Energie - RTE prévoit d'investir 35 à 50 milliards d'euros dans le réseau électrique d'ici à 2030
La facture des travaux à réaliser dans les prochaines décennies pour renforcer le réseau électrique à haute tension augmentera fortement si la France décide de développer les énergies renouvelables, a prévenu le 21 novembre RTE. La filiale d'EDF qui gère le réseau national de lignes à haute tension, c'est-à-dire les grandes artères du réseau électrique, a chiffré les investissements qu'elle devra réaliser d'ici à 2030 pour accompagner l'évolution du système électrique, tablant sur une enveloppe de 35 à 50 milliards d'euros. In fine, ces dépenses sont financées par les consommateurs, le réseau à haute tension pesant à lui seul environ 10% des factures d'électricité des Français (contre 46% pour l'ensemble des réseaux, basse et moyenne tension inclues).
L'éventail très large retenu par RTE, qui figure dans une actualisation de son "schéma de développement décennal", s'explique par le grand écart entre les scénarios pris en compte, alors que le système électrique est à l'aube de profonds bouleversements. Ainsi, dans un scénario "médian" (réduction modeste de l'électricité nucléaire, accompagnée d'une forte hausse des énergies renouvelables), les besoins seraient de "35 à 40 milliards". Mais, dans un "nouveau mix" (une chute du nucléaire et un développement très accéléré de l'éolien et du solaire), la facture grimperait à 50 milliards.
Ce chiffrage devrait éclairer le prochain débat sur la transition énergétique, qui doit aboutir à des recommandations pour atteindre l'objectif que s'est fixé le gouvernement de réduire de 75% à 50% à l'horizon 2025 la part du nucléaire dans la consommation française d'électricité. Or, l'implantation des énergies renouvelables (éolien sur terre et en mer, solaire, hydroliennes...) ne suit pas la même logique que celle des centrales nucléaires, et, selon la recomposition du "bouquet" énergétique national qui sera décidée, il faudra rééquilibrer plus ou moins fortement le réseau électrique et renforcer le "maillage" de telle ou telle région.
A une échéance plus rapprochée, RTE estime que de grands travaux sont également à prévoir. Il faudra ainsi créer ou renforcer au minimum plus de 2.000 km de lignes à très haute tension (THT) d'ici à 10 ans, et investir 15 milliards d'euros d'ici à 2020. La filiale d'EDF prévoit aussi la mise en service de 73 nouvelles lignes à haute tension entre 2013 et 2015, dont 63 seront souterraines, et investira sur cette période environ 1,5 milliard d'euros par an. Il s'agit notamment de renforcer les liaisons aux frontières (qui permettent de combler les besoins du pays en électricité durant les pics de consommation hivernaux et d'exporter le reste de l'année), mais aussi de restructurer les liaisons dans le Massif central, ainsi que de renforcer le réseau dans le Grand Est et entre la Normandie et l'Ile-de-France. RTE souligne au passage qu'il s'agit d'un "socle d'investissements invariants", indispensables à l'approvisionnement électrique du pays (notamment pour accroître les capacités d'échange d'électricité avec les pays voisins). Et ce socle devra être complété en fonction des "options retenues à l'issue du débat sur la transition énergétique", prévient le gestionnaire du réseau.
RTE mène déjà des travaux d'envergure. Il est notamment en train d'achever la très contestée ligne THT Cotentin-Maine, qui reliera le futur réacteur EPR de Flamanville (Manche) au réseau national, et construit une liaison électrique souterraine franco-espagnole à travers les Pyrénées-Orientales.
A.L. avec AFP
EcoWatt reconduit en Bretagne et en Paca
RTE a annoncé le 22 novembre la réactivation pour la saison 2012-2013 du dispositif d'information et d'alerte EcoWatt, qu'il mène en partenariat avec l'Etat, des collectivités locales, ERDF, gestionnaire du réseau électrique de proximité, et l'Ademe. Cette démarche a été initiée en 2008 en Bretagne et en décembre 2010 sur la Côte d'Azur (Var, Alpes-Maritimes et principauté de Monaco) afin de réduire les risques de coupures d'électricité généralisées durant l'hiver. En effet, du fait de l'équipement massif des logements français en radiateurs électriques, toute chute des températures fait grimper brutalement la consommation d'électricité, surtout lors des deux pointes journalières d'utilisation du courant (fin de matinée et début de soirée). Or, dans de telles situations, la Bretagne et la Côte d'Azur se retrouvent particulièrement exposées aux risques de pannes électriques, à cause d'une faible production d'électricité locale et de connexions limitées au reste du réseau électrique national. EcoWatt vise donc à atténuer ce risque en appelant les habitants de ces régions (ainsi que les collectivités, entreprises et associations) à modérer volontairement leur consommation de courant lors des périodes de grand froid, via des alertes par divers canaux (SMS, courriels, réseaux sociaux...).
En
Provence, EcoWatt compte plus de 12.000 abonnés. En
Bretagne, il totalise plus de 45.000 inscrits aux alertes, et 160 chartes d'engagement ont été signées par des collectivités, entreprises et institutions. La priorité cette année est d'ailleurs de mettre l'accent sur les entreprises grâce à un partenariat avec la chambre de commerce et d'industrie. RTE estime que le dispositif a permis de réduire la consommation locale d'électricité jusqu'à 2 à 3% aux heures les plus chargées, soit l'équivalent de la consommation cumulée des villes de Quimper, Saint-Malo et Vannes. Parallèlement, un plan d'action Etat-région, le "pacte électrique breton", a été lancé en décembre 2010 pour renforcer l'approvisionnement électrique de la région, via des investissements dans les réseaux et la production locale d'énergie. Dans ce cadre, un projet de centrale électrique à gaz à Landivisiau (Finistère) a été attribué en début d'année au consortium Poweo Direct Energie/Siemens pour une entrée en service fin 2016. RTE a aussi lancé en Bretagne une expérimentation inédite en France, destinée à mobiliser davantage les réserves privées dormantes de production (groupes électrogènes, méthaniseurs...) et d'effacement (reports volontaires de consommation d'électricité, NDLR) pendant les grands froids, via des contrats permettant de rémunérer leur mise à disposition.
De même, dans le Sud-Est, RTE a lancé en juin un projet de grande envergure destiné à doter le Var et les Alpes-Maritimes d'un "filet de sécurité" électrique. Ce chantier de 200 millions d'euros prévoit la création d'ici à 2015 de trois lignes souterraines sur 107 km, pour assurer des "itinéraires bis" en cas d'arrêt inopiné de la ligne à très haute tension qui alimente la zone, et pour augmenter les livraisons de courant lors des pics de consommation. Selon RTE, une quinzaine de kilomètres de tranchées a déjà été réalisée. Par ailleurs, la mise en route fin août par EDF du premier des deux cycles combinés gaz de la centrale électrique de Martigues (Bouches-du-Rhône) va renforcer l'alimentation de la région, les centrales à gaz permettant d'ajuster de manière très flexible l'offre d'électricité en fonction de la demande.
A.L. avec AFP