Finances locales - Répartition de la baisse des dotations et péréquation : les propositions du CFL déjà bien ébauchées
D'une même voix, les membres du Comité des finances locales (CFL) ont demandé, le 16 juillet, que le gouvernement réexamine son plan de baisse des dotations de 11 milliards d'euros entre 2015 et 2017. Objectif des élus : obtenir la réduction du montant de la baisse et son rééchelonnement (voir ci-contre notre article du 16 juillet 2014). En revanche, tous n'ont pas apporté leur soutien à la décision de reporter à début septembre le moment de se prononcer sur les modalités de répartition de la baisse des dotations et sur l'évolution de la péréquation. Certains membres se sont abstenus, dont les proches de l'Assemblée des communautés de France (le président de la communauté d'agglomération Orléans Val de Loire, Charles-Eric Lemaignen entre autres).
A l'ADCF en effet, on se dit "perplexe" quant à cette décision de temporiser. En arrêtant ses positions à la rentrée, le CFL "interviendra sur des positions qui seront déjà consolidées", sachant qu'administrations, gouvernement, parlementaires vont, eux, "continuer à travailler". Cela sera alors "beaucoup plus compliqué", explique l'association, qui se démarque donc, des autres associations d'élus locaux, comme celles des maires de grandes villes et des communautés urbaines. Dans un communiqué diffusé ce 17 juillet, ces deux associations "se félicitent" en effet que le CFL ait voté "pour que le réexamen du plan de réduction des dotations de l’Etat soit un préalable à toute discussion sur les modalités de répartition de cette baisse".
Lors de leur réunion de rentrée, les membres du CFL débuteront en tout cas leurs débats en prenant appui sur les travaux préalables du groupe de travail qui s'est réuni entre le 2 et le 9 juillet. Malgré un calendrier très court, ces réunions ont permis d'aborder en détail les principales questions posées au CFL.
Encore des débats sur le secteur communal
Il est ainsi envisagé, à ce stade, de reconduire l'année prochaine les modalités utilisées en 2014 pour répartir la baisse des dotations entre les collectivités (poids des recettes de la catégorie collectivités dans les recettes totales du secteur public local). Cette règle conduirait le secteur communal à prendre à sa charge 56% des 3,67 milliards d'euros que le gouvernement entend retirer aux collectivités, soit 2,07 milliards d'euros. L'effort respectif des communes et des intercommunalités à fiscalité propre serait déterminé par la part de leurs recettes réelles de fonctionnement. En notant que, d'après le groupe de travail, les quelque 8,5 milliards d'euros d'attributions de compensation versés par les EPCI aux communes doivent être considérés comme une recette de ces EPCI. Mais l'ADCF conteste cette interprétation et tentera certainement, par le biais des présidents d'EPCI membres du CFL, d'empêcher qu'elle ne soit retenue dans la délibération de l'instance.
Le groupe de travail a souhaité aussi que la répartition entre les communes prenne en compte, pour moitié, la richesse de la collectivité (potentiel fiscal) et, également pour moitié, le revenu par habitant. Mais cette option ne fait pas l'unanimité. Une prise de position de Gilles Carrez, vice-président du CFL et président de la commission des finances de l'Assemblée nationale, contre cette orientation, pourrait conduire au retour en grâce des modalités appliquées cette année (recettes réelles de fonctionnement). Des modalités qu'il est d'ailleurs d'ores et déjà envisagé de préconiser pour la baisse de la dotation d'intercommunalité.
Une réforme de la DSU en gestation
Concernant les départements, il y a a priori moins de difficultés. Il est proposé de reconduire pour 2015-2017 les modalités de répartition ayant servi en 2014 (baisse tenant compte en particulier du revenu par habitant). Pour les régions aussi, il n'est pas prévu de changement : comme en 2014, les recettes totales serviraient de critère au calcul des économies que l'Etat ferait sur les dotations de chaque région.
En matière de péréquation, le groupe de travail a également dégagé des principes très clairs : passage du Fonds de péréquation intercommunal et communal (Fpic) de 570 millions d'euros cette année à 780 millions d'euros en 2015 (comme le prévoit la loi), croissance des dotations de péréquation destinées aux communes dans des proportions identiques à celles de 2014 (109 millions d'euros en plus). En outre, une montée en puissance du critère du revenu par habitant dans le Fpic est sur la table (celui-ci passant de 25% à 30%, voire 35%). "Les échanges s'annoncent assez vifs sur le sujet, certains élus considérant que ce critère n'est pas pertinent dans tous les cas", indique Laurence Tartour, chargée de mission finances à l'Association des petites villes de France (APVF).
Un recentrage de la dotation de solidarité urbaine (DSU) sur la moitié des villes de plus de 10.000 habitants (soit 491), au lieu des trois quarts (soit 736) actuellement, est également proposé. Le CFL devra dire s'il souhaite accompagner cette réforme du maintien ou, au contraire, de la suppression de la "DSU cible", un dispositif qui permet aux 250 communes urbaines les plus pauvres de bénéficier en priorité de la croissance de la DSU (voir notre article du 10 juillet).
Concernant la péréquation entre départements, le groupe de travail du CFL s'est prononcé pour la reconduction en 2015 du Fonds de solidarité créé en 2014 et reposant sur les droits de mutation des départements. Il a souhaité par ailleurs des simplifications dans les dispositifs de péréquation existants.
Rencontre, fin juillet, avec le gouvernement ?
Avec la décision du CFL de reporter à la rentrée l'examen des modalités de répartition de la baisse des dotations, le rendez-vous des élus locaux avec le Premier ministre, qui était envisagé avant les congés d'été, ne semble plus d'actualité. Le dialogue n'est toutefois pas rompu avec le gouvernement. La ministre en charge de la Décentralisation, Marylise Lebranchu, vient d'inviter les responsables des associations d'élus locaux à une réunion, qui se tiendrait le 29 ou le 30 juillet. Certains élus s'interrogeraient toutefois sur l'utilité d'une telle rencontre. Ils avaient été forts déçus du rendez-vous du 24 juin avec trois membres du gouvernement sur ce thème des finances locales. Ils ne voudraient pas que la nouvelle réunion soit du même acabit.
Pour le gouvernement, la question de la concertation avec les élus locaux est un sujet sur lequel il faut en tout cas progresser. Il envisagerait en effet d'inscrire dans le prochain projet de loi de programmation des finances publiques la création d'une "instance de dialogue national des territoires". Le directeur général des collectivités locales l'a indiqué devant le CFL le 16 juillet. Cette annonce devrait satisfaire les associations d'élus locaux (en particulier l'APVF), qui étaient favorables au projet de haut conseil des territoires avant que celui-ci ne soit torpillé par le Sénat.