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PLF 2017 - Ressources des régions, dotations, péréquation : pluie de nouveautés à l'Assemblée

L'Assemblée nationale a examiné en séance, le 14 novembre, les dispositions de la deuxième partie du projet de budget pour 2017 sur les finances des collectivités territoriales. Le gouvernement a profité de la discussion pour présenter de nombreux amendements visant notamment à accompagner la mise en oeuvre de la réforme territoriale. L'un d'eux met en oeuvre l'engagement du Premier ministre de doter les régions d'une part de TVA en remplacement de leur dotation globale de fonctionnement et de prendre en charge le financement de leurs nouvelles compétences en matière de développement économique. Un autre amendement du gouvernement adapte le fonctionnement du fonds de péréquation du bloc communal à la nouvelle carte intercommunale. Les députés ont eux aussi initié plusieurs nouveautés en matière de dotations et de péréquation. Localtis fait le point sur les principales mesures adoptées.

Les nouvelles ressources des régions
Le Premier ministre avait promis aux régions, lors de leur congrès de Reims, le 29 septembre, l'affectation de nouvelles ressources (voir notre article du 30 septembre 2016 : Les régions mettent le pied dans la porte du fédéralisme). Ses promesses sont respectées. L'Assemblée nationale a en effet adopté un amendement gouvernemental, qui prévoit qu'à compter de 2018 la dotation globale de fonctionnement (DGF) des régions sera remplacée entièrement par une fraction de recettes de TVA. Celle-ci "évoluera en fonction de l'évolution du produit de la TVA perçu chaque année", précise l'exposé des motifs annexé à l'amendement.
Le même amendement institue en 2017 un fonds de soutien exceptionnel de 450 millions d'euros destiné à aider les régions à faire face à leurs nouvelles compétences en matière de développement économique. Le dispositif est organisé en deux temps. 200 millions d'euros seront versés en 2017. Puis, une seconde enveloppe, d'un montant maximal de 250 millions, sera répartie entre les régions qui "attesteront d'une progression, au 31 décembre 2017, de leurs dépenses" en matière de développement économique.
Le fonds sera réparti essentiellement (70%) en fonction de la moyenne des dépenses effectuées en matière de développement économique par les départements entre 2013 et 2015, les autres critères étant la richesse du territoire (15%) et la population (également 15%). Auvergne-Rhône-Alpes bénéficiera jusqu'à 61 millions d'euros de recettes au total, soit plus que l'Ile-de-France (55 millions d'euros), ou la Nouvelle-Aquitaine (50 millions). A noter : en 2018, des recettes de TVA remplaceront le fonds de soutien.
Avec ces mesures, l'autonomie financière enregistre un "progrès considérable", s'est félicité le ministre en charge des collectivités territoriales.
A noter : les députés ont repoussé un amendement prévoyant d'annuler le transfert d'une part de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) départementale vers le conseil régional en Ile-de-France pour financer les transports publics. Soutenus par les présidents des départements franciliens, les auteurs défendaient que le transfert est prévu "sans que la compétence elle-même ait été transférée" (voir notre article du 9 novembre 2016, CVAE : cinq présidents de département LR d'Ile-de-France s'opposent à Valérie Pécresse.

Dotations de l'Etat aux collectivités
La hausse des dotations de péréquation communales, ainsi que l'augmentation des dotations liées à la croissance démographique et aux évolutions intercommunales seront financées par un prélèvement sur les communes les plus favorisées, calculé en fonction de leurs recettes réelles de fonctionnement. Plafonné à 1%, ce prélèvement remplacera l'écrêtement de 3% de la dotation forfaitaire des communes favorisées qui existe aujourd'hui et que le gouvernement proposait de relever à 4%. Tel est le sens d'un amendement déjà validé par la commission des finances, que l'Assemblée nationale a adopté. "Tout cela va se traduire par des plus et des moins, pour des communes aussi bien rurales qu'urbaines", a indiqué Christine Pires Beaune, rapporteur spéciale et auteur de l'amendement. Parmi les gagnants, la députée a cité la ville de Lille, qui verra son écrêtement passer de 483.000 euros à 108.000 euros. En revanche, les communes de moins de 5.000 habitants seront perdantes, puisqu'elles seront prélevées de 5 millions d'euros supplémentaires.
L'Assemblée nationale a donné son feu vert aux amendements des commissions des finances et des lois qui permettent aux communes nouvelles créées au plus tard le 1er janvier 2017 et qui respectent certaines conditions de taille, de bénéficier des incitations financières mises en place par le législateur. Les communes concernées par les projets de communes nouvelles ont jusqu'à la fin de l'année pour délibérer, alors que la version initiale du projet de loi de finances fixait une date butoir au 30 octobre 2016.
La dotation de solidarité urbaine (DSU) sera versée mensuellement, au lieu, actuellement, d'un versement annuel unique, réalisé avant la fin du troisième trimestre. La mesure "permettra aux communes éligibles de disposer d'une ressource régulière dès le début de l'année", ce que les députés ont salué. Elle s'appliquera dès l'an prochain, à l'instar de la réforme de la DSU.
Les députés ont rétabli l'éligibilité à la part "bourg-centre" de la dotation de solidarité rurale (DSR) des communes qui l'avaient perdue avec le retrait de leur qualité de chef-lieu d'arrondissement.
Contre l'avis du gouvernement, les députés ont adopté un amendement qui élargit la communication au public des données utilisées pour la répartition des dotations de l'Etat aux critères individuels retenus. Le ministre en charge des collectivités territoriales proposait des discussions, en liaison avec le nouvel observatoire des finances et de la gestion publique locales, pour "voir ensemble ce qu'il est nécessaire et utile de faire".
Les députés ont pris une mesure pour que les communautés d'agglomération créées en 2016 ou en 2017 ne soient pas lésées en matière de dotation d'intercommunalité du fait des évolutions de la carte intercommunale.
Plusieurs députés de Seine-Saint-Denis ont déposé un amendement proposant de calculer le potentiel fiscal des communes du Grand Paris à l'échelle des établissements publics territoriaux et non de la métropole. Pointant le risque d'une diminution "considérable" des dotations des communes les plus pauvres, ils ont été entendus.
Contre l'avis de la rapporteur spéciale, un autre amendement du gouvernement a été adopté pour revoir à la baisse (de 7,5 millions d'euros en 2016 à 3,2 millions d'euros en 2017) la contribution de la Corse au redressement des finances publiques, dont le montant par habitant a été jusqu'ici plus élevé qu'ailleurs.
L'Assemblée nationale a aussi clarifié les règles d'attribution de la dotation de soutien à l'investissement local.

Fonds de péréquation
Les élus locaux redoutent les effets de l'entrée en vigueur de la nouvelle carte intercommunale le 1er janvier 2017 sur le fonctionnement du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (Fpic). Les effets seront en effet sans doute considérables. Sans présenter de simulations, le gouvernement a fait adopter un amendement qui prend en compte cette nouvelle donne. Il introduit une nouvelle méthode de calcul de la garantie accordée aux ensembles intercommunaux qui perdent leur éligibilité au Fpic. Il apporte également une solution à la situation des communes riches qui se trouvent dans des intercommunalités pauvres et en tirent un effet d'aubaine.
Le député-maire de Sarcelles, François Pupponi, qui réclamait une hausse de 20 millions d'euros du fonds de solidarité des communes de la région d'Ile-de-France (Fsrif) en 2017 (de 290 millions à 310 millions d'euros) a obtenu gain de cause. Le projet de loi de finances prévoyait jusque-là le maintien du montant du fond.

Autres mesures
Un amendement du gouvernement, que les députés ont validé, va permettre d'assouplir, notamment en cas de changement de périmètre des groupements de communes, les modalités de détermination et de révision des attributions de compensation versées par les communautés à leurs communes membres. Un autre amendement gouvernemental, lui aussi validé, permettra d'adapter, pour les départements, le mécanisme de garantie exceptionnelle de perte de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) prévu par le Fonds national de péréquation de la CVAE, afin de "le rendre opérationnel pour 2017".

Les députés ont validé la suppression des dispositions de la loi de finances pour 2016 qui programmait une réforme de la DGF des communes et communautés au 1er janvier 2017. La réforme trouvera sa place "dans le projet de loi de financement des collectivités locales qui sera présenté avec le projet de loi de finances 2018", a indiqué Jean-Michel Baylet.
La droite s'est opposée à la réduction des concours financiers aux collectivités, Patrick Weiten dénonçant pour l'UDI une poursuite de "la diminution sans précédent des concours financiers de l'Etat au profit des collectivités" et Damien Abad (LR) "une gauche castratrice avec les collectivités".

Les explications de vote et le vote des députés sur le projet de loi de finances pour 2017 auront lieu le 22 novembre.

Thomas Beurey / Projets publics

CNFPT: le gouvernement opposé au retour de la cotisation à 1%
Le gouvernement n'entend pas revenir sur la baisse de la cotisation due par les collectivités territoriales au Centre national de la fonction publique territoriale (de 1% à 0,9% de la masse salariale) décidée dans la loi de finances pour 2016.
Le CNFPT réclame un retour au 1% pour lui permettre de financer de nouvelles compétences que le législateur lui a confiées. Il assure aussi qu'il sera en déficit de près de 45 millions d'euros à la fin de l'année, malgré des efforts de gestion importants. Mais, pour le gouvernement, ces prévisions "apparaissent pessimistes". "Les réserves du CNFPT se sont encore accrues – elles sont passées de 55 à 70 millions d'euros – et ses recettes restent dynamiques", a indiqué le ministre en charge des collectivités territoriales. De ce fait, "le maintien du plafond de cotisations à 0,9% apparaît soutenable", a poursuivi Jean-Michel Baylet. T.B. / Projets publics