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Jeunesse - Service civique : un succès à double tranchant ?

Un an après le vote de la loi sur le service civique, le dispositif a visiblement bien démarré. Et serait même victime de son succès... Le nombre de contrats budgétés ne permet pas de répondre à la demande, estime Martin Hirsch. Auditionnée à l'Assemblée nationale, la secrétaire d'Etat Jeannette Bougrab ne juge pas utile de rectifier le tir.

Un an précisément après le vote de la loi instituant le service civique, la secrétaire d'Etat à la Jeunesse, Jeannette Bougrab, s'est exprimée à l'Assemblée nationale sur la montée en charge d'un dispositif qui a démarré sur les chapeaux de roue. Rappelant à la fois la rapidité de mise en oeuvre du contrat service civique - loi votée en mars 2010 et premiers contrats signés en juin -, la secrétaire d'Etat a effectué ce 9 mars le tour d'horizon "d'un dispositif innovant" qui semble être victime de son succès...
Des chiffres tout d'abord : 10.000 volontaires au service civique en 2010 (âgés entre 16 et 25 ans, avec ou sans diplôme), 1.000 agréments délivrés par l'Agence du service civique à des structures prêtes à accueillir des volontaires et 40.000 jeunes inscrits sur le site service-civique.gouv.fr dans l'espoir d'une mission. Et des objectifs ambitieux à l'horizon 2014 : 15.000 missions budgétées pour 2011, 20.000 et 25.000 pour 2012 et 2013, et 75.000 missions budgétées par an à partir de 2014. Le tout pour pouvoir atteindre, dans trois ans, 10% d'une classe d'âge.
Là où le bât blesse, c'est qu'aujourd'hui, l'Agence du service civique affirme qu'il manque 10.000 contrats pour satisfaire les demandes d'agrément d'organismes prêts à accueillir des volontaires pour 25.000 missions. Ce que Martin Hirsch, président de l'Agence, a déploré dans la presse : "Un jeune en service civique coûte à peu près 9.000 euros par an en année pleine. Avec un budget de 97 millions pour 2011, je dois étaler les missions de façon à ne pas dépasser le budget." Et le président de réclamer par conséquent une rallonge budgétaire pour 10.000 contrats supplémentaires pour l'année en cours.
La secrétaire d'Etat a réaffirmé l'engagement initial du gouvernement pour 15.000 contrats en 2011, en rappelant ainsi en filigrane à Martin Hirsch que "si rallonge budgétaire il doit y avoir, cela se fera dans cet hémicycle et non par voie de presse". "97 millions d'euros dédiés au service civique pour 2011, c'est un budget en hausse de 140% par rapport à 2010 (…), c'est la moitié du programme 163, c'est 65% du budget jeunesse en 2013", a rappelé la secrétaire d'Etat de sa voix fluette.
Devant certaines propositions de "transferts" de budgets entre missions du ministère de la Jeunesse, la secrétaire d'Etat a déclaré sans ambages qu'elle tenait "à toutes les missions et qu'il était hors de question de déshabiller Paul pour habiller Jacques". Et de répéter que son ambition est de permettre à des jeunes une insertion professionnelle de qualité. Si les chiffres sont favorables - en référence au grand nombre de candidats et d'organismes intéressés par le dispositif -, la qualité des missions (l'accueil et  la formation des jeunes) est indispensable a affirmé la secrétaire d'Etat.  "Je ne veux pas pénaliser les jeunes qui s'engagent, ce contrat doit être connu et reconnu", a insisté Jeannette Bougrab, mettant en avant la nécessité de valoriser cette expérience et ne pas lâcher le jeune dans la nature au terme de sa mission. Et d'affirmer au passage qu'elle "réclame un décret prochain du ministère de l'Enseignement supérieur pour valoriser le service civique dans les parcours universitaires". Ce qu'avait également souligné Martin Hirsch en souhaitant que ce service civique s'intègre dans le cursus universitaire sous forme "de crédits universitaires ou de validation de stage".