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Elections - Regain d'inscriptions sur les listes électorales : jusqu'à quand ?

Au cours des dernières années, les Français des banlieues se sont inscrits en masse sur les listes électorales. Le Centre d'analyse stratégique a étudié les raisons de cet afflux et invoque la "mal-inscription" pour expliquer la participation traditionnellement plus faible dans les banlieues.

L'un des signes du malaise des banlieues, la non-inscription sur les listes électorales, s'est considérablement affaibli au cours de ces cinq dernières années, analyse une étude que le Centre d'analyse stratégique vient de publier. Alors que cette non-inscription avoisinait au début de la décennie les 25% dans les quartiers dits sensibles, elle se situait à 10% au niveau national. Mais cet écart s'est sans doute réduit de moitié au cours des cinq dernières années.
Les files d'attente des Français venus s'inscrire à leur mairie en décembre 2005 après les appels lancés par des stars du show business ou du sport ont été largement médiatisées. Elles correspondent dans les faits à un véritable sursaut civique. Or, révèle l'étude, ce ne sont non pas les jeunes de 18 ans qui se sont précipités pour obtenir leur carte d'électeur, mais majoritairement leurs "grands frères" de 35 ans. La mobilisation a continué en 2006 avec en ligne de mire les scrutins électoraux de 2007 et a débouché sur la participation record enregistrée lors de la dernière élection présidentielle. La procédure d'inscription d'office mise en oeuvre à partir de 1997 auprès des jeunes de 18 ans a également participé à réduire l'écart entre les banlieues et les autres quartiers.
Pour les auteurs - des chercheurs en science politique -, la première raison expliquant la démobilisation électorale des deux dernières décennies n'est pas un rejet de la classe politique. Leur analyse met en effet l'accent sur le phénomène de "mal-inscription", à savoir le "fait d'être inscrit dans un bureau de vote qui ne correspond plus à son lieu de résidence effectif" et qui constitue selon eux "l'un des principaux facteurs explicatifs des taux élevés d'abstention que l'on enregistre dans les quartiers populaires". Ces "mal-inscrits" ne se sont pas signalés à leur mairie après leur déménagement et ils ne sont pas prêts à parcourir plusieurs kilomètres pour rejoindre leur ancienne commune le jour d'une élection. Sauf s'ils y ont conservé des attaches, en particulier familiales.
Après la hausse sensible des inscriptions de ces deux dernières années et le regain de participation enregistré aux élections présidentielles, les auteurs restent prudents quant à l'avenir. "Il suffirait que le contexte politique soit moins mobilisateur et que les campagnes perdent de leur intensité pour que reprennent la non-inscription, la mal-inscription et l'abstention, ouvrant ainsi un nouveau cycle de démobilisation électorale", concluent-ils. Les dernières élections législatives en ont offert, en quelque sorte, l'illustration, avec une démobilisation qui a atteint des niveaux record dans les milieux populaires.
Une solution durable à l'abstention pourrait toutefois être trouvée, selon le Centre d'analyse stratégique, avec l'instauration d'un système d'inscription d'office et automatique pour l'ensemble des Français de plus de 18 ans, comme cela se fait dans certains pays européens.


Thomas Beurey / Projets publics