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Environnement - Réhabilitation des sites et sols pollués : la dépense a doublé en dix ans

Evaluée à 470 millions d'euros en 2010, la dépense de réhabilitation des sites et sols pollués a plus que doublé en 10 ans, selon une étude que vient de publier le Commissariat général au développement durable (CGDD). Pour être considéré comme pollué, le foncier doit "présenter un risque pérenne, réel ou potentiel, pour la santé humaine ou l'environnement du fait d'une pollution résultant d'une activité actuelle ou ancienne sur ce site", rappelle le CGDD qui précise qu'"une part significative des 4.100 sites pollués actuellement recensés doit encore faire l'objet de diagnostics".
L'évolution des dépenses de réhabilitation de sites et sols pollués "n'est pas régulière [...], subissant les aléas de la conjoncture", note l'étude, remarquant que sur les 470 millions d'euros dépensés en 2010, 310 millions sont dus aux travaux de dépollution et 160 millions à l'ingénierie. A noter, dans les comptes de dépenses pour la protection de l'environnement, les dépenses de réhabilitation des sites et sols pollués ne représentent que le tiers du total des dépenses de protection de sols, des eaux de surface et souterraines mais correspondent néanmoins à "l'essentiel des dépenses dites curatives".
Les industriels restent les clients les plus importants de ce secteur d'activité - ils financent la moitié de la dépense totale de dépollution. Mais "leur poids tend toutefois à se réduire notamment en raison d'une intensification de l'effort de prévention, comme le montre l'enquête 'Antipol' de l'Insee : en 2010, les industriels ont dépensé 160 millions d'euros pour prévenir les risques d'infiltrations polluantes dans les sols contre 70 millions d'euros en 2001", constate le CGDD. Les aménageurs et promoteurs immobiliers contribuent pour un quart au financement de la réhabilitation des sites et sols pollués et "cette part tend à croître dans un contexte de multiplication des reconversions de sites en projet immobilier", précise l'étude. Le dernier quart est financé par la puissance publique et, en particulier, par les collectivités locales "en raison de leurs besoins propres en terrains fonciers". De son côté, l'Etat engage entre 20 et 23 millions d'euros chaque année pour assurer le traitement des sites dits "orphelins". Pour ces sites dont le propriétaire est défaillant, "les collectivités locales et les agences de l'eau participent au cofinancement de façon ponctuelle et limitée", ajoute l'étude.

De multiples facteurs de croissance

Ces dix dernières années, le secteur de la dépollution a bénéficié de "solides facteurs de croissance", souligne le CGDD, à commencer par "la pression foncière élevée" qui stimule les projets de reconversion de friches et augmente la rentabilité des investissements de dépollution. "Les collectivités locales encouragent parfois ces projets de réhabilitation afin de limiter l'étalement urbain", relève d'ailleurs le CGDD. Deuxième facteur de croissance : le renforcement de la législation relative aux obligations des propriétaires de sites d'exploitation dans le cas où la pollution y est avérée. La loi Bachelot du 30 juillet 2003 réaffirme ainsi "l'obligation faite au dernier exploitant de remettre son site en état lorsque celui-ci est mis à l'arrêt ", le niveau de traitement étant modulé en fonction de l'usage futur du site de façon à éviter des coûts dissuasifs pour les décisionnaires de projets de dépollution. Le développement des certifications de services et la professionnalisation des prestataires spécialisés contribuent aussi à la croissance du secteur, qui représentait 2.500 emplois en 2010. Les aides ponctuelles de l'Etat ont aussi pu "contribuer à maintenir la croissance du marché, comme par exemple son engagement de 20 millions d'euros en 2009 destiné à dépolluer des friches urbaines" dans le cadre du plan de relance.
On peut facilement imaginer que cette croissance se poursuive dans les prochaines années. Le projet de loi "relatif à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social" qui a été voté au Sénat le 13 septembre et vise notamment à mettre à disposition des collectivités locales de foncier public appartenant à l'Etat ou à ses opérateurs, aura probablement un effet stimulant puisque les terrains concernés nécessitent souvent un traitement de dépollution.
Le CGDD rappelle enfin que le coût de la réhabilitation d'un terrain peut varier de manière importante en fonction de l'ampleur de la pollution et des techniques utilisées. C'est pourquoi un arbitrage coûts-avantages des techniques est généralement la règle. Les critères d'arbitrage peuvent être "d'ordres économiques, juridiques, relatifs au délai, à leur empreinte environnementale, etc." A propos des techniques utilisées, le CGDD cite une étude de l'Agence de l'environnement et de maîtrise de l'énergie (Ademe). Celle-ci montre qu'en France, en 2010, les traitements des sols pollués "hors site" concernent 50% des volumes traités, suivi des traitements "in situ" (lorsqu'il n'y a pas d'excavation de terres ni d'extraction d'eau) pour 43% des volumes et "sur site" (lorsqu'il y a excavation de terres ou extraction d'eau) pour 7% des volumes. Au final, constate l'étude, "les coûts de dépollution tendent à diminuer notamment en raison d'une concurrence plus importante et d'une plus grande maturité des techniques".