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Industrie - Rejetée par le Sénat, la "loi Florange" repart à l'Assemblée

Suite au rejet par le Sénat, la commission mixte paritaire n'a pas réussi à se mettre d'accord le 5 février 2014 sur la proposition de loi visant à reconquérir l'économie réelle, dite "loi Florange". Le texte, qui prévoit des pénalités en cas de fermeture de site rentable, devrait repasser entre les mains de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, et être discuté en séance publique dans la semaine du 17 février. Reste à savoir s'il aura le temps d'être réexaminé par le Sénat, avant la pause prévue pour les élections municipales.

La commission mixte paritaire (CMP) n'a pas réussi à trouver un accord sur la proposition de loi visant à reconquérir l'économie réelle. Elle s'est réunie le 5 février 2014, suite au rejet du texte, dans la nuit du 4 au 5 février, par le Sénat. Le texte devrait à nouveau être discuté en commission des affaires économiques à l'Assemblée nationale la semaine prochaine et débattu en séance publique la semaine du 17 février. Reste à savoir si la proposition de loi pourra ensuite être discutée au Sénat, avant la suspension des travaux parlementaires prévue dans le cadre des élections municipales.
Adopté en octobre à l'Assemblée nationale, le texte a été rejeté au Sénat avec 159 voix pour (PS, RDSE et écologistes), et 166 voix contre, à droite (UMP et UDI-UC). Les membres du groupe communiste, républicain et citoyen (CRC) s'étaient quant à eux abstenus, estimant que le texte n'allait pas assez loin. "Cette proposition de loi constitue une réponse largement insuffisante à un problème réel, a signalé Laurence Cohen, sénatrice CRC du Val-de-Marne, durant les discussions le 4 février, quand les plans sociaux se multiplient, quand la désindustrialisation gagne, on pouvait espérer mieux. Une fois de plus, nous restons au milieu du gué."
Cette proposition de loi, dite "loi Florange", était une promesse de campagne de François Hollande. L'idée était alors de faire pression sur ArcelorMittal, avant la fermeture de ses sites de Florange.
Examiné dans le cadre d'une procédure accélérée, le texte propose d'obliger les dirigeants d'entreprises de plus de 1.000 salariés à rechercher un repreneur pendant trois mois quand ils souhaitent fermer un site industriel rentable. Dans le cas contraire, il prévoit des mesures de sanction. Ainsi, les entrepreneurs qui ne joueraient pas le jeu seraient condamnés à verser une pénalité pouvant atteindre 20 Smic mensuels par emploi supprimé, mais pas plus de 2% de son chiffre d'affaires. Les entrepreneurs pourraient aussi être amenés à rembourser les aides publiques qu'ils ont reçues lors des deux dernières années.
Trop contraignantes ou pas assez lourdes, les mesures ont été rejetées à la fois par les sénateurs de droite et les sénateurs communistes. Catherine Procaccia, sénatrice UMP du Val-de-Marne, a ainsi estimé que l'article 1er, qui formalise l'obligation pour les employeurs, reste difficilement acceptable. "Il constitue une atteinte évidente à la liberté d'entreprendre", a-t-elle affirmé, insistant sur le caractère "extrêmement élevé et dissuasif" de la pénalité. "L'Assemblée nationale a prévu une double peine puisque l'entreprise peut être contrainte à rembourser tout ou partie des aides financières publiques qui lui ont été versées. Ce dispositif créera un inévitable effet repoussoir", a encore souligné Catherine Procaccia.

Pas d'objectif punitif, d'après Pierre Moscovici

Pour Isabelle Debré, sénatrice UMP des Hauts-de-Seine, "ce texte renforce la complexité de notre droit", et risque aussi de décourager les investisseurs étrangers. "Imaginez la réaction d'un investisseur étranger quand il lira qu'il devra 'informer par tout moyen approprié, des repreneurs potentiels de son intention de céder son entreprise' !", a ainsi argumenté Isabelle Debré, mentionnant la baisse de 77% des investissements étrangers en France constatée récemment par les experts de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced). Quand, à l'inverse, les investissements étrangers ont progressé de 11% dans le monde et de 37% en Europe…
Sur les bancs des sénateurs communistes en revanche, les pénalités sont considérées comme insuffisantes. Dominique Watrin, sénateur CRC du Pas-de-Calais, les considère ainsi trop basses. "L'employeur qui refuse à tout prix la vente d'un site anticipera le coût de la pénalité dans le plan social", a-t-il assuré, tandis que Laurence Cohen a listé les moyens pour les entreprises de contourner le dispositif, dont notamment le détachement de la maison mère.
Pour le ministre de l'Economie, le texte "ne poursuit pas un objectif punitif ; il vise à généraliser les bonnes pratiques, à favoriser le dialogue avec les partenaires sociaux. Il sanctionnera les seuls comportements qui ne sont pas vertueux", a ainsi indiqué Pierre Moscovici, insistant sur l'urgence de la situation : une baisse de la part de l'industrie dans la valeur ajoutée de la France de 18% à 12,5% en dix ans, et de l'emploi industriel de 26% à 12%... 750.000 emplois ont ainsi été perdus dans le secteur industriel.