Insertion - RSA : des caractéristiques d'emploi très variables selon le sexe et la configuration familiale
Dans le dernier numéro de sa lettre d'information "L'e-ssentiel", la Caisse nationale d'allocations familiales (Cnaf) aborde la question du RSA sous un angle original : l'impact du sexe des bénéficiaires sur leur situation au regard de l'emploi. Intitulée "Revenu de solidarité activité des hommes et des femmes : des caractéristiques d'emploi différenciées", elle aboutit à une conclusion, à première vue, surprenante : "Si une grande majorité des bénéficiaires du RSA sont sans emploi, l'absence de revenu d'activité professionnelle se concentre plus particulièrement sur les femmes en couple et les hommes seuls, alors que l'emploi concerne au contraire davantage les hommes en couple et les femmes seules".
Des situations à fronts renversés
L'étude commence par souligner l'impact et la nécessaire prise en compte d'un biais mécanique : le lien entre l'éligibilité au RSA et son montant, d'une part, et la configuration familiale du foyer, d'autre part. Ce préalable posé, elle rappelle que 57% des bénéficiaires du RSA sont des femmes : 18% sont en couple (dont 4% sans enfant), 14% sont isolées sans enfant et 24% sont parent isolé. Parmi les 43% d'hommes, 24% sont isolés sans enfant et seulement 1% en foyer monoparental.
Toutes situations confondues, seuls 36% des hommes et des femmes bénéficiaires du RSA perçoivent des revenus d'activité. Mais le fait d'être en couple a un impact très différent sur les femmes et les hommes. Ainsi, seules 23% des femmes en couple allocataires du RSA disposent de revenus professionnels, contre 48% des hommes en couple. A l'inverse, parmi les bénéficiaires isolés du RSA, 42% des femmes affichent des revenus professionnels, contre 29% des hommes.
De façon surprenante, la présence d'un enfant ne modifie pas ce constat. Avec un enfant à charge, par exemple, 47% des femmes isolées bénéficiaires du RSA ont des revenus d'activité professionnelle, contre 26% des femmes en couple. Seule la présence d'un enfant à charge de moins de trois ans fait chuter ces taux (respectivement 23% et 13%), de même que le fait d'avoir à charge trois enfants et plus (20% et 14%).
L'homme monoactif, modèle dominant
Au sein des couples, le modèle dominant est donc celui de l'homme monoactif. Par exemple, dans le cas du RSA activité seul, 78% des couples bénéficiaires sont monoactifs et - dans 61% de ces cas - c'est l'homme qui est en emploi à temps complet. Comme le remarque l'étude, "ce modèle dominant de la monoactivité masculine pour les couples bénéficiaires du RSA interroge la capacité du barème du RSA à encourager l'emploi des femmes en couple". Plus précisément, le barème ne tient pas compte des coûts induits par la biactivité - notamment ceux liés aux modes de garde -, ce qui pénalise les femmes.
Mais les différences ne s'arrêtent pas là. Elles se retrouvent par exemple dans les caractéristiques de l'emploi. Ainsi, 69% des femmes bénéficiaires du RSA occupent un emploi à temps partiel, contre 32% des hommes (pour respectivement 30% et 7% en population générale). Contrairement au taux d'activité, cet écart hommes/femmes sur le temps partiel n'est pas sensible à la configuration familiale.
En revanche, parmi les bénéficiaires du RSA occupant un emploi salarié, la part des CDI est quasi identique pour les deux sexes (57% pour les hommes et 55% pour les femmes). C'est alors la situation du foyer qui devient discriminante : parmi les salariés bénéficiaires du RSA ayant des enfants, 70% des hommes en couple occupent un emploi en CDI, alors que les femmes en couple ne sont que 54% dans cette situation et les femmes en foyer monoparental 55%. C'est l'inverse chez les bénéficiaires isolés, parmi lesquels les femmes seules occupent plus souvent un emploi à durée indéterminée que les hommes seuls, quel que soit le nombre d'enfants à charge.
L'accompagnement ne rétablit pas l'équilibre
Enfin, les comportements de recherche d'emploi de bénéficiaires du RSA diffèrent également selon la configuration familiale et le sexe. Parmi les bénéficiaires sans emploi, les hommes sont plus souvent en situation de recherche (78%) que les femmes (53%). Et, parmi ces dernières, les femmes isolées sont davantage à la recherche d'un emploi que celles en couple, qu'elles aient ou non des enfants à charge.
L'accompagnement "vers et dans l'emploi" - en principe obligatoire pour les bénéficiaires du RSA socle - devrait contribuer à rétablir un certain équilibre entre les sexes. Mais cela ne semble guère être le cas, puisque 48% des femmes et 44% des hommes disent avoir bénéficié d'une aide depuis leur entrée dans le dispositif (aide aux démarches, santé, transports, logement, formation...)...