Patrimoine - Régions et départements se désengagent du financement des monuments historiques privés
L'association La Demeure Historique - qui représente depuis 1924 les propriétaires-gestionnaires privés de monuments historiques classés, inscrits ou susceptibles de l’être - publie une étude sur les "Cofinancements publics pour la restauration des monuments historiques privés". Celle-ci porte sur les financements des régions et des départements et sur ceux des services déconcentrés de l'Etat (directions régionales des affaires culturelles). Elle couvre la période 1997-2008 pour les financements de l'Etat et 2003-2008 pour ceux des collectivités territoriales.
Elle commence par rappeler que 50% des monuments historiques appartiennent à des personnes privées, auxquelles la loi du 31 décembre 1913 reconnaît une mission de conservation et de transmission du patrimoine, justifiant ainsi la possibilité de bénéficier de financements publics. L'étude indique, par ailleurs, que le patrimoine historique protégé privé est à l'origine d'environ 63.000 emplois : 5.000 emplois directs (salariés relevant de l'exploitation du monument), 12.000 emplois indirects (travaux de restauration et gros entretien) et 46.000 emplois induits (retombées touristiques). En matière de financement, l'étude constate, depuis le début des années 2000, un "désengagement de l'Etat vis-à-vis des monuments historiques privés", qui se serait traduit par une baisse de 60% des crédits affectés. Cette baisse - qui concerne aussi le patrimoine public - aurait eu "pour effet une dégradation progressive de la situation, pour l'ensemble du patrimoine, en particulier dans les petites communes". L'étude s'arrête à l'année 2008, mais le rapport reconnaît toutefois que les 100 millions supplémentaires accordés en 2009 à l'entretien du patrimoine dans le cadre du plan de relance - et intégrés depuis lors en base budgétaire - ont apporté un précieux coup de pouce, en portant l'enveloppe totale à 400 millions d'euros. Ceci a permis une forte augmentation (+80%) des crédits affectés à la conservation préventive et à l'entretien, qui représentent désormais 15% des moyens alloués aux monuments historiques contre 11% en 2009.
De forts écarts entre collectivités
Il n'en va pas de même pour les régions et les départements. Ainsi, sur les 19 régions métropolitaines ayant répondu à l'étude, 11 n'ont versé aucune subvention aux monuments historiques privés en 2008, contre 8 en 2006. Le total des aides versés en 2008 s'élève à 3,2 millions d'euros, ce qui a permis de financer 55 opérations, contre 197 en 2005. Les écarts sont, par ailleurs, très importants selon les régions : la Bretagne a ainsi versé un million d'euros, alors que deux autres régions ont versé moins de 50.000 euros. La situation ne devrait pas aller en s'améliorant, puisque 14 régions sur les 19 répondantes ont indiqué qu'elles n'envisageaient pas de verser des subventions aux monuments historiques privés en 2010. Selon l'étude, ce désengagement s'explique par le fait que les régions estiment que la protection du patrimoine ne relève pas de leur compétence et qu'elles considèrent faire déjà un geste à travers leur participation au financement de la Fondation du patrimoine.
De leur côté, les 87 départements ayant répondu au questionnaire ont versé au total, en 2008, 6,73 millions d'euros de subventions à des monuments historiques privés, ce qui a permis de financer 475 opérations. Mais 28 départements sur les 87 répondants - soit près du tiers - n'ont versé aucune subvention. Ils devaient être 34 à agir de même en 2010. Par ailleurs, les subventions attribuées ont reculé de 33% depuis 2003. Les écarts entre départements sont également très importants, puisque le montant des subventions est inférieur à 50.000 euros dans de nombreux départements, mais va jusqu'à 800.000 euros dans les Alpes-Maritimes. A noter : outre les résultats nationaux, l'étude de La Demeure Historique propose des fiches détaillées par régions et par départements.