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Société numérique - Télétravail : le secteur public français est toujours en retard selon le Centre d'analyse stratégique

Le potentiel de développement du télétravail pourrait concerner jusqu’à 40% à 50% des emplois à l’horizon 2020, sachant que toutes les fonctions ne sont pas concernées, notamment dès lors qu’elles n’utilisent pas les TIC. C'est ce qu'indique le Centre d’analyse stratégique (CAS) dans son rapport, remis fin novembre, sur "le développement du télétravail dans la société numérique de demain". Commandée en juillet par Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’Etat au Numérique, cette enquête dresse l’état du télétravail dans 20 pays de l’OCDE. Tout en rappelant le retard français, ce document avance plusieurs recommandations pour y remédier. Parmi les pistes proposées, les innovations technologiques attendues dans les prochaines années sont en bonne place. Les applications collaboratives (virtualisation, cloud computing et Software as a Service) ou les outils de mobilité (netbooks et smartphones, 4G, LTE/WiMAX, réseaux sans couture) devraient favoriser l’essor du télétravail. Pourtant, ce mode d'activité est encore très peu développé dans l'administration, tant au niveau central qu’au niveau local. Seulement 1% des agents publics français le pratiquait début 2002, même si le travail "hors bureau" est effectif depuis longtemps pour de nombreux fonctionnaires : magistrats, chargés d’études, diplomates, rédacteurs-traducteurs, fonctions d’inspection... Au niveau central, trois exemples récents de télétravail ont été mis en place par la Direction générale des impôts, le ministère de l'Education nationale et le ministère de la Justice.

 
Une législation en évolution

La proposition de loi "pour faciliter le maintien et la création d’emplois", adoptée le 9 juin 2009 par l’Assemblée nationale, constitue un socle propice pour le développement du télétravail sans l'explosion d’un télétravail subi ; elle apparaît relativement protectrice pour les salariés sans pour autant dissuader les entreprises qui souhaiteraient mettre en place le télétravail. En revanche, "le télétravail, notamment dans sa dimension formalisée, semble souffrir de l’absence de cadre juridique spécifique dans le secteur public", indique le rapport. Le manque de doctrine officielle sur le sujet favorise l’hétérogénéité des pratiques et une forme d’immobilisme : une brochure a été éditée par le ministère de la Fonction publique et faiblement diffusée en 1998, et rien n’a été entrepris depuis. Enfin, la fonction publique fait preuve d’une certaine difficulté à adopter la gestion par objectif, point fondamental de l’organisation en télétravail. Bien que les expériences précédentes n'aient pas connu de suite, rien ne s'oppose, ni en théorie ni en pratique, à la mise en place du télétravail dans la fonction publique, qui constitue dès lors un "gisement" potentiel de télétravailleurs plus important que le secteur privé, indique le rapport.

Quelques départements pionniers

Conscientes des enjeux et de l’intérêt du télétravail pour leurs salariés, la productivité de leur organisation, l'aménagement du territoire ou en matière de développement durable, plusieurs collectivités territoriales se sont saisies du sujet. Certaines ont initié des expériences de télétravail dans leur collectivité. C’est le cas notamment du conseil général du Finistère :une trentaine d'agents volontaires expérimentent le télétravail 2 à 3 jours par semaine, durant 8 mois, jusqu'à mai 2010. Le Puy-de-Dôme est également en phase de test d’un dispositif de télétravail auprès d'une cinquantaine d'agents. Après le déploiement de 7 télécentres, le Cantal se lance également avec une vingtaine d'agents équipés d'ordinateurs portables connectés par réseau sécurisé VPN (Virtual Private Network), dans le cadre du plan de crise H1N1 (plan de continuité d'activité "grippe A"). Quant au conseil général des Côtes-d’Armor, il a été pionnier avec l'équipement des travailleurs médicosociaux d’ordinateurs portables communicants et sécurisés (projet Estran). Début 2009, la société Citica a publié, de son côté, une étude stratégique sur le développement du télétravail en région Aquitaine, réalisée durant 8 mois.

La France se situe au 13e rang des pays de l’OCDE pour la diffusion du télétravail. Durant la période 2005-2009, si l’on en juge par les conclusions de la mission du député Pierre Morel A l’Huissier (en 2006) et par le faible nombre d’accords de télétravail signés depuis, il est probable que le chiffre de 7% de télétravailleurs n’ait pas fortement changé.

 

Luc Derriano / EVS