Polices municipales - Rapport Ambroggiani : des syndicats pointent "l'absence" de propositions sociales
Le rapport sur les polices municipales que le préfet Jean Ambroggiani vient de remettre au secrétaire d'Etat aux Collectivités territoriales est loin de susciter l'unanimité chez les fonctionnaires municipaux de police, ceux-ci dénonçant l'absence de propositions de nature sociale.
"On parle du volet social depuis trente ans, mais on n'a vu aucune avancée dans ce domaine", constate Sylvain Lescure, secrétaire fédéral Force ouvrière en charge des polices municipales. Depuis des années, les organisations syndicales demandent la généralisation de l'indemnité spéciale de fonction - qui représente entre 20 et 30% du salaire selon le grade - et son intégration dans le calcul de la retraite. Elles souhaitent aussi une bonification d'un an tous les cinq ans pour un départ en retraite pleine à 55 ans.
Mais pour Jean Ambroggiani, ces revendications pourront en réalité difficilement être mises en oeuvre. Il leur préfère des solutions d'ordre indiciaire, même s'il reconnaît que leur portée est "plus limitée" : notamment la refonte de la grille indiciaire des agents de catégorie B et la révision de l'échelle de la nouvelle bonification indiciaire (NBI) afin de mieux prendre en compte les spécificités des policiers municipaux.
Frédéric Foncel, vice-président du syndicat national des policiers municipaux CFTC, ne veut pas croire que le rapport se limite à ces propositions et n'hésite pas affirmer que celui-ci "n'a pas été publié dans son intégralité". Pour le responsable syndical, Jean Ambroggiani n'a pas tenu ses promesses. "Le préfet s'était engagé en décembre dernier à Nice lors des quatrièmes assises de la sécurité urbaine à ce que l'indemnité spécifique de fonction soit incluse dans le calcul de la retraite et qu'il y ait un volet social dans le rapport !", tempête-t-il. Par ailleurs, le rapport occulterait bien des questions, selon lui. Ainsi, "quid des agréments ?", s'interroge Frédéric Foncel, qui rappelle que les policiers municipaux exercent leurs fonctions en vertu d'un agrément qui peut leur être retiré de façon unilatérale, soit par le procureur de la République soit par le préfet. La CFTC demande que ce régime du "double agrément" soit remplacé par la mise en place d'une commission nationale appelée à statuer sur des agréments de portée nationale, sur le modèle aujourd'hui en vigueur dans la police nationale.
Les propositions du rapport sont essentiellement de nature statutaire. L'une des principales vise la fusion des cadres d'emplois des policiers municipaux et des gardes champêtres. Cette "police territoriale" serait formée des polices municipales d'une part (compétentes en milieu urbain) et des "polices rurales" d'autre part (ensemble des gardes champêtres).
Les gardes champêtres accueillent favorablement le projet du préfet. Les bénéfices de la fusion seraient, il est vrai, nombreux pour les 1.800 agents concernés, puisque leur déroulement de carrière et leurs droits en matière de formation, actuellement moins favorables, seraient alignés sur ceux des 17.000 policiers municipaux.
Pour Jacques Armesto, président de la Fédération nationale des gardes champêtres, cette réforme ne devra cependant pas diminuer les pouvoirs de police des intéressés, actuellement très étendus. Il verrait plutôt d'un bon oeil une extension de leurs pouvoirs. C'est ce que préconise une proposition de loi (en lien ci-contre) déposée en mai 2008 par Claude Leteurtre, député du Calvados, qui, espère-t-il, sera reprise dans le cadre des discussions sur le rapport Ambroggiani.
Mais cette position ne fait pas l'unanimité côté syndical. Sylvain Lescure par exemple ne trouve "pas pertinente" la distinction entre une police municipale et une police rurale.
Concernant le statut des policiers municipaux, le rapport avance par ailleurs des propositions pour améliorer les différents cadres d'emploi. Ces propositions se situent "dans le prolongement" du protocole d'accord du 25 avril 2006 qui avait marqué une "première étape" dans la professionnalisation des polices municipales (lire notre article d'avril 2006, Police municipale : "une étape importante" ). Elles vont être suivies dès le mois d'avril de discussions entre le ministère de l'Intérieur, l'Association des maires de France et les représentants syndicaux.
Thomas Beurey / Projets publics