Elections - Régionales : un deuxième tour sans vrai vainqueur ?
La droite l'emportant dans sept régions métropolitaines, dont l'Ile-de-France et dont deux régions à la faveur d'un "front républicain". La gauche amenée à présider cinq régions dont trois grandes "nouvelles" régions. Trois régions affichant jusqu'au bout des scores particulièrement serrés. Le Front national échouant finalement à décrocher une seule région - malgré un nouveau record en nombre de voix - mais comptant désormais environ 350 conseillers régionaux. Deux hémicycles régionaux qui ne compteront aucun élu de gauche. A l'issue du second tour des élections régionales ce dimanche 13 décembre, sur le plan national, nul ne pouvait afficher le moindre triomphalisme.
"Plafond de verre"
Lors de ce scrutin marqué par un sursaut de participation (58,53%, contre 50,08% au premier tour), le Front national, qui voyait "quatre à cinq régions gagnables", a échoué tant en duel dans le Nord et en Provence-Alpes-Côte d'Azur qu'en triangulaire dans le Grand Est, en Bourgogne-Franche-Comté et en Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées.
On se souvient de ce qui s'était passé, un peu de la même façon, lors des élections départementales de mars dernier où, présent dans 1.107 seconds tours, le FN ne s'était finalement imposé que dans 31 d'entre eux. "Le FN ne parvient pas, faute d'alliés et de réserves, à l'emporter, au second tour, où il se heurte toujours à un plafond de verre", commentait ainsi par exemple dimanche soir le politologue Yves-Marie Cann.
Pourtant, le parti de Marine Le Pen progresse encore depuis le premier tour dans toutes les régions (Corse exceptée) et réalise son meilleur score national en pourcentage (28%) et en nombre de voix (6,8 millions). Autres motifs de satisfaction pour le FN : la campagne de l'entre-deux tours aura été focalisée sur sa présence, le "sursaut républicain" visant à le contrer aura obligé la gauche à s'effacer dans deux régions, il sera bien présent dans tous les conseils régionaux...
"Redonner envie de voter pour"
Alors qu'elle dirigeait la quasi-totalité des anciennes régions, la gauche a remporté cinq des treize nouvelles régions, plutôt dans la moitié ouest : Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes, Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, et Bretagne, où Jean-Yves Le Drian cumulera la présidence avec son poste de ministre de la Défense. La victoire a été serrée devant la droite en Centre-Val-de-Loire et Bourgogne-Franche-Comté.
Au prix de sa disparition totale des conseils régionaux pendant six ans dans le Nord-Pas-de-Calais-Picardie et en Paca, le PS - et avec lui toute la gauche – a en tout cas réussi son pari de faire barrage au Front national et espère que son "sacrifice" dans deux bastions sera porté à son crédit.
Manuel Valls a appelé dimanche soir "pour les féliciter" les vainqueurs de gauche dans les régions, mais aussi les candidats de droite Christian Estrosi, Xavier Bertrand et Philippe Richert pour qui le PS avait appelé à voter.
Les résultats du second tour "nous obligent à entendre davantage les Français, à agir, sans relâche, plus vite, pour obtenir plus de résultats", a déclaré le Premier ministre lors d'une brève allocution télévisée. "L'emploi, la formation des chômeurs, l'apprentissage pour nos jeunes doivent mobiliser plus que jamais toute notre énergie" et "nous devons apporter la preuve que la politique ne reprend pas comme avant", a-t-il enchaîné. Objectif : "Redonner envie de voter 'pour', plutôt que de voter uniquement 'contre'."
Le score du FN, notamment dans les zones rurales, "témoigne d'un sentiment de doute, d'inquiétude, de peur et d'éloignement auquel nous avons commencé à répondre mais il faut continuer", a-t-on de même déclaré dans l'entourage de François Hollande.
En attendant, le patron du PS, Jean-Christophe Cambadélis, s'est "adressé au gouvernement" pour exiger une "inflexion qui doit intervenir dans les 18 mois à venir". "Nous ne pouvons plus continuer comme cela. Il faut agir contre la précarité et pour l'activité comme nous nous sommes attaqués à la compétitivité et à la refondation de l'école", a-t-il considéré. Julien Dray, vice-président PS sortant de la région Ile-de-France, a quant à lui estimé que s'ouvrait une "nouvelle période politique" et a annoncé que le PS lancerait "dès demain un nouveau projet", avec "vraisemblablement le nom du parti."
Pas de "vague bleue"
S'ils ne réalisent pas de "vague bleue", Les Républicains alliés aux centristes l'emportent dans les régions Nord-Pas-de-Calais-Picardie, Paca, Alsace-Lorraine-Champagne-Ardennes, Auvergne-Rhône-Alpes, Pays-de-la-Loire et Normandie. La droite a aussi conservé la Réunion. Et la victoire probablement la plus notable : l'Ile-de-France, présidée par la gauche depuis dix-sept ans, où Valérie Pécresse a battu de peu Claude Bartolone (43,8% contre 42,18%, le FN récoltant 14,02%). Claude Bartolone a d'ailleurs confirmé qu'il remettrait en jeu dès ce lundi son mandat de président de l'Assemblée nationale, comme il s'y était engagé, même si son maintien au perchoir ne fait guère de doute.
Dans le Nord et en Paca, les candidats du parti Les Républicains ont bénéficié des bons reports des voix de gauche. Nathalie Kosciusko-Morizet, qui avait été la seule responsable LR, avec Jean-Pierre Raffarin, à s'opposer au ni-PS ni-Front républicain, a d'ailleurs lancé dès l'annonce des premiers résultats : "Si les électeurs avaient appliqué le ni-ni, nos candidats dans le Nord-Pas-de-Calais et en région Paca auraient été battus."
Dans le Grand Est, Philippe Richert s'est imposé nettement dans une triangulaire avec le FN et le candidat de gauche Jean-Pierre Masseret, qui s'était maintenu, s'opposant aux consignes de désistement du PS.
Malgré l'ensemble des victoires, les responsables LR ont réagi sur un ton très mesuré, choisissant de mettre l'accent sur la défaite du Front national plutôt que sur leurs propres résultats restés en-deçà de leurs espérances.
Les CTAP au secours des politiques régionales ?
A droite comme à gauche donc, le ton n'était pas à l'euphorie : "succès sans joie" pour Jean-Christophe Cambadélis, tandis qu'aux yeux de François Fillon, "ce sursaut est un réconfort mais il n'efface pas le 6 décembre qui reste le véritable baromètre de l'état du pays".
Prochaine étape : l'élection des présidents et vice-présidents. Pour les régions dont le périmètre est inchangé, ce sera dès ce vendredi 18 décembre. Pour les régions fusionnées, il faudra attendre le 4 janvier.
Dans les deux régions où les présidents LR auront pour seule opposition des élus FN, une situation évidemment totalement inédite, une instance annexe au conseil régional pourrait voir le jour. "Il va falloir repenser la gouvernance de ces régions pour que ceux qui sont éliminés du pilotage" soient associés, a d'ailleurs déclaré Ségolène Royal ce lundi matin.
En Paca, Christian Estrosi s'est en tout cas engagé durant l'entre-deux tours à créer un "conseil territorial" dirigé par des anciens présidents de la région, dont les socialistes Michel Vauzelle et Michel Pezet, pour entendre toutes les voix, y compris celles de gauche. De même, en Nord-Pas-de-Calais-Picardie, Xavier Bertrand avait évoqué il y a quelques jours la mise en place d'"une conférence territoriale régionale", "avec les présidents de conseils départementaux, quelle que soit leur sensibilité politique, les représentants des communes, quelle que soit leur taille, et des intercommunalités". Ce qui ressemble fort, toutefois, à la conférence territoriale de l'action publique (CTAP) prévue par la loi dans toutes les régions. On verra si, dans le Nord comme partout ailleurs, ces CTAP parviendront à redonner du souffle aux politiques régionales et territoriales, à devenir, comme le souhaite la ministre Marylise Lebranchu, ces espaces où "tous les élus peuvent enfin discuter de l'organisation de leur territoire et s'organiser au mieux pour répondre aux besoins de leurs concitoyens".
C. Mallet, avec AFP
Ile-de-France
L'Ile-de-France, première région de France, gérée par la gauche depuis 17 ans, est tombée dans l'escarcelle de la droite avec la victoire de la liste menée par Valérie Pécresse (Les Républicains) qui obtient 43,80% des voix devant celle de Claude Bartolone (PS) à 42,18%.
Les résultats définitifs donnent une avance d'un peu plus de 1,5 point et quelque 60.000 voix à Mme Pécresse sur M. Bartolone, sur un total d'un peu plus de trois millions de voix exprimés pour l'une ou l'autre des deux listes.
Le Front national de Wallerand de Saint Just enregistre 14,02%, en baisse de plus de quatre points par rapport au premier tour et fait son retour dans l'hémicycle régional, après une mandature d'absence.
"L'Ile-de-France, je la rêve conquérante et exemplaire", a déclaré dans la soirée Mme Pécresse, rayonnante, dans une allocution à ses partisans près de son QG dans le VIIIe arrondissement de Paris avant d'aller fêter sa victoire dans une brasserie de la place de Clichy.
"La sécurité et l'emploi seront mes priorités immédiates", a indiqué la députée des Yvelines, qui démissionnera de son mandat pour se consacrer à la région qu'elle avait échoué à conquérir en 2010 face à Jean-Paul Huchon (PS). "Le travail" a fait la différence, a-t-elle affirmé à l'AFP, "cela fait des années que j'arpente l'Ile-de-France, on a fait des tonnes de propositions concrètes". "Un certain nombre de personnes qui viennent de tous les horizons ont voté pour moi. Ça m'oblige évidemment à être à la hauteur de ce vote, ce n'est pas un chèque en blanc et pour cela je serai vraiment présidente à temps plein et la présidente de tous les Franciliens, j'ai pris l'engagement de n'oublier aucun territoire", a affirmé Mme Pécresse qui menait une liste LR-UDI-MoDem.
A 22h05, Claude Bartolone, président de l'Assemblée nationale, a reconnu sa défaite: "Je transmets toutes mes félicitations à Mme Pécresse que j'ai appelée et je souhaite bonne chance à l'Ile-de-France", remerciant ses alliés écologistes et du Front de gauche. Il a confirmé qu'il remettrait en jeu dès lundi son mandat de président de l'Assemblée nationale, comme il s'y était engagé, même si son maintien au perchoir ne fait guère de doute.
Selon M. de Saint Just, les "Franciliens ont voulu assurer la défaite de la gauche".
David Douillet (LR), colistier de Mme Pécresse dans les Yvelines, a expliqué lui aussi que de nombreux électeurs FN du premier tour "nous expliquaient qu'ils allaient voter utile".
La maire de Paris PS Anne Hidalgo a félicité Mme Pécresse pour sa victoire, ajoutant qu'elle "travaillerait en portant les préoccupations et les exigences des Parisiens notamment en matière de pollution, de création de logements et de justice sociale". Elle s'est aussi félicité que le FN n'ait recueilli qu'autour de 6% à Paris, où la liste de gauche a frisé les 50%.
En passant de l'exécutif à l'opposition, Emmanuelle Cosse (EELV) a noté une "défaite honorable en Ile-de-France malgré le rassemblement" et promis à Mme Pécresse "de combattre ses idées". Quant à Eric Coquerel, coordinateur politique du Parti de gauche, il a assuré que ses élus seraient des "opposants résolus", "attentifs à ce que Mme Pécresse n'aille pas trop loin dans les partenariats public-privé, dans les politiques d'austérité, les coupes dans les budgets des associations".
Parmi les résultats notables, la ville d'Evry chère au Premier ministre Manuel Valls a donné plus de 59% à Claude Bartolone. C'est dans les Hauts-de-Seine que Mme Pécresse réalise son meilleur score, avec 52,17%, alors que M. Bartolone est le champion de son fief, la Seine-Saint-Denis, avec 52,40%. Le Front national ne dépasse la barre des 20%, avec 25,80%, qu'en Seine-et-Marne.
Auvergne-Rhône-Alpes
La région Auvergne-Rhône-Alpes a basculé à droite dimanche, avec une nette victoire du numéro trois des Républicains Laurent Wauquiez qui distance son rival socialiste Jean-Jack Queyranne de quatre points, en dépit d'une réserve de voix quasi inexistante à l'issue du premier tour.
"On a gagné, on a gagné", scandaient ses militants à son QG de campagne à Lyon sans attendre les premières estimations à 20h00, avant d'entonner la Marseillaise, drapeaux tricolores à la main. Crédité d'une campagne de terrain active, le député-maire du Puy-en-Velay, ancien ministre, candidat des Républicains, de l'UDI et du MoDem, a obtenu 40,61% des voix (113 sièges), contre 36,84% pour M. Queyranne (57 sièges) et 22,55% au candidat du Front national Christophe Boudot (34 sièges). Auvergne et Rhône-Alpes, qui ont fusionné pour donner naissance à la deuxième région française, étaient contrôlées par la gauche depuis onze ans. "Nous allons nous mettre au travail rapidement", a promis M. Wauquiez. "Mais je n'oublie pas la forte défiance qui s'est exprimée au premier tour", a-t-il déclaré en rappelant ses priorités: "le travail plutôt que l'assistanat, pas d'augmentation d'impôts, le retour de l'exemplarité des élus et une République ferme face aux communautarismes".
"Nous devons nous préparer à nous opposer à tous les reculs sociaux ou culturels que la droite extrême tentera de nous imposer", a rétorqué M. Queyranne, qui a cru à sa victoire jusqu'au bout. "Nous avons mené une campagne intègre et sincère. Nous avons été dénigrés bien au-delà des critiques qui relèvent d'un sain débat démocratique", a-t-il dénoncé. Les derniers sondages avaient donné les deux candidats au coude à coude.
Au premier tour, Laurent Wauquiez avait rassemblé 31,73% des voix, contre 23,93% à Jean-Jack Queyranne et 25,52% à Christophe Boudot, des résultats qui laissaient le second tour incertain.
Comme ailleurs, la participation a nettement progressé d'une semaine sur l'autre : elle a atteint 57,68% (en hausse de 8,77 points). Le sursaut de l'électorat semble avoir essentiellement profité à M. Wauquiez, qui gagne 400.000 voix en une semaine - l'équivalent de la moitié de ses soutiens du premier tour. En revanche, la progression de M. Queyranne s'explique pour une large partie par les reports de voix des communistes et des écologistes.
Le Front national, s'il progresse légèrement en nombre de voix, ne profite pas du surcroît de participation et voit, en pourcentage, ses résultats stagner ou s'effriter, souvent de deux à trois points, dans nombre de départements.
Si M. Queyranne n'avait réussi à s'imposer dans aucun département à l'issue du premier tour, la gauche est finalement restée majoritaire dans le Puy-de-Dôme, la Drôme, l'Ardèche, l'Isère, ainsi que sur la métropole de Lyon.
Comme au premier tour, M. Wauquiez fait son meilleur score dans son fief de Haute-Loire, avec 57,85% des suffrages.
M. Wauquiez, 40 ans, dont les positions droitières étaient considérées comme un handicap en début d'année alors qu'il briguait l'investiture face à l'ancien commissaire européen Michel Barnier, a su rapidement rallier le centre à sa candidature. Pour mener ensuite campagne tambour battant dans la nouvelle région, en balayant tous les thèmes et en dénonçant des "scandales" dans la gestion socialiste sortante.
A l'inverse, Jean-Jack Queyranne, 70 ans, a pâti, outre de l'usure du pouvoir après deux mandats à la tête de Rhône-Alpes et du rejet de la politique gouvernementale, des divisions de la gauche. Au premier tour, EELV et le PCF avaient fait liste à part, avant de le rejoindre au second. Le report des voix n'a pas suffi.
Paca
Largement devancé au soir du premier tour des régionales en Paca par la députée FN Marion Maréchal-Le Pen, le député-maire LR de Nice Christian Estrosi a pleinement profité du retrait de la liste socialiste pour décrocher la victoire au second tour avec 54,78% des voix.
A la tête de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, l'ex-champion motocycliste va mettre un terme à 18 ans de présidence socialiste en succédant à Michel Vauzelle. Il s'est imposé plus largement encore que ne le prédisaient les sondages publiés entre les deux tours face à la députée FN, qui obtient 45,22%.
Avec 14 points et près de 250.000 voix de retard sur sa rivale (26,48% des voix, contre 40,55%) le 6 décembre, le second tour paraissait pourtant mal parti pour l'ex-ministre de l'Industrie, dont l'image, très marquée à droite, risquait d'être un handicap pour attirer le vote d'électeurs de gauche privés de candidat après le retrait du socialiste Christophe Castaner (16,59%).
Avec une abstention en net reflux (39,69%, contre 48,06% au premier tour), Mme Maréchal-Le Pen (45,22%) a tout de même engrangé 166.401 voix de plus. Son adversaire a quant à lui récolté 1.073.485 suffrages, soit 603.601 de plus que le 6 décembre.
"Avec cette victoire nous avons déjoué tous les pronostics", s'est réjoui Christian Estrosi. "C'est la victoire d'un grand peuple, qui une fois de plus a montré sa capacité à déjouer l'imposture, refuser les diktats et a montré sa capacité de résistance", a-t-il poursuivi.
"Il y a des victoires qui font honte aux vainqueurs", lui a rétorqué deux heures plus tard Mme Maréchal-Le Pen, dont le grand-père Jean-Marie Le Pen avait échoué au même endroit à trois reprises, en 1992, 1998 et 2010. "Il n'y a pas de plafond de verre" au score du FN, a-t-elle aussi estimé, se félicitant d'avoir réalisé en Paca le meilleur score de son parti en France.
Face à sa rivale d'extrême droite, le maire de Nice avait endossé dans l'entre-deux tours un nouvel habit de "résistant" et choisi pour sa première sortie Vitrolles, une ville symbole des premières victoires du FN dans la région Paca à la fin des années 90.
Et tout au long de la semaine, Christian Estrosi a multiplié les appels du pied en direction des électeurs de gauche - ceux de Christophe Castaner, et ceux aussi d'EELV et du Front de Gauche, qui avaient fait liste commune (6,5%).
Promesses dans le domaine culturel, engagement à créer un conseil territorial dirigé par des anciens présidents de la région (dont les socialistes Michel Vauzelle et Michel Pezet) pour entendre toutes les voix, y compris à gauche, multiples références au "gaullisme social" : le maire de Nice a mis les bouchées doubles pour atténuer quelque peu une image très droitière.
"Que soient remerciés celles et ceux à gauche qui ont fait le sacrifice de leur présence au sein de l'hémicycle régional pour permettre le triomphe des idéaux républicains que nous avons en partage", a-t-il déclaré après l'annonce de sa victoire. "Je sais que par leur vote, ils n'ont pas abdiqué leurs convictions mais qu'ils ont su faire prévaloir l'intérêt général. Vis-à-vis de ceux-ci, je sais la responsabilité qui pèse sur mes épaules de ne pas trahir ces idéaux républicains", a-t-il conclu.
"Je serai une vigie exigeante, parce que notre sacrifice ne peut pas se faire pour donner un blanc-seing", lui a répondu Christophe Castaner, député-maire de Forcalquier (Alpes-de-Haute-Provence), annonçant la création prochaine "d'un observatoire de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, avec les forces vives, les différents partis politiques, les fédérations socialistes" pour pallier l'absence d'élus de gauche à la région.
Midi-Pyrénées-Languedoc-Roussillon
La gauche a conservé son bastion de Midi-Pyrénées-Languedoc-Roussillon dimanche, les listes de l'ancienne secrétaire d'Etat Carole Delga l'emportant largement au second tour des régionales dans une triangulaire avec la droite et l'extrême droite.
Victorieuse à 44,81%, selon les résultats définitifs, Carole Delga devient, à 44 ans, la plus jeune présidente de région de France à la tête de la gauche rassemblée.
Sur la nouvelle région de 5,6 millions d'habitants, elle aura eu finalement raison du vice-président du Front national, Louis Aliot, qui recueille 33,87%, et du candidat LR-UDI Dominique Reynié, qui réunit 21,32%.
Mais en l'absence du redécoupage des régions, Louis Aliot aurait pu remporter de justesse l'ancien Languedoc-Roussillon, à 3.327 voix près.
La fusion des listes EELV-Front de gauche a indéniablement favorisé la victoire de la socialiste, de même que le maintien du candidat de la droite sarkozyste, qui a appliqué la consigne du "ni retrait, ni fusion".
Le sursaut de mobilisation de l'électorat semble aussi avoir profité au PS, avec un taux de participation de plus de 62% en hausse de 8,5 points par rapport à 2010.
Si les deux listes perdantes ont progressé de deux à trois points par rapport au premier tour, la candidate socialiste fait le plein dans onze départements sur treize.
Le FN s'impose seulement dans le Gard et les Pyrénées-Orientales, dont Louis Aliot est originaire. Dominique Reynié ne remporte pour sa part aucun département, pas même l'Aveyron où le professeur de Science-Po Paris est né.
La vague rose est ressentie également à Toulouse, avec près de 60% des suffrages à gauche.
Après 17 ans de règne de la gauche en Midi-Pyrénées et 11 en Languedoc-Roussillon, Carole Delga s'est présentée comme une nouvelle présidente de région "heureuse et lucide", persuadée que "le peuple du Sud a fait le choix clair de rester fidèle à son histoire et à ses valeurs". Elle a salué la mémoire de ses "grands prédécesseurs Georges Frêche et Christian Bourquin", les défunts ex-présidents de Languedoc-Roussillon, mais aussi leur successeur Damien Alary, ou encore le sortant de Midi-Pyrénées Martin Malvy.
"Si nous avions deux régions séparées, nous aurions remporté le Languedoc-Roussillon ce soir", a souligné de son côté Louis Aliot, "donc le PS ne tient que par Midi-Pyrénées et par cette alliance contre-nature avec les écolos et le FG", a-t-il estimé.
En dernière position, Dominique Reynié s'est dit pour sa part "très déçu" mais "heureux" de s'être maintenu, convaincu que sa "façon" de s'opposer au FN "était la bonne". Reprenant sa casquette de politologue, M. Reynié a souligné que Midi-Languedoc était l'une des régions, si ce n'est la région, où le FN avait le moins progressé en France.
Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes
Le socialiste Alain Rousset, président de la région Aquitaine depuis 1998, a remporté dimanche, dans le cadre d'une triangulaire l'Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes avec une nette avance sur sa rivale de la droite et des centres, Virginie Calmels (44,3% contre 34%). M. Rousset arrive en tête dans la totalité des 12 départements.
Avec ce grand chelem, le PS obtient donc 107 sièges dans la nouvelle assemblée régionale, contre 47 pour la liste de Virginie Calmels, première adjointe d'Alain Juppé (Les Républicains) à la mairie de Bordeaux. Alain Rousset était arrivé en tête au premier tour, avec 30,4% des voix contre 27,2% à Virginie Calmels.
En troisième position, le Front national et sa tête de liste Jacques Colombier recueillent 21,7% des voix au second tour. Un score en léger recul par rapport à dimanche dernier (23,2%) mais en progression notable par rapport aux régionales de 2010 (8% à périmètre comparable), qui assurera au FN 29 conseillers régionaux.
Au terme d'une campagne rude, marquée par de vifs échanges avec une Virginie Calmels pugnace et très critique sur son bilan à la région, Alain Rousset aura finalement fait le plein des voix de gauche, profitant sans doute davantage que sa rivale d'une participation en hausse (57,7% contre 51% au premier tour).
Il a bénéficié du report des voix écologistes, grâce à la fusion avec la liste EELV menée par Françoise Coutant, qui avait obtenu 5,6% des suffrages au premier tour (moitié moins qu'en 2010), et d'au moins une partie de celles du Front de gauche même si son candidat malheureux, Olivier Dartigolles (4,85% des voix au premier tour), n'avait pas donné de consigne de vote au second tour.
Malgré cette nette victoire, le président sortant de la région Aquitaine subit une forte érosion des voix (-12 points) par rapport aux régionales de 2010, où il avait recueilli 56,48% des voix à périmètre comparable. Un recul d'ailleurs épinglé dimanche soir par Virginie Calmels lorsqu'elle a reconnu sa défaite.
Mais cette novice en politique, auparavant dirigeante d'entreprises de l'audiovisuel, placée par Les Républicains à la tête d'une alliance de la droite et des centres (LR-UDI-MoDem-CPNT), cède elle aussi du terrain: elle n'a recueilli que quelque 34% des voix alors que la droite et le MoDem totalisaient près de 41% des suffrages en 2010 à périmètre comparable. Virginie Calmels était arrivée en tête au premier tour dans les quatre départements de Poitou-Charentes, et même en Corrèze, département du président François Hollande, mais cela n'a pas suffi.
L'appel lancé le soir même du premier tour aux électeurs du FN à voter pour elle afin de faire échec à Alain Rousset l'aura peut-être même desservie, particulièrement auprès d'électeurs centristes traditionnellement hostiles aux idées de l'extrême droite.C'est sans doute le cas dans les Pyrénées-Atlantiques - département pourtant contrôlé par l'alliance Les Républicains et le MoDem de François Bayrou - où Alain Rousset a obtenu dimanche près de 48% des voix, contre seulement 35,2% à Virginie Calmels. A Pau, la ville dont François Bayrou est le maire, le candidat socialiste obtient même la majorité absolue des suffrages (50,6%, contre 34% à la droite). Dans sa ville de Bordeaux aussi, la première adjointe est distancée par Alain Rousset (41,5% contre 48,7% à M. Rousset).
Pays de la Loire
La droite a reconquis dimanche la région Pays de la Loire, après la large victoire de la liste de droite et du centre menée par le sénateur LR Bruno Retailleau face à la gauche et au Front national.
L'union de la droite (LR/UDI/MoDem) a devancé de cinq points la liste du socialiste Christophe Clergeau, qui malgré un "front commun" et une fusion d'entre-deux-tours avec Europe Ecologie-Les Verts (EELV), n'a pas réussi à conserver cette région traditionnellement de droite, qui avait basculé à gauche en 2004.
Bruno Retailleau recueille 42,70% des suffrages et remporte 54 sièges dans la future assemblée régionale, contre 37,56% des voix et 26 sièges pour la gauche et les écologistes, qui disposaient de 63 sièges dans le conseil régional sortant.
Déjà largement en tête au premier tour (33,49% des voix), Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat et ancien vice-président de la région de 1998 à 2004, a semble-t-il profité d'un bond de la participation au second tour. Elle s'établit à 57,25%, contre 49,98% au premier tour et 51,78% au second tour des régionales de 2010.
Le candidat de la droite et du centre est arrivé largement en tête dans trois des cinq départements de la région, notamment dans son fief, la Vendée, mais aussi dans le Maine-et-Loire et en Mayenne. Il est largement devancé par son rival socialiste en Loire-Atlantique (45,23% contre 39,16%), seul département encore à gauche dans les Pays de la Loire, et échoue à quelque 400 voix à prendre la tête dans la Sarthe.
Dans ce dernier département, le candidat du Front national, Pascal Gannat, qui y est secrétaire départemental, était arrivé en tête au premier tour, mais il ne termine qu'à la troisième et dernière place au second.
Avec 19,74% des suffrages, contre 21,35% au premier tour, le Front national fait son entrée pour la première fois au conseil régional des Pays de la Loire, où il disposera dès vendredi de 13 sièges.
Allié dès le premier tour avec le PRG et plusieurs formations écologistes, le Parti socialiste avait conclu un accord "de rassemblement" d'entre-deux-tours avec Europe Ecologie-Les Verts (EELV; 7,82% des suffrages), malgré leurs divergences importantes sur le projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, au nord de Nantes.
Dans cette commune, Christophe Clergeau engrange quatre fois plus de voix qu'au premier tour et arrive largement en tête (45,10% des suffrages). Bruno Retailleau, qui se place en deuxième position (30,40%), a dès dimanche réaffirmé qu'il allait demander au Premier ministre "d'évacuer la ZAD", la zone d'aménagement différé dédiée au projet d'aéroport, rebaptisée "zone à défendre" par les opposants.
Bretagne
Le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, tête de liste du PS en Bretagne, a remporté sans surprise dimanche les régionales, devançant très largement son concurrent de droite Marc Le Fur (LR).
Parti en position de grand favori dès le premier tour, Jean-Yves Le Drian a obtenu la majorité absolue avec 51,4% des voix, devançant de plus de 20 points Marc Le Fur (29,7%), tandis que le candidat du Front national, Gilles Pennelle, progresse très légèrement par rapport au 1er tour avec 18,9% des suffrages.
Prenant acte de sa victoire, l'ancien maire de Lorient a évoqué sans le nommer le Front national et ses électeurs qui ont fait un choix "à l'opposé des valeurs fondamentales de la Bretagne".
"Autant je condamne avec force cette idéologie néfaste pour notre devenir commun et pour la République, autant il nous faudra dans les six années qui viennent comprendre et écouter cet appel qui dit 'Donnez-nous du sens'", a-t-il lancé.
Le ministre-candidat l'a emporté, dans cette région traditionnellement ancrée à gauche, sans quasiment faire campagne, à la suite des attentats meurtriers de Paris, qui l'ont conduit à annuler la presque totalité de ses meetings prévus dans la région.
"J'ai dit aux Bretonnes et aux Bretons que si j'étais candidat à la présidence de la région Bretagne, c'était bien pour assurer cette présidence", a rappelé dimanche soir sur TF1 M. Le Drian, qui a déjà présidé le conseil régional de Bretagne de 2004 à 2012.
"Il se trouve que nous sommes en état d'urgence et que le président de la République a souhaité que je continue à assurer mes fonctions de ministre de la Défense le temps nécessaire et c'est lui qui appréciera l'ampleur du temps où je resterai ministre", a-t-il poursuivi.
La liste de "rassemblement" de M. Le Drian, qui a fait le plein des voix de gauche même en l'absence d'un accord de fusion avec les écologistes d'EELV dans l'entre-deux-tours, est arrivée nettement en tête dans les quatre départements bretons, y compris dans les Côtes_d'Armor, dont Marc Le Fur est député, et qu'elle distance largement (49,9%).Jean-Yves Le Drian était déjà arrivé largement en tête du premier tour avec près de 35% des voix, le meilleur score du PS en France, dans une région où le FN avait réalisé un de ses plus maigres scores nationaux (18,17%). Il avait refusé de fusionner sa liste avec celle des écologistes d'EELV (6,7% des voix au premier tour).
Normandie
La nouvelle région Normandie a basculé à droite dimanche à l'issue d'un scrutin serré qui a mis la liste de l'UDI Hervé Morin en tête avec seulement 4.752 voix d'avance sur la gauche, tandis que le FN restait stable par rapport au premier tour à 27,5% des voix.
"C'est sur le fil. Il faut rester modeste", a déclaré sur France 3 Normandie le député de l'Eure, dont la liste LR-UDI-Modem a recueilli 36,43% des suffrages contre 36,08% pour la liste de gauche. "J'ai vécu une soirée électorale comme jamais j'en avais vécu", a ajouté l'ancien ministre de la Défense, 54 ans, sur France Bleu.
A 20h, un premier sondage sortie des urnes donnait la liste PS-PRG-FG de Nicolas Mayer-Rossignol à égalité sur son challenger de droite. Le président PS de Haute-Normandie, 38 ans, tenait arithmétiquement la corde à l'issue du premier tour. Sa liste avait depuis fusionné avec celle d'EELV et du Front de gauche mais pas avec le Parti de Gauche. Mais les résultats définitifs ont détruit les espoirs du jeune président Haut-Normand, considéré comme un proche de Laurent Fabius.
"Il y a un vainqueur très clair, c'est Hervé Morin", a-t-il reconnu. "Il y a une deuxième liste qui fait un score élevé par rapport à la première", a-t-il toutefois souligné.
Des deux anciennes régions, la Haute-Normandie était à gauche depuis 1998, la Basse-Normandie depuis 2004.
"La mobilisation de l'entre-deux tours a rebattu toutes les cartes", a souligné Pascal Buléon, politologue de l'université de Caen, sur France Bleu. "Personne ne triomphe car les deux grands blocs politiques sont rongés par une abstention qui reste forte et par un FN qui reste haut", a ajouté l'universitaire.
Sur l'ensemble de la nouvelle région, la participation est passée de 49,95% au premier tour à 59,08% au second, alors que le bon score du FN au premier tour a surpris.
La tête de liste FN, l'eurodéputé Nicolas Bay, a estimé sur France 3 que le second tour "confirme que le vote (FN est un vote) d'adhésion et que nous avons un tripartisme en Normandie". Il a obtenu 27,5% après 27,71% au premier tour.
La gauche est en tête dans un seul des cinq départements de la Normandie réunifiée, le plus urbain, la Seine-Maritime, avec 39,10% des voix contre 33,22% pour la droite et 27,67% pour le FN. A Rouen, la liste de Nicolas Mayer-Rossignol est également en tête avec 49,60% des voix contre 35,02% pour celle de M. Morin.
A Caen, la gauche arrive en tête avec 46,50% des voix.
Le FN arrive troisième dans tous les départements sauf l'Eure où il est deuxième avec 33,33% des voix devant la gauche (30,36%). Dans l'Orne, il est troisième mais avec 29,56% des voix. Ce parti était arrivé en tête dans trois des cinq départements au premier tour (Orne, Eure et Seine-Maritime).
Nord-Pas-de-Calais-Picardie
Très nettement distancé au premier tour, Xavier Bertrand (Les Républicains) a infligé au second une très nette défaite à Marine Le Pen, grâce à un sursaut de mobilisation et au rassemblement anti-FN derrière lui, notamment des électeurs de gauche.
Le député-maire de Saint-Quentin (Aisne) et ancien ministre de Nicolas Sarkozy l'a emporté, selon les résultats définitifs, avec 57,77% des voix contre 42,23% à la présidente du Front national, qui essuie un échec sévère et progresse d'à peine 1,6 point (mais cependant de plus de 100.000 voix) par rapport au premier tour.
Ce n'est "pas ma victoire, mais la victoire des gens du Nord", a lancé M. Bertrand, pour qui "l'Histoire retiendra que c'est ici (en Nord-Pas-de-Calais-Picardie) que nous avons stoppé la progression du Front national". "Nul ne peut se prévaloir de cette victoire", a ajouté ce natif de la Marne, qui a affirmé qu'avec un FN ayant réuni 4 électeurs sur 10 au premier tour, ce scrutin "changera à jamais" sa "façon de faire de la politique".
Dimanche dernier, après une énorme poussée du FN, Marine Le Pen caracolait en tête avec 40,64% des voix, contre 24,97% à Xavier Bertrand.
Paradoxalement, l'ancien secrétaire général de l'UMP prend une région à la gauche... grâce aux voix de la gauche. Celle-ci avait toujours dirigé Nord-Pas-de-Calais depuis la première élection au suffrage universel direct en 1986.
"Je remercie les électeurs de gauche qui ont clairement voté pour faire rempart", a déclaré le vainqueur depuis son QG à Saint-Quentin. De son côté, le candidat PS Pierre de Saintignon, qui s'était retiré au soir du premier tour, a "félicité" M. Bertrand.
Au contraire, pour le maire FN d'Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais) Steeve Briois, "c'est la malhonnêteté et le mensonge qui l'ont emporté" dimanche soir.
M. Bertrand, qui s'était présenté entre les deux tours comme "le candidat contre l'extrême droite" ("Non au Front national", proclamait sa profession de foi) a profité d'une forte hausse de la participation.
L'abstention n'a atteint que 38,75% en Nord-Pas-de-Calais-Picardie. C'est presque trois points de moins que la moyenne nationale (41,54% selon une totalisation à 00h39) et près de sept points de moins qu'au premier tour (45,19%).
A la tête d'une liste Les Républicains-UDI-MoDem-CPNT - la même au second tour qu'au premier -, l'ancien ministre de Nicolas Sarkozy a bénéficié entre les deux tours de l'appel à voter pour lui de Pierre de Saintignon (18,12% dimanche dernier). La maire de Lille Martine Aubry et la tête de liste EELV-PG Sandrine Rousseau (4,83%) avaient fait de même. Le communiste Fabien Roussel (5,32%) avait, lui, appelé à "faire barrage à l'extrême droite".
La gauche (hors extrême gauche) avait recueilli le 6 décembre un peu plus de 632.000 voix, soit 28,27%.
Ces suffrages se sont reportés massivement sur Xavier Bertrand. Ainsi, dans le Pas-de-Calais, où le nombre de votants a progressé de 60.000 d'un tour à l'autre, le candidat obtient quelque 341.000 voix (54,12%), contre moins de 123.000 le dimanche précédent. Marine Le Pen, elle, ne gagne que 25.000 voix et plafonne à 289.000 suffrages.
Alors qu'elle avait obtenu la moitié des voix des Calaisiens le 6 décembre, Marine Le Pen n'en obtient plus que 45%, contre 55% à M. Bertrand. Le candidat Les Républicains écrase aussi son adversaire à Roubaix (76%) ou Amiens (71,7%).
Plus rassembleur dans l'entre-deux tours, Xavier Bertrand s'était présenté comme "un gaulliste social" et avait salué le retrait "digne et responsable" de Pierre de Saintignon.
Alsace-Lorraine-Champagne-Ardenne
Le président sortant de la région Alsace Philippe Richert, candidat LR-UDI-MoDem dans le Grand Est, a remporté dimanche le second tour des régionales face au numéro deux du FN Florian Philippot, en dépit du maintien du candidat de gauche Jean-Pierre Masseret.
Avec 48,4% des voix, Philippe Richert, 62 ans, a pratiquement doublé son mauvais score du premier tour (25,83%), où il avait été devancé de plus de dix points par le bras droit de Marine Le Pen.
Ce Républicain modéré issu du centrisme, qui avait écarté Nadine Morano durant la campagne après ses propos controversés sur "la France, pays de race blanche", a reconnu dimanche qu'il devait cette performance à de "très nombreux électeurs de gauche et écologistes", en reconnaissant que cela "nous engage et nous oblige" à leur égard.
Mais c'est également à une forte participation, en hausse de 12 points par rapport au premier tour, qu'il doit sa victoire.
Florian Philippot, 34 ans, n'a guère progressé d'un tour à l'autre avec 36,08% des voix, après avoir battu un record historique dans la région au premier tour (36,07%).
"Nous sommes à un plus haut historique, aussi bien dans la région que dans notre pays: c'est une source d'espoir", a-t-il commenté à son QG de Metz en estimant que la France, avec une telle "lame de fond patriote", vivait une "recomposition de son paysage politique".
Selon le politologue strasbourgeois Richard Kleinschmager, le fait que le FN ait perdu toutes les cartes entre les deux tours, alors qu'il les avait "toutes en main" au premier, prouve que "le vote FN est encore un vote protestataire de mécontentement".
Dans les départements ruraux de Haute-Marne et dans la Meuse, le FN arrive néanmoins toujours en tête au deuxième tour devant le candidat de la droite républicaine, recueillant plus de 40% des voix.
Le candidat de gauche, Jean-Pierre Masseret, 71 ans, a tenu son pari : après avoir maintenu sa liste en dépit des consignes nationales et s'être vu retirer l'investiture du PS, il conserve peu ou prou son score du second tour (16,11%) avec 15,51% des suffrages.
Il a probablement su rallier une partie des abstentionnistes, mais aussi une partie des électeurs de gauche et d'extrême gauche, estime Richard Kleinschmager.
En faisant barrage au FN, "les citoyens ont parlé aujourd'hui, ce ne sont pas les appareils qui ont parlé", a commenté Jean-Pierre Masseret, triomphant, depuis son QG de Maizières-lès-Metz.
Contrairement à ses homologues de Paca et du Nord-Pas-de-Calais-Picardie, il pourra ainsi siéger dans la nouvelle assemblée et n'aura pas sur la conscience d'avoir, comme ses détracteurs l'en accusaient, facilité une éventuelle prise du pouvoir par le FN.
Pour M. Masseret, il s'agit d'une preuve que "la stratégie d'évitement ne marche pas contre le FN". "Nous avons été des lumières dans l'obscurité du Parti socialiste", qui devra "tenir compte de cette période qu'il vient de vivre", a-t-il averti.
La secrétaire fédérale du PS du Bas-Rhin, Anne-Pernelle Richardot, qui dans l'entre-deux-tours avait mené une fronde interne pour obtenir le retrait de la liste Masseret, a salué le choix de la "responsabilité" des électeurs de gauche.
Plusieurs frondeurs du PS hésitaient désormais sur la marche à suivre: "Si je suis en cohérence avec moi-même, je démissionne. Mais on va prendre un temps de réflexion avec l'ensemble des colistiers", confiait près de Metz Brigitte Vaïsse, qui faisait partie des 71 colistiers à s'être désistés en vain. Jean-Pierre Masseret leur a ouvert les bras, tout en reconnaissant qu'ils étaient désormais face à "un cas de conscience", faisant appel à leur "morale politique individuelle".
Bourgogne-Franche-Comté
La socialiste Marie-Guite Dufay a conservé sur le fil la Bourgogne-Franche-Comté à gauche dimanche soir, devançant d'une courte tête ses adversaires François Sauvadet (UDI-LR) et Sophie Montel (FN).
"C'est la victoire de tous ceux qui m'ont fait confiance, c'est une victoire chèrement acquise", a déclaré Mme Dufay à Dijon, consciente que "beaucoup de voix (s'étaient) portées sur sa liste pour faire échec au Front national".
La présidente sortante de la Franche-Comté l'emporte de peu avec 34,68% des voix, devant le candidat LR-UDI François Sauvadet (32,89%). Sophie Montel (FN) a ravi 32,44% des suffrages, 5.275 voix seulement la séparant du candidat de l'union de la droite. La candidate frontiste a accru son score du premier tour de pratiquement un quart.
Réunis pour fêter leur victoire dans une salle dijonnaise voisine du conseil régional, les socialistes ont accueilli la future présidente de région par des applaudissements nourris, suivis d'un traditionnel ban bourguignon.
Après avoir remercié militants et élus, Mme Dufay a lancé : "Il y a du boulot mais ensemble, on a fait du bon boulot pour que la grande région commence son histoire avec la gauche !" Le président PS sortant de Bourgogne, François Patriat, a confié à l'AFP que "remettre à Marie-Guite les clés de la grande région était un soulagement et une grande fierté".
Mme Dufay arrive en tête dans le Doubs (37,42%), le Jura (36,11%), la Nièvre (39,38%) et la Saône-et-Loire (34,91%). Mme Montel se place première en Haute-Saône (38,54%), dans l'Yonne (37,63%) et le Territoire de Belfort (35,30%). M. Sauvadet sauve seulement la Côte-d'Or (38,54%) dont il préside le conseil départemental.
"J'assume l'entière responsabilité de cette campagne; nous avons perdu de peu mais nous avons perdu", a déclaré ce dernier depuis son QG de campagne à Dijon, en confirmant qu'il démissionnerait de son mandat de député.
De son côté, Mme Montel a dénoncé depuis son QG à Rans (Jura) "une victoire à la Pyrrhus d'un système que nous dénonçons, à savoir le système UMPS".
La future assemblée régionale de Bourgogne-Franche-Comté sera composée de 51 élus socialistes, face à 25 de droite et 24 FN.
Au premier tour, le Front national était arrivé largement en tête sur l'ensemble de la nouvelle région, avec 31,48% des suffrages, devançant M. Sauvadet (24,00%) et Mme Dufay (22,99%).
Mme Dufay avait maintenu sa liste au second tour, après avoir bénéficié du ralliement du Front de gauche (4,62%) et d'Europe-Ecologie-Les-Verts (3,92%), en estimant être la seule à pouvoir battre la liste du Front national.
Alors que le président du MoDem, François Bayrou, avait soutenu M. Sauvadet, les figures locales du parti centriste avaient entretenu la confusion sur leur positionnement. Sa tête de liste régionale au premier tour, Christophe Grudler, ne s'était pas prononcé pour M. Sauvadet ou Mme Dufay, appelant seulement à faire barrage au FN, tandis que le président de la fédération de Côte-d'Or du MoDem appelait à voter pour Mme Dufay.
Le taux de participation s'est élevé à 61,16%, contre 50,56% au premier tour.
Centre-Val de Loire
La gauche l'a emporté sur le fil au second tour et conserve une majorité absolue à l'assemblée régionale du Centre-Val de Loire grâce à un excellent report de voix entre les deux tours et à une meilleure mobilisation d'abstentionnistes en sa faveur.
La liste d'union de la gauche PS-EELV-PRG menée par le président sortant François Bonneau (PS) est arrivée en tête avec 35,43% des voix, suivie de la liste d'union de la droite (34,58%) et du FN mené par Philippe Loiseau (30%). Un résultat qui déjoue sondages et pronostics qui, jusqu'au premier tour, jugeaient la région perdue pour la gauche.
La hausse de la participation à l'élection entre les deux tours de près de 10 points à 59,22% de votants (contre 49,54% au 1er tour) a profité à toutes les listes, mais dans une moindre mesure à la liste de droite, et encore moins au Front national dont le score stagne en pourcentage, et dont la liste passe de la première à la troisième place.
L'élection s'est jouée dans un mouchoir de poche entre droite et gauche : sur un peu plus d'un million de suffrages exprimés, la liste d'union de la gauche devance de seulement 8.736 voix celle de la droite.
Le FN est en revanche distancé et arrive bon troisième avec 47.053 voix de retard sur la liste LR-UDI-MoDem. La liste d'extrême droite, menée par le député européen et ancien agriculteur Philippe Loiseau, a cependant confirmé sa bonne implantation dans le monde rural où le Front national a fait son meilleur score dans les six départements du Centre-Val de Loire.
Grâce au bonus réservé à la liste arrivée en tête, la gauche bénéficiera d'une majorité absolue de 40 sièges à l'assemblée régionale (20 à la droite et 17 au FN).
Le président sortant de la région Centre-Val de Loire, le socialiste François Bonneau, s'est félicité d'un "résultat (qui) donne une nouvelle majorité pour l'avenir". "J'y vois la reconnaissance de notre bilan", a-t-il dit dans une déclaration publique à l'Hôtel de région à Orléans avant même la proclamation des résultats définitifs. "On va gérer avec une majorité dans l'hémicycle régional puisque nous sommes vainqueurs ce soir. Et d'autre part, en ayant en tête, en ayant au cœur l'attente de l'ensemble des habitants de cette région", a-t-il déclaré à l'AFP.
Le député et président du groupe UDI à l'assemblée nationale Philippe Vigier a déploré de son côté la défaite, "d'un cheveu", de sa liste d'union de la droite LR-UDI-MoDem. Son colistier LR Guillaume Peltier, le leader de la "Droite forte", a estimé que le résultat du scrutin "s'est joué à une voix par bureau de vote"
Corse
Les nationalistes, avec 35,34% des voix, ont remporté dimanche une victoire historique aux élections territoriales en Corse, battant nettement la gauche sortante et la droite victime de ses divisions.
La liste "Per a Corsica" (Pour la Corse), issue de la fusion au second tour des autonomistes et des indépendantistes, a clairement bénéficié de la dynamique de l'union espérée par des nombreux insulaires, ont souligné les analystes.
Les nationalistes ont en outre recueilli de nombreuses voix qui s'étaient portées au premier tour sur deux petites listes de gauche. Depuis 2010, ils occupaient 15 des 51 sièges de conseillers territoriaux à l'assemblée de Corse.
Les nationalistes devancent nettement la gauche conduite par le président DVG sortant de l'exécutif territorial Paul Giacobbi (28,49%), député de Haute-Corse, et la droite emmenée par l'ancien ministre José Rossi (27,07%).
Dans l'unique quadrangulaire organisée dimanche, le Front national a obtenu 9,09% des voix et sera représenté à l'assemblée de Corse.
"C'est la victoire de la Corse et de tous les Corses", a déclaré le chef de file nationaliste Gilles Simeoni, à l'annonce des résultats.
Sa victoire a été acclamée par les cris et les chants de milliers de partisans et sympathisants agitant des drapeaux corses blancs à tête de Maure dans les rues d'Ajaccio, de Bastia et des autres villes de l'île.
M. Simeoni, qui avait été élu l'an dernier maire de Bastia, a ajouté que cette élection illustrait "une volonté profonde d'une véritable alternative, une soif de démocratie, de développement économique, de justice sociale".
Dédiant cette victoire aux "prisonniers et aux recherchés", le dirigeant indépendantiste Jean-Guy Talamoni a déclaré qu'"il a fallu une longue marche de quarante ans pour en arriver là".
"Nous serons les élus de l'ensemble de notre peuple", a ajouté M. Talamoni, soulignant que "la Corse n'est pas une simple circonscription administrative française, mais un pays, une nation, un peuple".
"Le peuple a toujours raison. Il ne faut jamais être déçu d'un choix démocratique", a déclaré M. Giacobbi. Félicitant "très chaleureusement ceux qui l'ont emporté", il les a assurés "de se montrer constructif, loin de tout esprit de revanche, dans l'intérêt de notre île".
Le député-maire Les Républicains d'Ajaccio, Laurent Marcangeli, chef de file de la droite insulaire, s'est félicité de l'arrivée en tête à Ajaccio (36%) de la liste conduite par M. Rossi et a souhaité "bonne chance" aux nationalistes.
"Leur victoire sera la victoire de la Corse", a ajouté M. Marcangeli. Il a encore souligné que la Corse, avec plus de 60% de participation au scrutin, emportait une nouvelle fois la palme du civisme.
Outremer
Dans les quatre territoires d'outre-mer en lice, la Réunion est restée sans surprise à droite, la Guyane devenue collectivité unique ne change pas de mentor DVG tandis que les Antilles, Martinique comme Guadeloupe, ont connu des changements d'ère.
Réunion
La liste d'union de la droite et de l'UDI, menée par le président sortant Didier Robert (les Républicains) a gagné les élections régionales à la Réunion avec 52,69% des voix contre 47,31% à la liste rassemblant la gauche et le MoDem d'Huguette Bello. Didier Robert était déjà arrivé largement en tête du premier tour le 6 décembre avec 40,36% des voix devant la députée divers gauche de Saint-Paul Huguette Bello (23,80%), le maire MoDem de Saint-Leu Thierry Robert (20,32%) et le socialiste Patrick Lebreton (7,12%). La fusion de ces trois listes n'a donc pas réussi à mettre en difficulté le président sortant également sénateur. Entre les deux tours, ses militants ont tourné ce rassemblement en dérision et ont fait campagne sur le thème "la liste Bello sé un manzé coson" ("la liste Bello est un fourre tout" en créole réunionnais). "Ce soir c'est incontestablement l'une des plus belles victoires politiques de La Réunion", a déclaré Didier Robert dans un long discours devant ses militants. Il s'est aussi engagé à poursuivre son action "en faveur du développement de La Réunion". Le taux de participation est de 55,28%, en hausse de 11 points par rapport à dimanche dernier (44,45%), mais en retrait par rapport au second tour de 2010 (59,70%).
Guyane
La liste Guyane Rassemblement conduite par le président du conseil régional sortant Rodolphe Alexandre, 62 ans, remporte largement (54,55%) l'élection à la collectivité territoriale de Guyane (CTG), l'assemblée unique qui va fusionner région et département. Certes la liste conduite par son homologue du conseil général, Alain Tien-Liong (DVG) s'impose à Cayenne et arrive en tête à Saint-Laurent du Maroni, deux des plus importantes des 22 communes de Guyane en matière d'électorat mais aussi deux communes dont les maires étaient colistiers du président du conseil général. Mais la liste conduite par M. Alexandre se détache largement dans la quasi-totalité des autres communes, hormis Saint-Georges de l'Oyapock à la frontière du Brésil où elle est battue de justesse. La liste Alexandre s'impose notamment largement à Kourou, dans la ville spatiale et dans deux communes à fort électorat à la périphérie de Cayenne, celles de Rémire-Montjoly et Matoury. S'il se proclame toujours "homme de gauche" et est étiqueté DVG pour ce scrutin, Rodolphe Alexandre, qui avait été soutenu par Nicolas Sarkozy aux régionales de 2010, compte des personnalités de droite et de gauche parmi ses colistiers.
Guadeloupe
Victorin Lurel, le président de région sortant qui briguait un troisième mandat, a subi un revers électoral brutal en Guadeloupe, battu par 42,48% de voix contre 57,52% pour son rival DVG Ary Chalus. "Un très fort désir de changement a été exprimé. Je salue la victoire de Ary Chalus. Je lui souhaite de réussir et de continuer à faire grandir le pays", a déclaré M. Lurel, qui avait été réélu au premier tour en 2010. Les deux hommes de gauche, députés, n'ont pas toujours été dans des camps adverses mais lors de ce scrutin, Ary Chalus a réuni une liste de rassemblement pour contrer Victorin Lurel, ancien ministre des Outre-mer (2012-14), devenu, au fil de multiples victoires, une figure politique incontournable dans l'archipel, et présenté comme quasiment indétrônable. Les électeurs guadeloupéens se sont davantage mobilisés pour ce second tour avec une participation en hausse mais si certains pensaient que cela pouvait "sauver" le sortant, il n'en a rien été. Les Guadeloupéens ont finalement exprimé une volonté nette de changement avec le choix de la liste "Changez d'Avenir" où figure en numéro 2 une ex-ministre UMP des outre-mer Marie-Luce Penchard et qui avait reçu le soutien de la liste des Républicains. Jouant sur une image d'homme de terrain, proche du peuple, multipliant les déplacements, Ary Chalus, technicien EDF, a surfé sur sa popularité.
Martinique
Le président du conseil régional sortant (DVG) , Serge Letchimy a été sévèrement défait dimanche par Alfred Marie-Jeanne (MIM, indépendantiste) à l'élection de la nouvelle assemblée unique de la Martinique. Le leader indépendantiste, qui avait fusionné sa liste avec celle de la droite menée par Yan Monplaisir (Les Républicains), a gagné ainsi son pari en remportant 54,14% des voix contre 45,86% et obtient sa revanche sur Serge Letchimy qui l'avait battu lors des régionales de 2010. Serge Letchimy a souhaité "bonne chance à Alfred Marie-Jeanne" pour mener "le destin de la Martinique", entendant maintenant surtout se consacrer à son mandat de député (apparenté PS) même s'il assure que "le combat n'est pas terminé". Pour le colistier de Marie-Jeanne, Claude Lise, "une page se tourne" sur l'île tout en récusant le "coup politique" d'une alliance qui avait fait l'effet d'une bombe localement mais qui correspondant à des "préoccupations convergentes". De son côté, l'entrepreneur Yan Monplaisir a promis que les nouveaux élus de la liste "Gran Sanblé", qui emporteraient 32 des 51 sièges de la nouvelle assemblée, allaient "s'attacher à redresser la Martinique dans la transparence et selon le contrat de mandature qui nous lie".