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Restructurations - Recettes anti-crise : de fortes attentes sur les régions

Le plan de relance désavoué par les entreprises et les salariés, c'est vers les régions que ces derniers se tournent.

 

Suppression des postes d'intérimaires, chômage partiel puis plans sociaux : la litanie qui se fait entendre depuis plusieurs mois obère les perspectives de reprise économique, selon les dirigeants du groupe Alpha qui fêtait ses vingt-cinq ans mardi. Anniversaire terni par le contexte de crise et la crainte d'un retour au chômage de masse. Entreprises, collectivités, DRH, tout le monde s'accorde sur un point : l'après-crise ne ressemblera pas à l'avant-crise.
Face à la dégradation de la situation, l'Etat fait le dos rond. Plus question de créer des emplois, il faut d'abord "sauver" les plus exposés. "L'accord sur le chômage partiel, l'extension du contrat de transition professionnelle, la multiplication des contrats aidés dans le secteur non marchand sont des mesures de soutien immédiat", a tenté de rassurer Françoise Bouygard, directrice générale adjointe à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP). Pourtant, l'action de l'Etat semble remise en cause par les principaux intéressés. Un sondage CSA réalisé pour l'occasion auprès des salariés, des chefs d'entreprises et des syndicats place désormais les régions devant lui pour ce qui est de trouver des solutions en matière d'emploi et de développement économique. "La montée de l'importance des collectivités locales et régionales est une attente extrêmement forte", a commenté Roland Cayrol, de l'institut CSA. Un désaveu pour le plan de relance : à peine un salarié sur quatre estime qu'il peut avoir des effets au niveau local.
Attendu au tournant par les syndicats après avoir annoncé un important plan de restructuration à la fin de l'année dernière en dépit d'importants bénéfices, le groupe Arcelor-Mittal a préféré s'attarder sur les "conventions de revitalisation et d'ancrage territorial" signées le mois dernier avec le gouvernement, le conseil régional de Lorraine et le conseil général de Moselle. Ces conventions font suite à la suppression en 2008, de 575 emplois à l'usine Arcelor-Mittal de Gandrange. L'objectif : financer des projets de création, de développement ou de diversification d'activités avec près de 800 emplois à la clé, prioritairement pour les salariés touchés par la restructuration. Ces conventions montrent "comment un grand acteur économique peut avoir des engagements d'avenir pour donner des perspectives économiques à la région", a expliqué Daniel Soury-Lavergne, directeur général d'Arcelor-Mittal France. Et de se féliciter au passage de l'idée de "carboduc" qui figure aussi dans la convention d'ancrage territorial et consisterait pour les industriels de Lorraine à collecter leurs émissions de CO2. "Cela n'existe nulle part ailleurs dans le monde : c'est un élément de structuration de la présence industrielle dans la région", a souligné Daniel Soury-Lavergne. Mais c'est sur un autre aspect que le groupe sidérurgique ne fait pas l'unanimité : les "licenciements temporaires". "Il s'agit, lorsque le chômage partiel est insuffisant, de se séparer temporairement d'un certain nombre de salariés tout en garantissant leur retour à l'emploi au moment de la reprise", a précisé le responsable du groupe qui s'est justifié par la baisse importante des carnets de commandes de ses principaux clients : automobile et construction.

 

Former pour préparer la reprise

Sur les deux premiers mois de l'année, la production française d'acier aurait chuté de 42% par rapport à l'an dernier, selon les données de la Fédération française de l'acier communiquées par Daniel Soury-Lavergne. "Toute reprise se fera avec une concurrence absolument effrénée, nous avons un grand défi, ce sont les compétences, il faudra se réorganiser, redéployer les compétences pour la reprise", a-t-il insisté.
L'idée commence à se répandre qu'il vaut mieux profiter des baisses momentanées de cadence pour former les salariés dans la perspective d'un redémarrage, d'autant que, départs à la retraite obligent, l'industrie risque de faire les frais d'un manque de compétences à court terme. Cette solution est déjà envisagée en Franche-Comté, en Lorraine et en Alsace, où le conseil régional s'engage à prendre en charge une partie du surcoût que représente la formation du salarié par rapport au chômage partiel, aux côtés de l'Etat et des OPCA (organismes paritaires collecteurs agréés).
"La crise veut aussi dire qu'il y a quelque chose qui nous attend et la région est le bon échelon pour détecter les opportunités nouvelles, on ne va pas attendre les circulaires ministérielles", a plaidé Adrien Zeller, le président de la région Alsace qui souligne notamment un besoin de personnels qualifiés dans le domaine de l'efficacité énergétique que la région souhaite promouvoir. Une façon aussi de présenter la région comme l'échelon le plus pertinent en matière de formation et de développement économique, en pleine réforme des collectivités. La région est le "lieu de la concertation" a insisté Adrien Zeller, mais "l'unité de base, ce sont les bassins d'emploi qui sont les seuls à pouvoir déterminer les besoins chaque année".
A noter que la création d'un fonds national de revitalisation des territoires est à nouveau à l'ordre du jour. Annoncé en juin dernier par le gouvernement, il fait aujourd'hui l'objet d'une proposition de loi des députés Gérard Cherpion et Gaëtan Gorce. Ce fonds s'adresserait aux entreprises de moins de 1.000 salariés et viendrait compléter la loi de modernisation sociale de 2002 qui prévoit pour toute entreprise de plus de 1.000 salariés "une obligation de revitalisation" au-delà d'un certain nombre de licenciements. Selon Gérard Cherpion, le dispositif permettrait d'obliger des secteurs comme la pharmacie, par définition très diffus sur le territoire, à participer à l'effort de revitalisation. Or, aujourd'hui, le secteur est lui aussi frappé par les licenciements. "Il vaut mieux mobiliser les dépenses très couteuses des plans de départs volontaires vers le retour à l'emploi", a motivé le député.

 

Michel Tendil