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Restructurations économiques - L'action des pouvoirs publics risque de cibler davantage les personnes les plus qualifiées

Si des progrès en matière d'anticipation et d'accompagnement des restructurations économiques ont été réalisés par les pouvoirs publics, ces politiques portent plus difficilement dans les petites entreprises et la qualité du dialogue social est encore à améliorer. C'est ce que révèle une étude du Centre d'études et de recherches sur les qualifications (Cereq) réalisée en coopération avec le groupe Alpha. "Les réponses à de tels traumatismes ne sont pas encore complètement satisfaisantes, détaille l'étude. La situation est encore plus délicate dans les PME, plus fragiles et au mode de management plus intuitif." Au coeur du problème : le manque d'anticipation. "Grandes entreprises et PME ont un trait commun, la réticence à annoncer suffisamment à l'avance les mesures de restructurations." Même problème du côté du service public de l'emploi, dont l'action est "très marquée par une culture dominante de remédiation, d'action après coup vis-à-vis des restructurations". Conséquences : les bénéficiaires sont moins les salariés encore en entreprise que les personnes qui ont déjà perdu leur emploi. "Une phase de concertation et de préparation préalable permettrait pourtant d'améliorer la prise en charge collective et d'en réduire les coûts sociaux", détaillent Hugues Bertrand du groupe Alpha et Bernard Hillau du Cereq dans leur analyse. Autre difficulté : si des dispositifs d'accompagnement renforcé ont été mis en place par les pouvoirs publics pour les demandeurs les plus éloignés de l'emploi, l'ANPE est davantage configurée pour traiter la demande d'emploi qualifiée et en nombre. L'approche territoriale, qui vise à mettre en correspondance prospective des ressources et des besoins sur un territoire, et qui est censée remplacer une approche entreprise, comporte, d'après le Cereq le même risque de ne traiter que les personnes les plus qualifiées. "Les personnels non repérées sur une compétence visible et socialement codifiée, à travers le code des métiers Rome de l'ANPE par exemple, risquent de passer au travers de ce type d'inventaire", prévient ainsi le centre d'études. Enfin, l'analyse du Cereq met en valeur les deux innovations majeures réalisées en matière d'anticipation et d'accompagnement de restructurations instaurées par la loi de modernisation sociale de janvier 2005, à savoir l'obligation de négocier dans les entreprises de plus de 300 salariés sur le volet de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) et la promotion des accords de méthode qui obligent à développer la concertation au sein du comité d'entreprise en cas de licenciements économiques. Mais "la France reste en retrait par rapport à d'autres pays en ce qui concerne la qualité et l'intensité du dialogue social dans les entreprises, assure le Cereq, le cloisonnement entre acteurs privés et publics reste fort en France, en particulier à l'échelon local".

 

Emilie Zapalski