Environnement - Réseaux d'eau : la réglementation sur la maîtrise des fuites commence à porter ses fruits
Le 6e rapport national de l’Observatoire des services publics d’eau et d’assainissement qui vient d’être publié et porte sur des données 2014 montre que le décret Fuites qui s’applique depuis 2013 a conduit les collectivités à améliorer la connaissance de leurs réseaux. Mais au-delà des seules exigences réglementaires, des progrès restent à faire. Par ailleurs, le document montre que le prix de l'eau et de l'assainissement collectif connaît toujours d'importants écarts d'une région à l'autre et selon le mode de gestion choisi.
"Un bilan encourageant de la conformité des services au décret ‘fuites’" : c’est l’un des principaux enseignements du 6e rapport national de l’Observatoire des services publics d’eau et d’assainissement qui vient d’être publié par l’Agence française pour la biodiversité, qui intègre désormais l’Office national pour l’eau et les milieux aquatiques (Onema). Fondé sur des données 2014, ce document fait pour la première fois état de l’application de toutes les dispositions du décret entré en vigueur en 2013 qui a pour objectif de réduire les fuites dans les réseaux d’eau potable en imposant aux collectivités locales de mieux connaître leurs réseaux et d’avoir un seuil minimum de rendement.
En 2015 ont été appliquées les premières pénalités prévues pour non réalisation des descriptifs détaillés des réseaux. Elles concernent les services d’eau potable qui n’ont pu acquérir une connaissance suffisante de leur réseau. "Ces services sont majoritairement ruraux et de petite taille", constate ainsi l’Observatoire qui note en outre que le taux de non-conformité est en baisse sensible (20% des services en 2014 contre 34% en 2013) et qu’avec 20% de services concernés en 2014, la non-atteinte du rendement seuil (rendement minimum à respecter par chaque service) reste stable par rapport à l’année précédente.
Performance à améliorer
Globalement, la connaissance des réseaux d’eau potable, exprimée au travers de l’ICGP, a connu une progression notable : de 79 points en 2013, elle est évaluée à 90 points en 2014. Mais ces évolutions restent à concrétiser en termes de performance car à l’échelle nationale, avec un rendement moyen des réseaux de distribution de 79,3%, le volume d’eau potable perdu par fuites est estimé à environ un milliard de mètres cubes par an. La connaissance des réseaux d’assainissement reste quant à elle stable (50 points en 2014 contre 51 en 2013). Le rapport s’est aussi intéressé, en procédant à une analyse approfondie de l'IGCP de quelque 4.460 services (la moitié du linéaire du réseau français), au degré de connaissance de ce patrimoine au-delà des obligations réglementaires. D’où il ressort que pour un tiers des réseaux, la localisation des branchements et la caractérisation des compteurs sont peu ou pas connus. De plus, moins de la moitié des réseaux a été étudiée en vue de l’établissement d’un programme de renouvellement.
Place de l'intercommunalité
Alors que la loi Notr du 7 août 2015 a initié une profonde mutation dans l’organisation des collectivités en charge de l’eau et de l’assainissement – au 1er janvier 2020, cette compétence passera de l’échelon communal à l’échelon intercommunal au travers des EPCI à fiscalité propre et des syndicats mixtes -, le rapport s’est aussi intéressé à la place qu’occupait l’intercommunalité dans ce domaine, toujours à partir des données 2014. Un an avant l’adoption de la loi, 51,6% des communes avaient transféré toutes leurs compétences eau et assainissement (contre 50,1% en 2013 et 49,2% en 2010). Au fur et à mesure des adhésions communales, les EPCI à fiscalité propre ont aussi affaire sur leur territoire à un nombre croissant d’opérateurs et ont à gérer de plus en plus de contrats : 2,45 contrats d’eau potable en moyenne en 2014 (contre 2,27 en 2013) et 1,98 contrats d’assainissement collectif (contre 1,86 en 2013). Dans l’attente du transfert de toutes les compétences au sein des EPCI à fiscalité propre, seulement 5% des collectivités étaient en 2014 simultanément en charge de l’eau potable et de l’assainissement collectif et non collectif.
Les prix à la loupe
Côté prix, on note que le prix moyen TTC de l’eau potable et de l’assainissement collectif au 1er janvier 2015 s’établit à 3,98 euros/m³ pour une consommation annuelle de 120 m³ - 2,05 euros/m³ pour le prix de l’eau potable et 1,93 euros/m³ pour celui de l’assainissement collectif. Cela représente une facture annuelle de 477,60 euros, soit une mensualité de 39,80 euros. En un an, le prix de l’eau potable a augmenté de 1% et celui de l’assainissement collectif de 2,1%.
Les collectivités de taille intermédiaire (entre 1.000 et 10.000 habitants) sont celles qui proposent en moyenne le tarif le plus élevé (entre 4,20 et 4,30 euros/m³). De manière générale, le prix moyen pratiqué par les communes gestionnaires (3,68 euros/m³) est inférieur à celui des EPCI (4,07 euros/m³). En outre, le prix moyen pratiqué par les services en régie est inférieur de près de 10% à celui des services en délégation (3,77 euros/m³ contre 4,17 euros/m³). Pour 80% de la population, le prix de l’eau potable est compris entre 1,59 euros/m³ et 2,59 euros/m³ alors que celui de l’assainissement collectif varie plus largement (entre 1,26 euros/m³ et 2,73 euros/m³). Dans la facture globale de l’eau, la part fixe représente en moyenne 14% du tarif (66,8 euros/an) et la part variable 86% (410,7 euros/an). Pour cette même facture, les parts correspondant aux charges directes de l’eau potable et de l’assainissement collectif sont respectivement de 39% et de 38%. La proportion de taxes et de redevances diverses pour compte de tiers est de 23%.
Le rapport fait aussi état des écarts de prix d’une région à l’autre qu’il explique par des "facteurs de contexte" (complexité technique du service, provenance des eaux, sensibilité du milieu récepteur, dispersion de l’habitat, pression touristique, etc.) mais aussi par des choix politiques en matière de gestion et de qualité de service. Globalement, le prix de l’eau est plus élevé au nord d’une diagonale allant du Sud-Ouest au Nord-Est. Les prix moyens les élevés sont en Martinique (5,53 euros/m³), dans le Nord-Pas-de-Calais (4,57 euros/m³), en Bretagne (4,49 euros/m³) et en Haute-Normandie (4,48 euros/m³). A l’opposé, les régions qui affichent les prix moyens les plus faibles sont Provence-Alpes-Côte d’Azur (3,50 euros/m³), Mayotte (3,36 euros/m³) et la Réunion (2,66 euros/m³).