Solidarité à la source : généralisation à partir du mois de mars

Catherine Vautrin, la ministre en charge du travail et des solidarités, a confirmé que la déclaration de ressources simplifiée, ou "solidarité à la source", sera généralisée à partir de mars pour les bénéficiaires du RSA et de la prime d'activité, de façon à simplifier leurs démarches.

A partir du 1er mars prochain, l’ensemble des foyers bénéficiaires du RSA et de la prime d’activité verront une partie de leur déclaration de ressources trimestrielles déjà pré-remplie. Ils n’auront plus qu’à la valider. Dans une interview à Ouest France diffusée ce vendredi 14 février, la ministre du Travail, Catherine Vautrin, a officialisé la généralisation de cette première étape de la réforme dite de "solidarité à la source", à l’occasion d’un déplacement en Vendée, l’un des cinq territoires expérimentant le dispositif depuis octobre. "Avec cette réforme, nous simplifions la vie de 6 millions de Français", a déclaré la ministre. 

Tout se passe donc comme prévu. Depuis octobre dernier, cinq caisses d’allocations familiales – dans les Alpes-Maritimes (06), l’Aube (10), l’Hérault (34), les Pyrénées-Atlantiques (64) et la Vendée (85) – testent le pré-remplissage automatique des déclarations ouvrant droit à ces deux prestations (lire notre article du 11/07). Contrairement à la réforme des aides au logement de 2021 qui s’est mise en place dans la douleur (lire notre article du 30 janvier 2025), cette nouvelle simplification part sur de bons rails. Les données saisies automatiquement dans les formulaires correspondent à 98% aux revenus réels des bénéficiaires, et 94% des déclarations de ressources ont été validées sans modification des ressources pré-affichées, selon la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf). 

Hausse de 21% des appels

Pour rappel, la réforme modifie la période de référence pour le calcul des droits : elle est décalée d’un mois, sur les mois M-2 à M-4, à la place de M-1 à M-3, afin d’éviter "l’instabilité du dernier mois". Sur les déclarations pré-remplies, le montant net social est automatiquement affiché, alors qu’auparavant, ce sont les bénéficiaires qui devaient saisir cette donnée en consultant leur bulletin de salaire ou en la calculant eux-mêmes. Avec cette nouvelle étape, des interrogations pouvaient donc logiquement émerger parmi les bénéficiaires les moins au fait des règles, c’est-à-dire ceux qui confondaient le salaire net de la fiche de paie avec le montant net social. 

Finalement, les CAF expérimentatrices rapportent "une augmentation moyenne de seulement 21% des appels et de 11,5% de courriels" afin de demander des explications. A la CAF de l’Aube, les peurs se sont vite dissipées. "Notre grande crainte était d’être très débordés", confie son directeur Olivier Suzanne à l’Association des journalistes de l’information sociale (Ajis) en visite à Troyes. Sur 15.450 déclarations de ressources reçues dans l’Aube en octobre 2024, 6,25% ont fait l’objet d’au moins une modification de la part de l’allocataire qui se révèle injustifiée dans la grande majorité des cas, par incompréhension des nouvelles procédures.  

Moins de ruptures de droits à la clé

Le pré-remplissage automatique "va impacter très fortement à la baisse les situations indus", en particulier ceux liés à la prime d’activité, souligne le directeur général de la Cnaf, Nicolas Grivel. L’impact le plus fort devrait concerner la prime d’activité : en 2023, 16,8% des sommes versées à ce titre ont été indûment versées. La nouvelle procédure devrait diminuer les erreurs de déclaration liées au montant net social mais aussi celles liées à d'autres éléments du salaire (heures supplémentaires, acomptes, mois à déclarer). Le pré-remplissage concernera d’abord les renouvellements de déclarations de ressources des bénéficiaires actuels avant de s’étendre aux primo-demandeurs. L’autre simplification dans les tuyaux est la levée prévue de l’obligation à déclarer les "aides et secours financiers réguliers" pouvant venir de proches. Des ressources souvent "mal déclarées", admet Nicolas Grivel, qui sont génératrices de contrôles mais pèsent peu en valeur. 

En réduisant les incertitudes des foyers lors des allocations, la réforme devrait prévenir les ruptures de droits, c’est-à-dire le renoncement au RSA ou à la prime d’activité à la suite d’expériences de trop-perçus, espère la Cnaf. Va-t-elle permettre d’améliorer le non-recours dans l’absolu ? Selon Nicolas Grivel, l’utilisation du DRM (dispositif de ressources mensuelles, fichier qui agrège les données transmises par les employeurs et les différents revenus sociaux) "va nous permettre d’être plus fiables dans la détection de campagnes d’accès aux droits". La suppression du non-recours par une inscription automatique n’est toutefois pas possible car l’éligibilité aux aides dépend d’autres paramètres et exige de devoir demander la prestation afin de la recevoir. 

Plus de fluidité avec les départements

Alors que les départements se montrent plutôt craintifs (lire notre article du 6 février 2024), Nicolas Grivel affirme que l’impact sera "gagnant-gagnant" pour ces collectivités. "La stabilisation des droits peut être un élément de meilleure prévisibilité du fonctionnement et de la façon dont les départements peuvent piloter leurs prestations. Une des difficultés aujourd’hui, c’est que les variations mensuelles des bénéficiaires du RSA sont aussi impactées par les processus sur les indus et les rappels", souligne-t-il. 

Le Collectif Alerte, qui rassemble 37 associations de lutte contre la pauvreté et a été consulté sur cette réforme, "salue une avancée". "Le risque qu'on voit, c'est l'idée de fusionner à terme toutes les allocations en une allocation sociale unique que certains voudraient plafonner à un pourcentage du Smic", relève toutefois son président, Noam Leandri. "Nous le réclamions depuis longtemps, nous sommes en faveur de toute automatisation, tout ce qui évite à l'allocataire des difficultés, comme oublier de remplir une déclaration et les allocations lui sont coupées", a indiqué à l'AFP Delphine Bonjour, responsable de l'accompagnement vers les droits du Secours catholique.

Deux échéances sont fixées par le ministère : le 1er mars pour pour les allocataires CAF relevant du régime général et "d’ici l’été 2025" pour ceux relevant du régime agricole.

 

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