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Elections - Redécoupage des cantons : un peu de souplesse pour les départements ruraux ?

Après le rejet de son texte par le Sénat, le ministre de l'Intérieur souhaite que la nouvelle carte des cantons tienne compte des particularités locales.

Le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls s'est dit, le 30 janvier, "très sensible" aux difficultés de la représentation des territoires vastes et peu peuplés posées par le projet de mode de scrutin des conseillers départementaux.
Cette question a été l'un des principaux motifs du rejet par le Sénat du projet de loi mettant en place ces nouvelles modalités d'élection (lire notre article du 18 janvier 2013). Et à l'Assemblée nationale, où le texte sera en discussion à partir du 18 février, bon nombre de députés des campagnes sont également inquiets.
Devant la commission des lois qui l'auditionnait ce 30 janvier, le ministre a indiqué qu'il n'était pas sourd. "Je suis ouvert sur cette question pour y intégrer le maximum de critères", a-t-il déclaré. "Nous avons évidemment un dialogue avec le conseil d'Etat [l'instance conseille le gouvernement sur la mise en place des modes de scrutin]. Je pense qu'il faut mettre des critères pour desserrer l'étau au moment du découpage [des nouveaux cantons]", a-t-il poursuivi. "Je souhaite que le découpage tienne compte des conditions des bassins de vie des zones côtières, des vallées en montagne. Cela devra être inscrit dans la loi."
Le gouvernement prévoit que la population des cantons qui naîtront du prochain redécoupage n'excède pas, ou ne soit pas inférieure de 20% à la moyenne au sein d'un même département. "C'est le Conseil d'Etat qui, reprenant les critères de la jurisprudence du Conseil constitutionnel pour les élections législatives, a conseillé de faire figurer ce critère dans la loi. Je crois sage de ne pas y toucher", a expliqué le ministre. "Dès lors que le découpage se fait par des décrets en Conseil d'Etat, département par département, (...) je préfère ne pas prendre de risques sur ce point", a-t-il dit. "J'aurais souhaité pour ma part un écart un peu plus large", a-t-il confié.

"Usine à gaz"

Manuel Valls a été interpellé par plusieurs députés ruraux. "Des pans entiers du territoire ne seront plus représentés", a lancé François Sauvadet (UDI), dont la circonscription législative, en Côte-d'Or, passerait de 17 à 4 cantons. François Vannson (UMP, Vosges) a demandé au ministre de porter de 20% à 40% (par rapport à la moyenne départementale) la fourchette de population des cantons d'un même département. De plus, il a demandé l'instauration d'un seuil minimum de 15 cantons, qui s'appliquerait dans les départements les moins peuplés.
Comme au Sénat, l'opposition a émis des doutes sur la possibilité concrète pour un binôme d'un homme et d'une femme, indépendants après leur élection, de représenter le même canton, ce que prévoit le projet de loi.
"Quand un maire ira voir un conseiller départemental et n'obtiendra pas de réponse satisfaisante, il ira voir l'autre. Ce sera territorialement ingérable. Vous avez inventé l'inimaginable !", a lancé François Sauvadet. "Pourquoi pas deux présidents de conseil général, deux ministres de l'Intérieur et deux présidents de la République", s'est interrogé Guillaume Larrivé (UMP). Quant à Philippe Gosselin (UMP), il a soulevé le risque de "blocages extraordinaires".
Manuel Valls s'est dit "un peu étonné" de ces critiques. "C'est un binôme, oui, incontestablement, pour imposer la parité." L'élu est non seulement le représentant de sa circonscription d'élection, mais il a vocation aussi à suivre les dossiers de sa collectivité, a-t-il par ailleurs fait remarquer.