un quart", a détaillé David Sarrazin, avec 112.000 points de vente qui ont disparu environ.

Un taux de rotation des commerces qui s'accélère

Autre constat : le taux de rotation en centre-ville s'accélère. Il était de 5% en 2000, il est autour de 14% aujourd'hui. "Cela régénère le tissu mais cela le déstabilise aussi, estime David Sarrazin, d'où l'enjeu d'accompagner ces renouvellements, avec le travail réalisé par les managers de centre-ville ou les chambres consulaires." La démassification de la consommation est aussi en cours, induisant la crise des grands formats, avec des clients qui démultiplient leurs lieux d'achat et de consommation. "On consomme moins en valeur mais aussi en volume, a insisté le responsables d'AID, et la génération Z a des modes de consommation complètement décalés par rapport à la société de consommation d'avant, avec une consommation de loisirs, de restaurant et d'alimentation, mais fractionnée et portionnée."

A Douai (Nord), les élus assistent à ces mutations. "L'évolution est positive en nombre de commerces, qui est toujours en train d'augmenter, mais derrière une quarantaine d'ouvertures, il y a une trentaine de fermetures, et une mutation rapide, car ceux qui ouvrent ne sont pas les mêmes qu'avant, avec un avantage pour les installations de restauration rapide type donuts par exemple", a exposé Frédéric Chéreau, maire de Douai, 

S'attaquer au bâti dégradé

La ville tente de lutter, à travers des loyers progressifs pour les commerces les premiers mois, et la mise en place et le maintien de commerces en centre-ville, à l'image du Furet du Nord, une grande librairie, qui bénéficie d'un système de loyer plancher pour accompagner les aléas du locataire… "Un des points importants est de s'attaquer au bâti dégradé, a indiqué Frédéric Chéreau, car l'initiative privée n'est plus suffisante, il faut que la ville prenne la main." Dans le cas du Furet du Nord, les choses ont été relativement simples juridiquement et techniquement, puisqu'il n'y avait qu'un seul immeuble monofonctionnel à gérer. Cela devient plus compliqué quand il faut prévoir des travaux, et des destinations diverses (commerce en rez-de-chaussée, habitation à l'étage par exemple). "On part du commerce, mais derrière ce sont toutes les fonctions urbaines qu'il faut travailler, a insisté Frédéric Chéreau, il ne faut surtout pas devenir des centres-villes 'Disney Land' sans vie la nuit !"

Un guide méthodologique de la Banque des Territoires permettant d'aider les collectivités à mieux se saisir des outils et démarches disponibles a été publié fin mars 2025. Il liste les ressources mobilisables pour redynamiser le commerce (leviers financiers, acteurs en jeu, type de bail).

 

Pour aller plus loin

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis